Nouvelles d’ailleurs : La diaspora expliquée aux Nuls, suite…

Après ma chronique de la semaine dernière sur la Diaspora et ses Diasporés, vous ne pouvez même pas imaginer les coups de pied au c… qui m’ont lustré l’arrière train !

 

 

A tel point qu’il me sera difficile de m’asseoir pendant quelques jours ; pour ne pas dire quelques semaines ; mais je pars du principe que le derrière d’une fille de Nouakchott étant résistant, alors mon cuir cicatrisera assez vite….
On m’a presque accusée de déclarer une guerre entre Diaspora et Locaux. Rien que ça ! Pffuittt…
Si on ne peut même plus asséner quelques vérités, où allons nous mes Z’Amis ?!
Alors, pour ne pas rester sur mon derrière en surchauffe et m’avouer vaincue (suis une Derwichette, non?) je vais en remettre une couche, que dis-je une couche, des louches entières. Je reprends donc : il y a comme une histoire de désamour entre diasporés et locaux. Une histoire d’incompréhension mutuelle ; une histoire de quasi compétition.
Comme si notre bled magique ne se résumait qu’à ceux qui y triment, qui y souffrent, qui y travaillent, qui y aiment, qui y meurent… La Mauritanie est vaste : elle se trouve à Boghé, Nouakchott, Timbédra, Diaguily…et à New York, à Paris, à Marseille, à Madrid, Bangui, etc….
Elle est ce réseau de milliers de vies qui transportent avec elles des bouts de leurs Histoires et de leurs imaginaires.
Elle est ce territoire de l’imaginaire et imaginé que cultivent avec, peut être, plus de soins, ses enfants vivant sous d’autres cieux.
Elle est cette natte que l’on fait et re défait à l’infini.
Bien sûr que les Nous Z’Autres qui vivons hors des limites physiques du pays ne vivons pas dans notre chair les duretés de la citoyenneté mauritanienne. Nous ne sommes pas là, jour après jour, en état de survie, à courir après de l’argent, de quoi manger, de quoi travailler, de quoi se soigner, de quoi éduquer nos enfants, de quoi nous habiller, de quoi mourir dignement.
Le Local vit tellement difficilement qu’il n’a plus l’envie de s’impliquer dans la vie de la Nation. Quand on court toute la journée pour sa survie, qu’est ce que l’on en a à f… des rodomontades des politiciens, des discours du Raïs, des questions de « dialogue ou pas dialogue ? », des peshmergas, des tourneurs de Tchaya, des palabres de tous ceux qui sont censés améliorer nos vies mais qui ont oublié, dans leurs joutes oratoires, qu’ils ont été élus par Nous ? Qu’est ce qu’ils en ont à f… de la TV qui ne diffuse que des niaiseries, en complet décalage avec l’évolution des mœurs ? Qu’est-ce qu’ils en ont à foutre que certains journalistes ne soient que des caisses de résonance des politiques et non pas des rapporteurs des réalités ? Qu’est ce qu’ils en ont à f… des contrats de pêche assassins ? Des barbus fanatisés qui ne rêvent que de chaos et de mort ? De nos fonctionnaires ? De notre système éducatif ? De la Mémoire sanglante de notre Histoire de moins en moins commune ? De la violence ? Du banditisme ? Etc…. Quand on lutte quotidiennement, on s’en bat les cacahuètes : trop épuisés pour cela.
Ceux de la Diaspora ne vivent pas mieux, quoiqu’en disent tous les fantasmes sur les émigrés.
Ces mauritaniens là vivent difficilement aussi. Le rêve d’émigration du départ s’est souvent transformé en cauchemar : boulots de m…, survie quotidienne, souvent dans des pays qui ne veulent plus d’eux et qui ont fait du racisme et du rejet un slogan politique et une campagne présidentielle.
Et quand les envies de retour se font lancinantes bien des obstacles sont là : les enfants nés dans ces pays autres et qui ne se sentent plus mauritaniens mais de telle ou telle banlieue, de telle ou telle cité. Alors les parents restent pour les enfants. Puis ils restent pour atteindre l’âge de la retraite et ne pas courir le risque de ne pas, dans leurs vieux jours, percevoir une juste retraite pour laquelle ils auront cotisé pendant 40 ans et plus.
Certains ont terminé leurs études et ont trouvé un travail à leur juste valeur.
Certains ont tenté le retour mais après des mois ou des années de chômage au bled, ils sont repartis vivre ailleurs, car pour vivre, il faut bien bouffer non ?
Alors, pour ne pas sombrer, ils économisent sou après sou, euro après euro ou dollar après dollar, franc CFA après franc CFA, pour construire la maison rêvée d’une future retraite tout aussi rêvée. Ils mettent des années à terminer ce rêve de retour : une fois, on construit un mur. L’année suivante, on installe 3 fenêtres, etc…
Toute l’année, ils économisent pour « envoyer l’argent au village » ou à la famille. Ils économisent pour payer les billets d’avion afin de partir revoir qui la maman, qui le village, qui les amis. Et ils les paient au prix fort ces billets : vu que leurs enfants ont pour la plupart acquis la nationalité du pays dans lequel ces diasporés vivent, ils se retrouvent à faire le pied de grue dans des ambassades qui réclament des visas pour ces enfants qui ne sont plus considérés comme mauritaniens. Alors, au prix des billets, s’ajoutent les quelques 60, 90 ou 100 euros de plus à payer par tête de pipe….
Quand ils veulent voter, ils prennent le train pour faire les centaines de kilomètres…
Quand ils partent, il leur faut encore penser à toute la famille qui croit que vivre en Occident fait de vous des magnats de la finance internationale ! Bénis soit Tatie et Barbès !
Ils n’ont jamais tout à fait quitté leur terre. Ils sont accrocs à tout ce qui se passe « là bas ». Plus accrocs que ceux qui y vivent, car c’est la dernière chose qui reste aux diasporés : le pays.
Et ils se battent comme des beaux diables.
On peut penser tout ce que l’on veut des Nous Z’Autres de la Diaspora : mais quand ont voit comment le mauritanien de l’extérieur s’implique en politique ou en mouvements, on ne peut qu’applaudir.
Quand on voit ces centaines de mauritaniens de la diaspora qui manifestent contre le recensement, on ne peut que regretter qu’il n’y ait pas plus de manifestations au pays !
Le mauritanien de la Diaspora n’a pas encore baissé les bras.
Il est parfois outrancier, injuste, de mauvaise foi. Mais c’est avec ça qu’il tente de construire un autre futur.
Le mauritanien de la Diaspora rêve pour tous. Et pour lui.
Alors n’allez pas dire à un membre de la diaspora qu’il est en décalage avec les réalités du pays. Il les vit d’une autre façon et pas directement.
Mais n’oubliez pas que s’il est parti, s’il a laissé derrière lui souvent femme et enfants, village, amis, familles, etc… pour aller s’entasser dans les cités occidentales, c’est qu’il vivait, lui aussi, toutes ces réalités locales et qu’un jour, il a décidé de se prendre à bras le corps.
Car la seule chose qu’il y a de vrai n’est-ce pas, c’est la survie et le combat.
Et à travers eux, le diasporé est partie prenante de toutes les implications et de tous les vouloirs…
Salut

Mariem mint DERWICH

Source  :  lecalame.info le 10/08/2011

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