FLAM, les hommes qui peuvent compter: Seydina Ousmane Diagana

Ceux qui ont côtoyé ce personnage haut en couleurs ne peuvent qu’être déroutés par plusieurs traits de caractère. Seydina Ousmane Diagana est un fonceur franc et spontané.

 

 

Au point parfois de faire preuve d’une certaine naïveté ou de maladresses. L’homme n’est pas avare. Quand il s’engage dans quelque chose ce n’est jamais à moitié (So o mo hene tane o mo hene). C’est que Ousmane Diagana est une véritable bête de somme, capable de travailler comme dix buffles. C’est sans doute ce trait de caractère qui explique le travail abattu et qui contribua de façon décisive à médiatiser la cause des FLAM et des négroafricains de Mauritanie. Alors que le mouvement était décimé à l’intérieur de la Mauritanie, c’est au Sénégal (voir Boubacar Diagana) et en Europe que la renaissance fut lancée. L’âge d’or du mouvement correspond à cette période où les équipes de Dakar et d’Europe prenaient le relais des prisonniers de Oualata.

C’est autour de Ousmane Diagana, Cheikh Oumar Ba (Poullori aimerait bien faire une note sur ce grand militant si le temps lui permet inchaallahou), Doudou Bal (chargé des affaires politiques et diplomatiques), El Khassoum Wane (chargé de l’information et de la communication), Tijane Wane, Amadou Touré… que se formera le noyau qui va relancer les FLAM en Europe et en Amérique en créant une section pour cette région (disons section et région pour faire simple). Ousmane Diagana en devint le premier secrétaire général, poste qu’il occupera sans discontinuer jusqu’en 1993 avant de passer le témoin à Oumar Moussa Ba.

Avec le reste de l’équipe, il sillonnait la France et l’Europe pour médiatiser la répression qui s’abattait sur les noirs de Mauritanie. C’est cette équipe et d’autres (Poullori demande pardon à ceux qui n’ont pas été cités) qui se chargea de la rédaction et de la large diffusion du Livre Blanc, radioscopie d’un apartheid oublié. Le groupe créa aussi le premier bulletin des FLAM, Bilal, remplacé plus tard par Le Flambeau (pour la petite histoire, le nom Bilal aurait été proposé par Mamadou Dem).

Les organes de presse furent littéralement envahis par ces jeunes étudiants qui n’avaient que leurs convictions comme armes de guerre. Peu de gens savent par exemple comment les regrettés Sennen Andriamirado et Jean-Pierre N’Diaye de Jeune Afrique devinrent ardents défenseurs du combat contre le racisme en Mauritanie. Le commando de choc formé par ce groupe n’y est pas pour rien. Ousmane Diagana passait alors sur les antennes des radios internationales (RFI, Radio Nederland…) pour dénoncer avec la passion qu’on lui connaît les crimes perpétrés par le régime dictatorial de Mauritanie.

Son plus haut fait d’armes eut lieu lors d’une session de la Commission des Droits de l’Homme à Genève en 1992. Avec l’entregent de Bâ Oumar Silèye notamment, les FLAM avaient réussi le tour de force de se faire accréditer (probablement en passant par des ONG locales). Ce jour-là, Ousmane Diagana qui avait réussi à se faire enregistrer pour prendre la parole commençait à peine à parler des déplacements de populations en 1989 que la délégation mauritanienne (avec notamment Sydney Sokhna) réussissait à lui faire couper le micro par le président de séance, un syrien. Le résultat, imprévisible, fut un désastre pour…la délégation officielle mauritanienne et du pain béni pour la délégation des FLAM composée de Ousmane Diagana, Ibrahima Abou Sall (Poullori présentera une note sur ce militant inébranlable), Mamadou Barry (Secrétaire Général FLAM Amérique du Nord). Les protestations élevées par les ambassadeurs, du Sénégal et de la France principalement, provoquèrent un véritable scandale qui fit une publicité inespérée pour les FLAM et la cause. La Télévision Suisse Romande et d’autres chaines européennes s’emparèrent de l’affaire. Le lendemain, le président de séance était obligé de présenter ses excuses à la délégation des FLAM. Le pari était réussi.

Cet activisme mis avec celui de Diallo Mamadou, Ciré Ba, Cherif Ba et Boubacar Diagana depuis Dakar a contribué de façon décisive à fausser les calculs du régime de Ould Taya qui tenait à réduire la question de la Cohabitation entre les communautés en Mauritanie à une simple lutte communautaire pour le pouvoir. De plus, la place occupée par Ousmane Diagana et Boubacar Diagana apportait une touche qui brisait le procès que la propagande officielle faisait aux FLAM en les présentant comme une organisation appartenant à une seule entité mauritanienne.

Ousmane estimait-il en avoir fait beaucoup ? Voulait-il s’effacer devant d’autres ? En cédant le secrétariat général à Oumar Moussa Ba en 1993, Ousmane Diagana quitte le devant de la scène pour redevenir un militant de base pendant de longues années avant de reprendre du service comme secrétaire aux relations extérieures de la section. Ces dernières années, Seydina Ousmane Diagana a été vu promenant sa silhouette de rugbyman dans les conférences dont il est un habitué. Ses prises de parole y sont souvent un moment fort pour le public et les conférenciers (même s’il lui arrive de se perdre dans de longues digressions); comme ce jour où il brandit un Coran en pleine conférence pour détruire une idée qui lui paraissait contrevenir aux prescriptions religieuses dont il est par ailleurs fin connaisseur.

Quand Ousmane prend fait et cause pour quelqu’un ou quelque cause, sa devise c’est «agissons d’abord, réfléchissons après». Ce qui peut le pousser parfois à agir dans la précipitation. Son pragmatisme et sa détermination font qu’il vaut mieux l’avoir avoir soi que contre soi. Sa loyauté lui joue souvent des tours : il fallait le voir défendre becs et ongles et sans réserve Ibrahima Moctar Sarr dans l’accusation de corruption qui lui fut portée il y a quelques temps ! Ousmane Diagana ne voulait à aucun moment envisager ne serait-ce que la possibilité de quelque chose qui pourrait ressembler de près ou de loin à ce qui était reproché à Sarr. Dans le même ordre d’idées, Ousmane Diagana a été entendu défendant mordicus la non condamnation du coup d’Etat contre Ould Cheikh Abdallahi alors que ceux qui connaissent le démocrate sincère qu’il est savaient bien qu’il devait en souffrir en son for intérieur. Il faut dire que Ousmane Diagana est membre du bureau national de l’AJD/MR et fut porte-parole du candidat Sarr à la dernière élection présidentielle en Mauritanie.

Ousmane est un homme entier qui ne mâche pas ses mots et s’exprime sans détours quand il a une chose à défendre, comme il le fit au congrès de Cincinnati avant de s’effondrer en larmes par la suite comme beaucoup d’autres après l’émouvante intervention de Me Diallo Mamoudou. Ousmane Diagana qui garde de solides amitiés et de bonnes relations avec ses anciens amis des FLAM serait d’un grand secours à la lutte contre le racisme et pour la bonne et juste cohabitation des nationalités en Mauritanie s’il y était associé dans le cadre d’un large front.

A suivre, si Poullori continue : Ibiraahiima Abu Sal

Poullori le 06/05/2011

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