ONU : le destin incertain de la candidature palestinienne

Les consultations sur l’adhésion de la Palestine aux Nations unies débutent lundi après-midi au Conseil de sécurité, mais les enjeux et la capacité d’inertie de l’ONU sont tels qu’il n’est pas certain qu’elles aboutissent rapidement, ni même qu’elles aboutissent à un quelconque vote.

Les Palestiniens qui ont choisi cette option, exaspérés par les États-Unis, savent pertinemment qu’elle n’a pratiquement aucune chance immédiate d’aboutir puisque Washington opposera son veto et que le minimum de neuf votes favorables qui pourrait éventuellement l’en dissuader n’est pas garanti.

Consciente de cette réalité, la délégation palestinienne a d’ores et déjà indiqué qu’en cas «d’obstruction ou de délai injustifié», elle irait rapidement à l’Assemblée générale, où elle sait qu’elle peut compter sur une large majorité (2/3 des 193 voix sont requises) pour obtenir un statut intermédiaire d’«État observateur non membre». Samedi depuis Ramallah, Azzam al-Ahmad, membre du Fatah, s’est fait plus précis : «Les Palestiniens donneront deux semaines au Conseil de sécurité.»

En attendant, ils négocient avec trois membres en particulier parmi les quinze du Conseil de sécurité : la Bosnie- Herzégovine, le Gabon et le Nigeria, plutôt favorables à leur adhésion, mais soumis à l’intense pression d’Israël (qui n’est pas membre du Conseil de sécurité) et des États-Unis. Désireux d’éviter à tout prix d’aller à un veto qui les discréditerait dans les pays arabes, les États-Unis espèrent obtenir suffisamment d’abstentions pour sauver la face. Sur les quinze, deux pays se sont déjà ralliés au «non» américain : la Colombie et l’Allemagne. Sept ont au contraire déjà annoncé qu’ils voteraient en faveur de la Palestine : la Chine, la Russie, le Brésil, l’Inde, le Liban, l’Afrique du Sud et le Nigeria qui a réitéré son soutien dimanche. Restent le Royaume-Uni, la France, le Portugal, la Bosnie-Herzégovine et le Gabon. Les deux premiers argumentaient depuis des mois auprès des Palestiniens pour qu’ils n’aillent pas au Conseil de sécurité, l’option, à leurs yeux, la plus conflictuelle, la plus inutile et la plus dangereuse. Le Portugal penche plutôt pour un oui mais peut-il maintenir sa position si jamais la France et le Royaume-Uni s’abstiennent ? Quant à la Bosnie, pour un diplomate occidental, elle «ne fera rien qui irrite les Américains, elle n’en a pas les moyens». Dans les couloirs de l’ONU, certains diplomates estiment que Mahmoud Abbas n’aura peut-être pas plus de 7 ou 8 voix, en ajoutant celle du Gabon aux sept déjà acquises.

«Tout est affaire de pouvoir»

«Au Conseil de sécurité, tout est affaire de pouvoir. Le Royaume-Uni et les États-Unis peuvent influencer les autres. Les pays qui soutiennent la Palestine sont relativement faibles. Ils sont contents de lui afficher leur soutien, mais face à la pression américaine, ils ne résisteront pas. J’ai vu cela des centaines de fois au Conseil de sécurité», rappelle Carne Ross, ancien diplomate britannique, directeur du think-tank Independent Diplomat. «Ce qui arrangerait beaucoup de pays, y compris les pays arabes, c’est qu’il n’y ait pas de vote», confie un autre diplomate occidental. Dans un mémo détaillé sur la question, le Security Council Report explique en substance que c’est tout à fait possible. Chaque pays dispose d’un droit de veto «informel» au comité qui examine la demande de la Palestine. Celle-ci pourrait ainsi «rester» bloquée dans ce comité (composé des quinze membres du Conseil de sécurité), dont «les réunions ne sont pas publiques» . L’histoire a montré que les procédures d’adhésion sont traitées de façon très variable. Elles ont pris trois jours par exemple pour le Soudan du Sud ou… quarante-deux ans pour les deux Corées.

Adèle Smith

Source  :  Le Figaro le 25/09/2011

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