Le triomphe de la démocratie sénégalaise, qui tenait au miracle, face à un présidant sortant croisant le fer rouge à la volonté de son peuple, pour se maintenir au pouvoir à tout prix, avant de prendre à court le monde entier et de susciter un respect devenu universel à son effigie, en tant que ciment du multipartisme dans son pays, après en avoir été momentanément l’humilié, repose de nouveau la problématique de l’alternance au pouvoir.
Avec cette pluie de félicitations chaleureuses adressées par la COD en tant que collectif de partis politiques et par ses composantes en tant qu’entités autonomes, les opposants du régime de Ould Abdel Aziz, qui s’impatientaient de voir le printemps arabe s’opérer en Mauritanie, cherchent-t-ils à réitérer que l’alternance au pouvoir est inévitable, soit par la révolte, soit par les urnes ?
Les partis de l’opposition étaient convaincus que le printemps arabe qui a renversé des régimes dictatoriaux puissants, notamment dans le Maghreb (Tunisie, Libye) allait inéluctablement souffler sur la Mauritanie pour doter ce pays de nouveaux dirigeants. Une certitude jetée en bloc par le pouvoir de Ould Abdel Aziz dont les ténors scandaient dans leurs meetings « la Mauritanie n’est pas la Tunisie » et glorifiaient même le régime, le créditant d’être le premier Etat arabe à déclencher les vagues de révoltes contre les systèmes absolus. Dans leur actuelle et rude confrontation politique, la COD et le pouvoir continuent à se renvoyer les invectives et à jurer de gagner la guerre de l’alternance, grâce à la popularité pour Abdel Aziz et par une manière ou par une autre pour l’opposition.
Cette agitation politique qui n’a pas connu de répit ces derniers temps, se trouve aujourd’hui fortement nourrie par le triomphe de la démocratie sénégalaise, que la COD semble saluer et accueillir de façon plus chaleureuse que le pouvoir en place. Une relecture de tous les communiqués de congratulations adressées aussi bien au nouvel homme fort du Sénégal Macky Sall qu’au président sortant Abdoulaye Wade, par la COD, par les partis qui la composent, par l’Ira, par l’opposition dialoguiste (El Wiam et App), convergent sensiblement vers le même souhait non déclaré de ses acteurs politiques. Autrement dit, si à ce jour, la Mauritanie n’est réellement pas la Tunisie, le paysage politique et militantiste mauritanien non issu des rangs du pouvoir, tient-il dans ses murmures faciles à décrypter à signifier à Ould Abdel Aziz qu’à défaut de le faire « dégager » à la manière « printanière », ce sera difficile pour lui, de se maintenir au pouvoir grâce aux urnes où face à un peuple méprisé par ses dirigeants et que le changement est inéluctable. A moins bien sûr que la démocratie fonctionne à son meilleur régime et qu’elle ne soit pas grippée par le style rectificatif ou chaotique comme c’était le chaos pour les égyptiens et les libyens.
A propos de ces réactions à la présidentielle sénégalaise, l’Ira évoque une maturité du peuple Sénégalais et de sa classe politique, considérant qu’’il s’agit d’une leçon de patriotisme et de civisme que le Sénégal tout entier donne au continent africain aux prises avec un cycle odieux de coups d’Etat « inauguré le 08 Août 2008 par la rébellion de Mohamed Ould Abdel Aziz ». Le Rdu, quant à lui apprécie hautement l’expérience démocratique sur l’autre rive fleuve ; « expérience qui nous fait toujours défaut en Mauritanie », indique ce parti. L’App salue pour sa part « le niveau de responsabilité du Président sortant » ainsi que l’esprit de civisme et de patriotisme du peuple Sénégalais « qui a su exprimer dans la paix, l’ordre et la concorde sa volonté politique, donnant ainsi une nouvelle preuve de son niveau de conscience politique et de maturité démocratique ». Le Rfd et tous les autres partis et Ongs sont allés presque dans le même sens de compliments, nuançant parfois des sérieux défauts à la démocratie mauritanienne.
Amadou Diaara
Source : Le Rénovateur le 28/03/2012
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