8 ans après Moktar Ould Daddah… La vie n’est pas rose pour les héritiers

Moktar Ould Daddah, le premier président de la Mauritanie, a vécu dans l’abstinence matérielle durant les vingt ans de son règne.

 

 

 

Tous ses successeurs ou presque en ont fait de même, ayant, peut-on- dire hérité non seulement de son fauteuil présidentiel, mais aussi et surtout d’une dose de sa probité morale.Cet état de fait est présentement visible sur les conditions de vie de ces hommes d’Etat, qui ont eu à présider la destinée du pays : le tombeur de Moktar, Moustapha Ould Mohamed Salek, est présentement malade et ne vit pas dans le luxe…

Idem pour Ould Louly. Et Mohamed Khouna Ould Haïdalla ne roule pas non plus sur de l’or et rend tous les jours à la mosquée dans une vieille Mercedes. Quant à Maàouiya Ould Sid’Ahmed, on peut tout lui reprocher, sauf de dire qu’il s’est superbement enrichi pendant ses vingt et un an de pouvoir. On n’a pas fourni de preuves de sa fortune colossale à l’étranger. Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallah, lui, n’a pas eu le temps de s’installer à la présidence. Tous ces hommes ont vécu dans l’austérité comparativement à leurs paires du continent noir et du monde arabe, qui arborent le luxe insolent. Une raison de plus de mettre ces hommes et leurs descendances dans un minimum de vie décente. Enquête autour de la vie des Daddah

Une vie d’austérité

Il n’était pas du tout un saint, il le savait tout autant que la plupart de ses compatriotes : amis, collaborateurs et parents. Mais il s’était fixé une règle de la gestion de la chose publique : «Nul ne peut servir deux maîtres : Dieu et l’argent». Il se devait de respecter à la lettre cette règle. C’est donc ainsi qu’il a porté son dévolu sur la vie d’austérité en servant ceux et celles, qui ont mis la destinée du pays entre ses mains tremblotantes en ayant ainsi qu’un seul et unique témoin, Allah, Le Tout-Puissant. Comme en atteste ce propos tiré dans son ouvrage intitulé ‘’La Mauritanie contre vents et marées’’ : «Dieu sait que, tant que j’étais à la tête de mon pays, je n’ai jamais agi- du moins consciemment- pour des motivations strictement égoïstes. J’ai toujours agi conformément à ce que je croyais être l’intérêt de mon pays. Je me suis toujours efforcé- y suis-je arrivé ?- de me dépouiller de tout sentiment pouvant m’influencer dans le mauvais sens». Il, c’est évidemment Me Moktar Ould Daddah, le premier président de la République Islamique de Mauritanie. Celui qui a dirigé les destinées de notre pays durant une vingtaine d’années. Si l’on en croit Bertrand Fessard Foucault, le natif de Boutilimit a été sur terre un «homme dont le pouvoir fut créatif, parce qu’il combinait modernité, tradition, foi musulmane et, à mesure des années, une connaissance approfondie des grands du monde, des drames et des injustices de l’époque contemporaine». Autant dire que le fils de Mohamedeen était sans cœur avec les présumés coupables détourneurs des derniers publics. La preuve, Moktar Ould Daddah, lui-même, n’hésita pas d’écrire à son ministre de la Justice : «Je viens d’avoir connaissance du cas d’un fonctionnaire qui s’est rendu coupable de détournement de derniers publics, mais qui ayant remboursé intégralement les sommes détournées, n’a pas été l’objet de poursuites pénales, en application du numéro 68.066 du 4 mars 1968 sur la répression des détournements commis par les agents de l’Etat». En fait, ce comportement du président – que ses détracteurs, du moins les adeptes de selfs services des les biens de la Mauritanie, ne manquèrent de «rigueur maladive»- ne faisait pas que des heureux dans le pays. Pour cause, après ainsi vingt ans d’exercice du pouvoir politique basé sur cette gestion rigoureuse, l’armée retira sa «confiance» au père de l’Etat- nation mauritanien à l’aube de la journée du 10 juillet 1978. Et Moktar Ould Daddah, après avoir passé quelques années en prison, et les siens se sont retrouvés dans la triste condition des SDF (Sans domicile fixé) en France contrairement à ses paires du continent noir qui y détiennent d’importants biens immobiliers. Et il a fallu la générosité d’un certain El Hadj Omar Bongo pour que les Daddah puissent trouver un appartement décent pour y loger.

Une vie pas gargantuesque

La famille de Daddah n’a ni maison en France. Elle compte une seule villa modeste en Mauritanie. Une situation presque exceptionnelle en Afrique. Mais Moktar avait volontairement voulu servir de modèle de gestion rigoureuse pour nous autres Mauritaniens. Un modèle de gestion que certains de ses successeurs n’en ont pas du tout tenu compte. Pis, ils ont, d’ailleurs, encouragé la course vers l’enrichissement illicite : vol des derniers publics, surfacturation des dépenses publiques, appropriation de titre des biens mobiliers et immobiliers de l’Etat, … Ce qui fait qu’aujourd’hui les deux enfants du président Moktar Ould Daddah vivent en contrat de location bail. Quant à l’ainé des enfants de Moktar Ould Daddah, il a été récemment nommé ministre ambassadeur au ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale. Nonobstant cette nomination, il continue toujours de vivre dans la demeure familiale avec sa maman, Mariem Daddah. Celle-là même, qui aurait exigé si l’on en croit son époux que la famille présidentielle, ne doit vivre que par le salaire du président de la République. Et pourtant cette famille est parfois logée dans l’obscurité par les agents de la SOMELEC pour n’avoir ainsi pas payé la facture d’électricité. Comme en témoigne Baba Ould Ahmed Vall, le Secrétaire permanent de la Fondation Moktar Ould Daddah : «Maintes fois, les agents de la SOMELEC sont venus couper le courant dans la demeure des héritiers de Moktar Ould Daddah. En 2010, le courant a été coupé dans les locaux de la Fondation Moktar Ould Daddah, qui n’est qu’une œuvre caritative pour ainsi perpétuer les œuvres du père de l’indépendance de la Mauritanie, pour le non paiement de la facture de 12.000UM alors que la présidente Mariem Daddah était en mission culturelle à Atar avec les responsables de l’Alliance franco-mauritanienne». Et de raconter ses déboires personnels : «En tant que le secrétaire permanent de la fondation Moktar Ould Daddah, je rencontre beaucoup trop de difficultés dans l’exercice de mon travail. Pour organiser des manifestations de la Fondation dans les locaux de l’ancienne et de la nouvelle Maison des Jeunes, nous sommes obligés de mettre la main à la poche. Chose qui n’est pas normal à mon sens dans ce pays, surtout que nos manifestations culturelles et artistiques rentrent dans le cadre de la vulgarisation des œuvres du premier président de la République Islamique de Mauritanie». Heureusement que tout n’est pas noir pour cette famille, qui aurait pu rester en France et couler peut-être, des jours heureux : «La Fondation Moktar Ould Daddah a été invitée aux festivités de la célébration du cinquantenaire du Mali». Evidemment, Il faut noter que c’est par l’amour de la Mauritanie et par l’esprit du patriotisme que le président Moktar Ould Daddah est rentré avec les siens dans son pays avant de quitter ce bas-monde. Mieux après la disparition du président, ses enfants sont en Mauritanie. Deux tirent le diable par la queue comme leurs jeunes compatriotes diplômés. Comme quoi les enfants de Moktar n’ont pas seulement hérité que le patronyme de Daddah, mais ses qualités morales et humaines.

Camara Mamady

Source  :  Le Rénovateur le 08/09/2011

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