Les représentants des pays membres de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont décidé lundi l’imposition immédiate d’une série de sanctions diplomatiques, commerciales et financières contre la junte militaire malienne.
Jeudi dernier, la CEDEAO avait sommé la junte militaire malienne, qui a renversé le président Amadou Toumani Touré le 22 mars dernier, de restaurer l’ordre constitutionnel au plus tard le 2 avril, sous peine de sanctions.
Amadou Sanogo, chef de la junte qui a pris le pouvoir à Bamako, s’est contenté dimanche de promettre un retour à un pouvoir civil au Mali et une transition vers des élections, sans toutefois en fixer la date. Une réponse qui n’a visiblement pas satisfait aux exigences de la CEDEAO.
Réunis lundi à Dakar, une dizaine de chefs d’État africains membres de la CEDEAO ainsi que des représentants de l’ONU, de la France et des États-Unis, ont décidé de joindre les actes à la parole en décrétant une série de sanctions contre le Mali.
Les mesures adoptées consistent à fermer les frontières du Mali à tout commerce extérieur, à isoler le pays diplomatiquement et geler les fonds du gouvernement malien au sein de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO).
La France a également demandé au Conseil de sécurité de l’ONU de tenir une réunion sur la situation au Mali.
Mouvement de panique dans le centre du Mali
Pendant ce temps, la rébellion touareg du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) et les groupes islamistes qui la soutiennent consolident leurs positions, après avoir conquis le nord du pays pendant le week-end.
Lundi, l’Agence France-Presse rapportait que des centaines de civils et de militaires évacuaient les villes de Mopti et Sévaré, dans le centre du pays, craignant une avancée rapide des rebelles touaregs vers le centre du pays.
Des témoins qui ont abandonné leurs maisons et leurs biens pour tenter de trouver refuge à Bamako ont expliqué à l’AFP qu’ils fuyaient, car ils ne peuvent plus compter sur les forces gouvernementales pour les défendre.
Depuis vendredi dernier, les troupes maliennes, mal équipées et désorganisées, se replient sans livrer combat devant les rebelles qui mènent une guerre éclair destinée à faire de l’Azawad (le nord du Mali) une région indépendante.
Au cours des derniers jours, les rebelles du MNLA ont pris le contrôle des trois capitales régionales du nord malien, soit Kidal, Gao et Tombouctou , sans rencontrer de résistance notable de l’armée gouvernementale malienne.
La progression rapide de la rébellion est surtout due à l’armement lourd dont disposent les rebelles et les groupes islamistes. Selon l’AFP, ces équipements ont été ramenés de Libye par des centaines d’ex-rebelles des années 1990 qui avaient trouvé refuge à Tripoli, sous la protection de Mouammar Kadhafi.
Visiblement inquiète de la tournure des événements, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a mobilisé et placé en état d’alerte une force d’intervention rapide de 2000 soldats.
Les islamistes prennent le contrôle des villes conquises
Selon l’Agence France-Presse, le leader du groupe islamiste armé touareg Ansar Dine, Iyad Ag Ghaly, a pris lundi le contrôle de la ville de Tombouctou après en avoir chassé les rebelles du MNLA avec qui il a conquis la ville ce week-end.
Iyad Ag Ghaly est une figure connue de la rébellion touareg des années 1990 qui se bat aujourd’hui pour l’application de la loi islamique (charia) au Mali par la lutte armée.
Ses objectifs divergent en ce sens de ceux du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) qui se bat pour l’indépendance du nord du Mali considéré comme le berceau des Touareg.
Selon un caméraman de l’AFP, les troupes de l’Ansar Dine sont arrivées dans Tombouctou lundi matin à bord d’une cinquantaine de véhicules. Après avoir chassé les rebelles du MNLA de la ville, ils ont hissé leur drapeau au mat du camp militaire de Tombouctou.
Dans une adresse à la population locale, Iyad Ag Ghaly a tenté de calmer le jeu en déclarant que ses troupes « étaient là pour l’islam et non pour l’indépendance ou pour faire mal ».
Pendant ce temps, à Gao, qui a aussi été prise par les rebelles le week-end dernier, des habitants de la ville ont rapporté à Reuters que des insurgés touaregs auraient saccagé des bars et interdit les vêtements et la musique occidentale au nom de l’islam.
Des membres d’Al-Qaïda dans les rangs des rebelles?
Selon certaines sources, des éléments d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) participent aux combats, ce que dément régulièrement le MNLA, d’obédience laïque.
Le « Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest » (Mujao), une branche dissidente d’Aqmi dirigée par des Maliens et des Mauritaniens, a quant à lui revendiqué sa participation à l’attaque de Gao.
Les militaires tentent de négocier
La junte militaire a dépêché des émissaires auprès des groupes rebelles touaregs pour tenter d’obtenir un cessez-le-feu, a annoncé dimanche le capitaine Amadou Sanogo.
« Nous avons hérité (…) d’une situation pourrie, on essaie de faire au mieux. Et sur le terrain, on a déjà envoyé des émissaires essayer d’obtenir un cessez-le-feu, afin que ceux qui sont chargés du rétablissement de l’ordre ou bien les négociations » puissent travailler, a déclaré le chef des putschistes.
Ottawa invite les Canadiens à quitter le MaliVendredi dernier, le gouvernement canadien a invité ses ressortissants à quitter le Mali. « Compte tenu de l’évolution des conditions de sécurité, les Canadiens qui se trouvent au Mali devraient maintenant prendre des mesures pour quitter le pays pendant que les moyens de transport commerciaux sont encore accessibles. Le Canada recommande d’éviter tout voyage au Mali. », peut-on lire dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères du Canada.
Précisant que le Canada entretient des relations amicales avec le Mali depuis de nombreuses années, Ottawa se dit maintenant préoccupé par « les événements dans le nord du pays, où des groupes rebelles, notamment ceux qui sont affiliés à des organisations terroristes, ont marqué des progrès ».
La France, de son côté, conseille à ses ressortissants dont la présence n’est pas indispensable de quitter provisoirement le Mali.
Source: Radio Canada
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