Dialogue politique Pouvoir Opposition : Pourquoi la confiance ne règne pas entre les acteurs ?

« Chat échaudé craint l’eau froide » ! Chargé par le chef de l’Etat Mohamed Ould Abdel Aziz de conduire ce dialogue avec l’opposition, le premier ministre Moulaye Ould Mohamed Laghdaf ne parvient pas encore à s’entendre avec celle-ci.

 

 

Non seulement elle le récuse comme interface mais elle demande en plus, que l’Union Pour la République (UPR) soit dissoute. Sans doute sa réponse à cette offre de dialogue que souhaite enclencher le chef de l’Etat avec l’opposition en ces temps de fronde politique et sociale.

Pourquoi un tel désaveu à l’encontre de Moulaye Ould Mohamed Laghdaf ? Certainement que le pilotage de la courte transition de 2009 issues des accords de Dakar est passé par là. L’opposition a du mal à digérer qu’elle ait été roulée dans la farine par le premier ministre auquel elle ne pardonne pas d’avoir signé le décret fixant la date des élections présidentielles du 19 juillet 2009, alors que le conseil des ministres consacré à la question n’avait pas encore tranché. Si l’on en croît les déclarations de certains ministres de ce gouvernement de transition, les débats en conseil des ministres avaient suspendus par le président par intérim de l’époque, M. Bâ Mamadou dit MBaré, invitant les ministres à réfléchir dans la nuit pour qu’à la reprise le lendemain, ils puissent convenir d’une date, le temps étant compté. Or les ministres se réveillent pour entendre la Radio nationale informer décret consécutif à un accord sur la date du 18 juillet 2009 pour tenir les élections présidentielles. Une date que le tombeur de Sidi Ould Cheikh Abdellahi avait posé comme condition lors des négociations de Dakar entre les protagonistes de la crise pour qu’il mette un coup de frein aux élections présidentielles fixées unilatéralement au 6 juin 2009 et dont la campagne électorale avait démarré sur l’ensemble du territoire national. Les ministres de l’opposition au coup d’état du 6 août 2008 ont beau protesté, rien n’y fera, la date est fixé et un décret est publié sur les médias d’état. Depuis, le chef du gouvernement n’a pas de bons rapports avec l’opposition surtout que ces élections présidentielles ont été gagnées au premier tour par Mohamed Ould Abdel Aziz.
Outre ce reproche d’imposture faite à Moulaye Ould Mohamed Laghdaf, l’opposition ne rate pas une occasion pour l’accuser de tous les maux dont souffre la république. Une telle vision relève beaucoup plus de la surenchère politique, histoire de lui régler de vieux comptes. Il est vrai que tous ceux qui ont approché l’homme, qu’ils soient ministres, ambassadeurs, chefs d’entreprises ou autres, tous s’accordent à lui reconnaître certaines qualités. Toutefois, Moulaye Ould Mohamed Laghdaf a déçu apparemment l’opposition qui le qualifie de « piètre premier ministre ». A toutes les occasions, en privé ou en public, elle ne manque jamais de dresser un bilan négatif de son exercice sur tous les plans.

Il encaisse et continue…
Malgré qu’il peine à s’entendre avec l’opposition, le premier ministre, après avoir rencontré d’autres partis politiques dans le cadre de ce dialogue, il s’est déporté sur le front social en rencontrant plusieurs centrales syndicales dont les deux principales que sont la CGTM et la CLTM. Moulaye Ould Mohamed Laghdaf les a entretenu de la volonté du gouvernement d’aller de l’avant pour qu’un dialogue social soit amorcé entre les partenaires sociaux afin d’engager des négociations sérieuses autour des questions de travail, de l’emploi des jeunes, des revendications syndicales et du respect des procédures et des textes régissant le secteur en Mauritanie. Il faut dire que cette rencontre fait suite aux marches qui ont été organisées par les centrales syndicales en mars dernier à Nouakchott, Nouadhibou, Zouérate, Aleg et dans bien d’autres villes du pays, pour exiger un dialogue social en vue d’améliorer les conditions de vie des travailleurs.
Si le dialogue politique et social est en panne, c’est parce tout simplement
le pouvoir qui est en place est trop sûr de lui. Et cette attitude renvoie inévitablement au mode d’exercice du pouvoir qui, on le veuille ou non, est un mode solitaire, et à la limite narcissique. Quand un chef de l’État est convaincu qu’il a raison, le parti qui est le sien estime lui aussi que ce qu’il fait est très bien, et autour du pouvoir, il y a toute une classe qui s’est créée et qui tire profit du système. C’est la pire des erreurs que commet et continue de commettre le pouvoir en cherchant à louvoyer tout le temps sur l’amorce d’un dialogue franc et sincère. D’autant plus qu’à l’évidence, et nous l’avions plaidé en son temps, après les élections présidentielles de juillet 2009, l’ouverture d’un dialogue politique afin d’instaurer des discussions qui pourraient peut-être poser finalement les prémices d’une vie politique beaucoup plus apaisée. Ce qui n’est pas le cas jusqu’à présent encore. Au contraire la vie politique nationale est extrêmement tendue. Et il ne peut y avoir pire que ce genre de situation dans laquelle nous baignons. Il faut nécessairement ouvrir les vannes et instaurer un dialogue politique et social qui conduira par exemple à réviser le code électoral, la Céni etc. Car, un système politique, quel qu’il soit, a besoin de respirer.
 

Moussa Diop

Source  :  Le Quotidien de Nouakchott le 12/04/2011

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