Interview : Mamadou GUISSE, Président de la Fédération AJD/MR USA/CANADA

Vous venez de succéder à Cherif Ba à la tête de la Fédération AJD/MR USA/CANADA. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs et nous exposer vos projets ?

Mamadou GUISSE : Bismillah.
Permettez-moi, de procéder à quelques préliminaires. Je tiens à remercier tous ceux et toutes celles qui ont fait confiance en ma personne pour me confier ce rôle de Président de Fédération. Je remercie aussi énormément mon ami Cherif Ba pour avoir conduit à bon port, malgré tous les challenges, la Fédération USA-Canada de l’AJD/MR après 3 années de travail dur.

Je suis très fier de me présenter pour permettre à mes camarades de partis et compatriotes mauritaniens en général de mieux me connaître aussi bien personnellement que politiquement. Mon histoire va certainement résonner avec beaucoup de jeunes de la génération des années de braise.

Qui est Mamadou Guisse?

Je suis natif du village de Talhaya dans la région du Gorgol au Sud de la Mauritanie, village ou j’ai couru les ruelles jusqu’à l’âge d’aller à l’école. Ma scolarité a commencé au Nord de la Mauritanie, à Zouerate plus précisément, où je suis resté jusqu’au Lycée ; pour ensuite aller étudier à Nouadhibou, puis à Nouakchott où j’ai obtenu mon baccalauréat Série C en 1992. Mes études, m’ont ensuite envoyé en Algérie en 1993 au bénéfice d’une bourse d’études Supérieures. J’y ai obtenu un diplôme d’Ingénieur en Hydraulique en 1998 à l’Université des Sciences et Technologies Houari Boumedienne d’Alger.

De retour dans la Mauritanie de Ould Taya, il fallait se rendre très vite à l’évidence que les qualifications seules n’étaient suffisantes pour pouvoir servir sa patrie. Après avoir battu le macadam pendant un an et essuyer toutes les défaites je me suis résolu à mon esprit d’entreprise ; Vente d’ordinateurs, commerce de peaux entre Dakar et Nouakchott, Atelier de couture, enseignement des Maths au Collège et Lycée El Hadj Oumar Tall entre autres ruses.

En l’an 2000, au sortir d’un concours, je me retrouve à Ouagadougou (Burkina Faso) à l’Institut International  d’Ingénierie de l’Eau et de l’Environnement (2ie) qui s’appelait alors EIER. J’y décrocherai un diplôme de Post-études Supérieures (Equivalent DESS) en Mobilisation des Ressources en Eau. Je rejetterai une offre de la part de l’école pour une position d’Assistant de Recherche en Hydrologie pour retourner en Mauritanie et tenter encore de mettre mes compétences au service de mon pays. C’était encore peine perdue. En réponse à une offre renouvelée de l’EIER pour la position d’Assistant de Recherche, je dirai oui et retournerai à Ouagadougou pour un contrat d’un an.

Au bout du compte, l’exile a été le seul salut que j’aie eu depuis longtemps. Alors, avec un cœur plein de regret je m’envole pour les USA en 2002 à la recherche de cieux plus cléments. Une fois ici, la barrière de langue a rendu la moitié de mes compétences caduques, il fallait alors retourner à l’école et étudier une spécialité en demande ici et intégrer ainsi le milieu professionnel. Je ferai alors un Associates Degree in Computer Aided Drafting and Design à ITT Technical Institute.

Mon Activité politique

Si vous suivez mon parcours, vous remarquerez qu’il a été marqué par un mixage d’expériences forgées par la découverte et l’échange. Etant né au Sud de la Mauritanie ; j’ai grandi et étudié au Nord. Je me retrouve dans la capitale Nouakchott avant que mes études supérieures m’amènent dans le monde Arabe et ensuite en Afrique noire. Aujourd’hui, je vis en Occident. Je peux alors me targuer d’avoir accumulé un minimum d’expérience pour pouvoir prendre une décision informée dans mes choix politiques.

J’ai été toute ma vie imprégné par l’évolution des évènements en Mauritanie. Etant encore très jeune j’ai vu les émeutes de 1979 contre l’Arabisation forcée de l’enseignement, j’ai vu l’échange de prisonniers avec le Polisario, j’ai vu l’arrivée de Ould Taya au pouvoir en 1984, j’ai vu les tracts des FLAM en 1986, l’Exécution des Officiers SY, BA, Sarr en 1987, les emprisonnements et licenciements injustes de cadres noirs de la SNIM la même année. J’ai écouté avec dégoût mes camarades de classe s’en féliciter pour la plus part. J’ai assisté aux évènements du Sénégal en 1989, et peux personnellement attester des atrocités au vu de l’entassement de morts couverts de sang à la morgue de la Polyclinique de Cansado. J’ai suivi les expulsions de familles que je connais étant mauritaniennes, j’en connais qui ne sont jamais arrivées à destination. J’ai vécu les couvre-feux, les exactions dans les villages du Sud y compris le mien. J’ai connu des victimes de l’extermination éthique de 1989, la purge dans les forces armées, la police, la gendarmerie et la garde nationale. Je connais des victimes de tortures et d’actes de barbarie qui sont mortes ou ont survécu.

Bref, puis-je tout citer ? Certainement pas sinon ceci se transformera en un livre. Malgré la douleur et le sentiment de désespoir, il y a une chose que je n’ai jamais perdue et cette chose c’est l’ESPOIR.  J’ai jamais perdu l’espoir qu’en Mauritanie, il y a assez d’humanité pour arrêter cette folie meurtrière et qu’un jour, dame Justice fera son petit bonhomme de chemin pour juger et condamner les auteurs et commanditaires de ces actes de barbarie. Je reconnais, cependant, que des progrès indéniables ont été faits depuis quelques temps dans la situation des Droits Humains dans le pays. Malheureusement, la racine du mal est toujours solide ; à savoir impunité et corruption.

