Mauritanie : la police étouffe les manifestations des jeunes

En Mauritanie, la « Journée de Colère » qui avait été organisée le lundi 25 avril s’est terminée par de violents affrontements entre les manifestants et la police anti-émeutes, et par la mise en détention d’au moins 20 militants, parmi lesquels trois femmes.

 

 

 

Selon Rabii Ould Idoumou, l’un des leaders du Mouvement de la Jeunesse du 25 Février, ce sont des centaines de manifestants qui s’étaient rassemblés autour de l’avenue Gamal Abdel Nasser à Nouakchott, mais cette foule s’est faite disperser dans le courant de l’après-midi par les forces de l’ordre qui s’étaient munies de gaz lacrymogène. .

Les protestataires brandissaient des bannières, exigeant des réformes complètes, voire le départ du Gouvernement.

« Nous continuerons nos manifestations lors des prochains jours, jusqu’à ce que nos camarades détenus soient libérés, et jusqu’à ce qu’on réponde à nos demandes qui dorénavant dépassent la réforme, et des requêtes en faveur du changement de régime », affirme Ould Idoumoum , dont le groupe a organisé le rassemblement.

Et d’ajouter : « Les actes d’oppression ne nous dissuaderont pas de défiler et de faire connaître nos revendications ».

Hassan Ould Keihel, manifestant, diplômé d’un doctorat de philosophie et chômeur, constate que « ce rassemblemement peut être considéré comme essentiel » en comparaison aux autres qui s’étaient déroulés au cours des deux derniers mois.

« Nous demandons que le régime fasse le point sur les autres révolutions arabes en les prenant pour exemple, et qu’il prenne l’initiative de se retirer avant qu’il ne soit trop tard », dit-il.

Ce rassemblement a été pour certains l’occasion d’exprimer des doléances.

« J’ai été injustement saqué à l’armée à l’issue de plus de dix ans de services », raconte Abdullah Ould Ramadan à Magharebia. « Toutes les portes se sont fermées devant moi après que j’ai essayé de faire valoir mes droits légitimes. Et pour cette raison, je pense que participer à la manifestation, aux côtés de la Jeunesse du 25 février, c’est le seul moyen qu’il me reste pour exprimer mon point de vue ».

Il souligne que « la politique d’oppression pratiquée à l’encontre des manifestants s’est montrée encore incapable de conserver les dirigeants au pouvoir dans les autres pays arabes ».

Il ajoute que  »ignorer la volonté du peuple ne nous dissuadera pas de continuer à revendiquer des demandes qui sont légitimes ». « 

« La Mauritanie fait partie de ce monde arabe qui a été témoin de révolutions qui avaient pour requêtes le changement, et la réhabilitation des pays face à la corruption », dit Ahmed Ould Khalil.

Pour sa part, Moktar Ould Abdellahi, porte-parole du parti de l’Union pour la République, déclare qu’il considère » irréaliste de faire une projection entre ce qui arrive dans les autres pays arabes et la situation mauritanienne ».

Interrogé sur la position prise par son parti face aux évènements de lundi, il dit à Magharebia que la Mauritanie « est un Etat démocratique qui ne fait pas de prisonniers d’opinion, et qu’il existe des plateformes permettant d’exprimer les points de vue de manière pacifique, ce dont chacun devrait avoir conscience ».

Moustafa Ould Beder Eddine, vice-président du parti de l’Union des Forces du Progrès (UFP), fait savoir que le rassemblement du 25 avril a été « le plus important en son genre en nombre de participants, depuis le commencement de ces manifestations, au début de l’année ».

« En tant que parlementaires, nous étions présent pour montrer notre solidarité avec la jeunesse », explique-t-il à Magharebia. Le membre du Parlement condamnée par ailleurs « l’utilisation excessive de la force de la part de la police envers les manifestants de tous les âges, et de toutes les catégories sociales. »

« Nous avons organisé un sit-in face au siège de la police pour demander la libération de plus de 20 détenus, parmi lesquels des femmes », ajoute Ould Beder Eddine.

Mohamed Ould Ahmed, militant, maintient que « en l’absence de réformes urgentes, il n’y aura pas de stabilité dans le pays et les manifestations continueront ».

« Le peuple mauritanien devrait savoir où vont ses immenses ressources naturelles, les mêmes qui ont été pillées par le Gouvernement en place, » dit-il.

Pour sa part, l’analyste politique Mohamed Lamine Ould Mohamed Ahmed émet une mise en garde : « L’utilisation de la violence contre les manifestants par le Gouvernement va davantage enflammer la rue mauritanienne. »

Mohamed Yahya Ould Abdel Wedoud et Jemal Oumar

Source  :  Magharebia le 26/04/2011

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