Le Président, l’Opposition:Entre quête du Nord et conquête du Pouvoir

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Le monde politique mauritanien bouge. Le pouvoir bouge de son côté, vers son côté, celui que lui indique l’aguille de sa boussole du moment : Nouadhibou. La Coordination de l’Opposition Démocratique, elle aussi, bouge vers son côté, vers où se pointe l’aiguille de sa boussole : Nouakchott.

Deux rendez-vous, deux lieux symboliques, deux dates qui se succèdent. Du simultané ou presque. Le Président, Mohamed Ould Abdel Aziz a choisi de se tourner vers Dakhlet Nouadhibou, en se détournant de l’autre Mauritanie. La C.O.D opte pour une sortie à Nouakchott, pour couronner ses séries de tournées à l’intérieur du pays. La bataille se déclenche…
’A beau mentir qui vient de loin.’’ Le versant Hassaniya de ce proverbe calerait mieux, peut-être, au contexte politique actuel. Littéralement : ‘’Celui qui va mentir, qu’il éloigne ses témoins.’’ Serait-on, au niveau de la présidence de la République, en train de consacrer cet adage maure. A l’Est du pays s’installe l’insécurité. S’installent aussi des camps des réfugiés Touaregs, fuyant la guerre au Mali. Et, s’installe surtout, gravement, d’ailleurs, une sécheresse, destructrice, en tout cas, pour une zone pastorale, réservoir national des richesses animales.

Pendant que les populations de l’Est du pays accueillent, stoïquement, les grandes canicules, les flux des réfugiés touaregs, le spectre d’Al Qaida, la sécheresse dévastatrice, le Nord, Nouadhibou, s’apprête à accueillir, en grande pompe, le président de la République. On tourne un peu le dos à l’Est. On tourne le dos, donc, aux moult questions, en instance. A celles des éleveurs, dont les vaches sont soumises, pour reprendre l’expression du député de l’UFP, Moustapha Ould Bedredine, à un régime alimentaire drastique.

On tourne le dos à d’autres questions d’ordre sécuritaire plus saisissantes, celles-ci. On s’éloigne un peu plus des témoins de la misère orientale. On fuit les mains rugueuses d’une population désemparée. On opte pour serrer des paumes plus douces. Pour se congratuler, pour se revigorer, pour s’asperger des fraîcheurs marines, alliées à celles produites par les accueillants stéphanois, aux boubous amidonnés, au parfum exhalant les senteurs enivrantes du célèbre et très prisé magasin d’El Corte Inglés, à quelques lieues, de là-bas, dans les Îles Canaries.

Le voyage du président de la République, Mohamed Ould Abdel Aziz, a été annoncé, officiellement, jeudi dernier. C’est pour le 13 du mois courant, si finalement cette date sera retenue. En effet, le voyage présidentiel à Nouadhibou a été déjà reporté et les ‘’responsables’’ de la ville y sont consignés depuis déjà plus d’un mois, attendant ‘’le bonheur’’.
De toute façon, on se prépare depuis quelque temps déjà pour cette visite, qui, dit-on, se révèlera, si on croit des sources proches des hautes sphères, décisive et cruciale. Des décisions majeures y seraient-elles décrétées ? Un nouveau cap, en dehors de celui dont la boussole indique le nord, se déclinerait-il, à son issue ? Tout porte à le croire, si on devait s’investir à diagnostiquer la fièvre qui gagne les cadres de la majorité présidentielle, originaires de Dakhlet Noudhibou, ses tribus, ses autorités et ses hommes d’affaires.
On a comme l’impression qu’il s’agit d’une échéance. Importante échéance pour le président de la République, dans une période de crise, tous azimuts. On nourrit déjà beaucoup d’espoir sur la fameuse Caisse de Dépôt et de Développement dont l’annonce de la création officielle sera donnée par le président de la République. C’est un peu l’annonce phare de l’événement. Un nouvel outil dont la mission serait d’accorder des prêts d’investissement à l’intention des chômeurs. L’annonce présidentielle portera, justement, sur la mobiilisation d’un important montant disponible d’ores et déjà pour lancer des opérations de prêts dans l’immédiat.

