Festival des villes anciennes: Kumbi Saleh et Aoudaghost oubliés

Le 8 mars journée internationale de la femme est l’occasion de dénoncer les privations de droits et les violences dont sont victimes les femmes mauritaniennes.
Mais en Mauritanie, la discrimination liée au genre vient loin derrière la discrimination liée à la race, la tribu, l’ethnie ou la caste.

 

Et les séquelles du racisme d’Etat sont tenaces car elles se manifestent tous les jours.

Les manifestations culturelles, quand elles concernent l’histoire de la Mauritanie et sont organisées par les pouvoirs publics, devraient accorder une place de choix à l’unité nationale pour résorber les fractures communautaires entre kwars, hratin et beydhan.

Pourtant, lors de sa 1ère édition, le Festival dit des villes anciennes de Mauritanie a retenu quatre ksour datant du XIIème siècle et inscrits au patrimoine mondial de l’Humanité: Ouadane et Chinguitti dans l’Adrar, Tichit dans le Tagant et Walata dans le Hodh El Chargui. Ils témoignent de l’important essor spirituel, culturel et économique du trab El Beidhan avec l’épopée des murabitun (arabo-berbères).

L’omission de Kumbi Saleh, la capitale de l’empire du Ghana fondée au IVe siècle par les soninké, est fâcheux car c’est la perte sèche d’une réelle opportunité d’exposer le fort métissage de la société mauritanienne et l’apport de la culture nègre dont l’antériorité n’est plus à démontrer. C’est elle qui a inspiré l’architecture et l’art décoratif de sa voisine Walata au VIIe siècle et contribué au rayonnement de Tichit.

Le Ghana, premier empire structuré de l’ouest africain, régentait aussi le Tekrur, l’ancêtre du Fouta, dont les descendants sont encore appelés tekarir par les maures (halpulaars).

Sa capitale a été exhumée des sables en 1939 par des archéologues français (Lazartigues, Mauny et Thomassey), et se situe à 65 km au sud de Timbedra, près de la frontière malienne.

Abu Ubeid El Bakri, le célèbre chroniqueur andalous écrivait «Le meilleur or du Ghana se trouve à Ghiarou, ville située à 18 journées de la capitale, dans un pays rempli de peuplades nègres et couvert de villages. Tous les morceaux d’or natif trouvés dans les mines de l’empire appartiennent au souverain mais il abandonne au public la poudre d’or, que tout le monde connaît. Sans cette précaution, l’or deviendrait si abondant qu’il n’aurait plus de valeur».

En 1076, les murabitun avec l’aide des tekarir conquièrent Kumbi Saleh mais l’occupation fut de courte durée car ils ne trouvèrent pas l’or. La ville fut détruite vers 1240 par le grand Sundjata Keita empereur du Mali.

On peut également regretter le passage à la trappe de la ville d’Aoudaghost fondée au Ve siècle par les berbères znagas, Ibn Hawkal la comparait à la Mecque.

Si on peut se féliciter de l’effort déployé par le Ministère du Tourisme dans sa campagne de promotion d’une Mauritanie plurielle à Paris effectuée début 2011, on espère voir le Ministère de la Culture lui emboîter le pas dès la seconde édition du Festival des villes anciennes en ajoutant dans son dépliant Aoudaghost la znagui et Kumbi Saleh la nègre.

Cela fait dix ans que l’Etat mauritanien en est toujours à la première étape sur les cinq que compte l’inscription d’Aoudaghost la znagi et Kumbi Saleh la soninké au patrimoine mondial de l’humanité. A titre de comparaison, l’inscription en 1996 des 4 ksours (Chinguitti, Ouadane, Tichit, Walata) a été bouclée en une année.

La prochaine publication de SOS DISCRIMINES sera relative à la TVM, la télévision qui divise le peuple en ignorant la majorité visible dans ses programmes et dans son staff : les noirs.

Nouakchott le 8 mars 2011

SOS DISCRIMINES

Source  :  Sos Discriminés via Avomm

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