L’ouverture d’un dialogue politique, une question d’actualité, ces derniers temps, n’est pas encore acquise. Il reste du chemin pour y arriver.
En effet, recevant les partis constituant la Majorité présidentielle pour les tenir informés de la « plate-forme » de l’opposition et de la réponse qu’il prépare, le président Mohamed Ould Abdel Aziz leur a aussi donné l’avant de goût de son appréciation : il rejette toute référence aux accords de Dakar, tout recours à une médiation internationale, et, enfin, toute structure paritaire.
Le président de la République, Ould Abdel Aziz, avait reçu le lundi 27 juin dernier, les partis membres de la Majorité pour leur entretenir de la « plate-forme » de la Coordination de l’opposition démocratique (COD), que lui avait remis le président de l’Alliance Populaire Progressiste (APP), Messaoud Ould Boulkheir. Il leur aurait fait savoir qu’il rejette trois points de cette « plate-forme », en leur informant aussi qu’une réponse est en préparation. Ce qui confirmerait que leur avis n’aurait pas été déterminant.
Comme nous l’écrivions dans notre numéro précédent, le dialogue pourrait buter sur la question des « accords de Dakar » comme cadre du dialogue entre les parties. En effet, les trois points, que le président Ould Abdel Aziz ne veut pas entériner, ne font qu’un, car figurant dans lesdits accords. Cependant, en lisant attentivement, la partie modalité pratique du dialogue, on se rend compte que l’opposition, en précisant qu’ « En aucun cas, il ne pourra s’agir d’un dialogue entre les représentant de la COD et des partis de la Majorité », crée le flou. Laisse-t-elle la porte ouverte à l’élargissement du cercle des parties au dialogue, au-delà des partis de la Majorité et de l’opposition ? Ou bien, veut-elle, d’un côté, le dialogue inclusif, et de l’autre, des « négociations » directes avec le président de la République ?
Opposition flouée
On l’a bien vu avec les accords de Dakar, l’arbitrage de la Communauté internationale n’a pas tenu ses promesses. Garante de ces accords, celle-ci s’est plutôt intéressée à l’aspect « élection présidentielle ». Une fois cette élection consommée, elle se désintéressa de la suite. L’opposition se sentira ainsi flouée. Pour ne rien arranger, le camp de Mohamed Ould Abdel Aziz s’était très vite délié de tous ses engagements de Dakar paraphés à Nouakchott, une fois qu’il ait atteint son objectif : rester au pouvoir.
Ainsi, on se demande qu’elle serait l’utilité d’un recourir à une médiation internationale, du moment que la précédente a largement failli à son devoir de contribution à la pacification de la scène politique de l’après présidentielle. La réticence de certains pans de l’opposition est, certes, légitime, mais à trop forcer sur le trait, ils risquent d’être tenus pour responsables de l’échec du dialogue. Ce qui mettrait le pouvoir dans le beau rôle. Ne serait-il pas mieux, pour eux, de proposer un arbitrage national composé de représentants d’institutions ou de personnalités indépendantes crédibles ?
« Confrontation politique »
La demande de création d’une structure paritaire de suivi de l’exécution du calendrier et des termes de l’accord-cadre, est rejetée, elle aussi, par le pouvoir. Mais, on s’interroge sur les garanties que pourraient donner un pouvoir partisan à l’opposition pour la mise en œuvre effective des termes d’éventuels accords-cadre. La désinvolture, avec laquelle le pouvoir s’est débarrassé des accords de Dakar, n’incite guère l’opposition à lui accorder encore sa confiance. Cette fois, l’enjeu, pour la COD, est de ne pas être roulée dans la farine, en allant au dialogue sous pression ou les yeux fermés.
D’où sa prompte réaction à l’annonce du rejet de certains points par le camp présidentiel. En effet, son président en exercice, Me Mahfoud Ould Bettah, patron de la CND, a indiqué qu’elle (la COD) « n’acceptera jamais d’entrer dans un dialogue de sourds avec le pouvoir, soulignant que si les autorités persistent dans leur repli sur elles-mêmes, elles doivent s’attendre à la seule alternative qui reste, à savoir la confrontation politique dont le régime cherche par tout les moyens à apaiser pour ne pas compromettre davantage son système exposé aux grondes et mécontentements, très nombreux ».
De Dakar à Nouakchott, le chemin du dialogue reste encore long. Des concessions, de part et d’autre, sont indispensables pour l’entame d’un dialogue qui ne soit basé sur le jeu de la montre, mais sur la forte volonté d’aboutir à du concret. Le pays a vraiment besoin d’une vraie démocratie, de la stabilité politique, de la paix sociale, et du développement économique. Et tout cela passe par la fin de cette lutte interminable d’égos que mènent les protagonistes de la scène politique.
THIAM Mamadou pour GPS
Source : GPS le 03/07/2011