Toutefois, le Président pourrait bien parler, au cours de cette visite, avec aisance, d’ailleurs, sans risque de démenti, du succès du Plan d’Urgence ‘’Espoir 2012’’. Bien évidemment. Dans la capitale économique, exclusivement, halieutique et minière, où la vue d’un troupeau de vaches s’assimile à l’apparition d’une meute d’OVNI sur terre, on peut bien s’évertuer, sans aucun problème, à disserter, en long et large, sur l’Espoir et l’espérance, désormais, acquis pour sauver des milliers de têtes de bétails, cherchant quelques soupçons de broutilles, à plus d’un millier de kilomètres.

A chacun sa journée fatidique…

Le 13 mars est dans quelques jours seulement. Mais, avant le 13 mars, il y a le 12 mars. Forcément. Une autre date. Une autre échéance. Dont les rendez-vous est fixé à Nouakchott, la capitale politique. Et, dont l’acteur principal n’est autre que la Coordination de l’Opposition Démocratique, C.O.D.

Celle-là, à l’inverse de Mohamed Ould Abdel Aziz, vient justement de terminer une série de tournées. Celles opérées dans les régions orientales ont été, on s’en souvient, fortement médiatisées. La C.O.D est revenue de l’Est du pays pleine d’espoir, en laissant derrière elle beaucoup de misère doublée d’une colère perceptible contre le pouvoir central.
Un peu dopée par ses visites à l’intérieur du pays, en empruntant au passage quelques brins d’air auprès des révolutions arabes, elle a programmé une manifestation à Nouakchott. La totale, serait-on tenté de dire. La somme de toutes les colères. La révolution. Le printemps de Nouakchott. Le timing de cette sortie et son itinéraire viennent tout juste d’être décidé, le 12 mars, la veille du rendez-vous stéphanois du président de la République.
Il y au moins une nouveauté. Un nouveau, un revenant, le Président du Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie, CMJD, chef, officiel, de la première transition démocratique (2005-2007), Ely Ould Mohamed Vall. L’entrée sur scène du candidat malheureux de l’élection présidentielle de 2009 a été annoncée à la C.O.D par Ahmed Ould Daddah, en personne. Une autre nouveauté. D’autres sources au sein de la C.O.D évoquent d’autres surprises, des nouvelles importantes personnalités, jusqu’ici,
optant pour le profil bas seront de la partie ce 12 mars.

Pour Ely Ould Mohamed Vall, cette sortie sera, peut-être, le début d’un réengagement politique plus affirmé. Une occasion, pour lui, de prouver également la capacité de frappe, dont d’aucuns l’accréditent. Même si son apport politique reste à prouver, l’homme est considéré par bon nombre d’observateurs comme la bête noire de celui qui a été naguère son protégé au sein de l’armée, celui-là qui dirige le pays d’une main de fer, depuis, au moins 2008.

Et la manifestation proprement dite ? Quelle forme prendra-t-elle ? A l’opposition, on n’en dit pas grand-chose. La mobilisation a déjà commencé. Ahmed Ould Daddah a déclaré, avant-hier, dans un meeting de la C.O.D à Arafat que lundi 12 mars sera une journée décisive. Aucune excuse pour les retardataires, a martelé le patron du R.F.D.
Si, l’affluence s’avère imposante, on est parti pour élire domicile au lieu-dit. La nouvelle Place Tahrir nouakchottoise ? C’est ce que laissent entendre certains pontes de la C.O.D. Si la manifestation n’arrive pas à drainer beaucoup de foules, on attendra, la sortie du Président de la République. Si elle échoue, celle-ci, on est un peu quitte. Match nul. Si, elle réussit, il aura marqué un point. Un autre point.

Abdelvetah Ould Mohamed

Source  :  Réseau Mauritanien d’Informations le 08/03/2012

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