Je suis convaincu que rien ne peut être établi dans le pays sans dialogue et participation ; la Mauritanie est multiculturelle et multiethnique et tout effort de la designer en quelque chose d’autre sera vain et voué à l’échec. J’ai ainsi toujours prôné le dialogue et la concertation et cela dans toute organisation où j’ai milité, que cela soit les organisations de défense des droits de l’homme, les Associations Estudiantines, les Partis politiques ou encore les Associations communautaires. J’ai toujours été contre toute sorte d’exclusion basée sur quelque critère que cela soit.

Comme tout jeune Mauritanien noir, ma grande équation est de faire la balance entre les responsabilités familiales et sociales et le devoir de participer à créer dans ce pays, que nous aimons tant, une situation juste et égalitaire pour toutes les couches sociales.

Mamadou Guisse et l’AJD/MR

Ayant toujours pris des initiatives et participé à des actions initiées par d’autres groupes, je n’ai pas en tant que tel milité dans un parti politique depuis que j’ai quitté l’UFD après les élections de 1992. Néanmoins, j’ai toujours été à la recherche d’une organisation politique qui soit sur le terrain et qui véhiculerait le message de participation active dans le but de faire valoir les droits et la justice pour toutes les victimes d’injustice en Mauritanie. A y voir de près, il n’y a pas un parti politique, autre que l’AJD/MR, qui soit représentatif et dont le programme se résume à faire de la Mauritanie un pays d’Egalite ou toutes ses composantes seront traitées au même pied devant la justice et les opportunités.

J’ai adhéré à l’AJD/MR au mois de Mai 2008 après une discussion approfondie avec le Frère Ousmane Diagana. J’y ai apporté mon expérience de la vie en général et politique en particulier. J’y ai, loin de toute exagération, trouvé le cadre idéal pour mes aspirations. J’avoue que les challenges ne manquent pas pour le parti, mais en même temps, je suis très optimiste quant au positionnement du parti dans le futur proche. Jusqu’à dernièrement, où j’ai été élu Président de la Fédération Nord Américaine de l’AJD/MR, j’y occupais le poste de Chargé de la Communication en même temps que le poste de Secrétaire Adjoint de la Cellule de Philadelphie.

La vie politique mauritanienne est à un tournant de son histoire. Evidemment, plusieurs tournants ont été ratés de par le passé et l’espérance est toujours que le vrai changement est toujours possible malgré la résistance farouche de certains milieux rétrogrades.

Les problèmes majeurs auxquels nous faisons face, en Mauritanie, sont a l’amont du recensement discriminatoire, de l’expropriation des terres, de l’Arabisation a outrance ou encore le problème des langues. Ces problèmes, à mon humble avis, sont tous les symptômes de la seule maladie dont nous souffrons et qui est le manque de diversité dans les milieux de prises de décision où le terrain est occupé sans partage par les bourreaux de l’unité nationale et de sa diversité. Seule l’organisation et la participation active dans le jeu politique peut obliger un changement d’attitude de la classe dirigeante. S’il leur devient difficile de trouver nos voix au vote ou encore s’ils sont obligés de négocier avec nos dirigeants avant de nous imposer leurs politiques, nous seront de facto preneurs de décision. Cela ne peut pas se faire ni a partir de l’étranger, ni en démissionnant de toute action politique pour raison que « rien ne changera dans ce pays ». Le changement ne vient jamais seul.

La Fédération USA /Canada de l’AJD/MR

Je vis ici aux USA, mais je considère que ma participation à la vie politique en Mauritanie est un devoir de citoyen, je ne crois nullement que quelqu’un  viendra améliorer la situation de la Mauritanie à ma place.

En prenant les rennes de la Fédération, je suis très conscient des difficultés  auxquelles il faudra faire face. Mais, je sais aussi que « facile » n’a jamais fait partie de mon vocabulaire au vu de mon expérience de vie. Je suis convaincu que je ne serai pas seul à faire face à ces challenges. J’ai une équipe très dynamique qui est prête à faire l’impossible mais aussi et surtout je bénéficie du support de ma famille.

Une page est tournée, une nouvelle vision est née et les compétences sont recherchées, parmi toutes les bonnes volontés et chez toute personne qui soucieuse de l’avenir de la Mauritanie, sans distinction de race ou d’appartenance politique. Nous travaillerons  ensemble pour mener le parti à la position de grandeur qu’il mérite.

Pour finir, j’exprime mes remerciement les plus sincères aux militants du parti qui malgré les critiques et les incitations au doute ont maintenu leurs convictions et leur confiance en la direction politique. Je lance un appel aussi à tous ceux qui ont douté et ce sont éloignés, que la ligne politique du parti n’a pas bougé d’un pouce. Il y’a de la place pour le dialogue et l’échange que cela soit dans la Fédération Usa/Canada ou dans les autres sections de l’AJD/MR.

A toute personne, qui se plaint de la conduite du parti, qu’elle sache, que sa contribution est la bienvenue pour améliorer celle-ci, car une fois de plus, ce n’est que de l’intérieur d’une organisation que l’on peut se faire entendre et Dieu sait que la discussion y est ouverte.

Enfin de compte, Mamadou Guisse peut être défini en deux concepts, Recherche sans relâche du savoir et Amour infaillible pour son pays la Mauritanie.

Merci beaucoup, Bocar ba et Boubacar Sy pour cette opportunité de m’exprimer.
Wassalam !

Merci Monsieur Mamadou GUISSE

Interview réalisée par : Bocar BA et Boubacar SY

 

Source  :  AJD MR le 10/11/2011

 

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