Des militaires armés jusqu’aux dents, des policiers en état d’alerte et des agents en civil inspectant régulièrement tous les coins et recoins de l’Hôtel : salle de réception, bar-restaurant, toit… C’était la scène presque surréaliste perceptible vendredi dernier à l’Hôtel Laïco Amitié de Bamako.
A l’origine de ce branle-bas de combat, une pseudo-information relayée par la presse occidentale faisant de l’infrastructure hôtelière un centre de recrutements pour jeunes maliens en direction de la Libye… Une vraie fausse alerte qui, hélas, révèle toute la fébrilité, voire le début de panique des autorités maliennes.
L’information, disons la rumeur, a été ventilée dans la presse à travers, nous apprend-on, un article du correspondant de RFI à Bamako. Elle a été reprise par les agences de presse, chaînes de télévision et journaux français dont le Figaro qui précise ceci dans sa livraison du jeudi 3 mars derniers: « Au Mali, un petit bureau de recrutement discret a été installé dans un hôtel de Bamako appartenant à la Libye, où un diplomate libyen fait office d’agent recruteur, a constaté un journaliste de l’AFP. Mais le recrutement se fait également à partir des zones sahéliennes, selon les sources sécuritaires ». Il ressortait des autres traitements que les recruteurs payaient cash la somme de 1000 dollars (un peu plus de 500.000 F CFA) aux candidats pour un départ.
Il n’en fallait pas plus pour que les regards se tournent vers l’Hôtel Laïco Amitié qui, d’ailleurs a dès lors commencé de se vider de ses occupants occidentaux, ses principaux clients. Toute chose qui a incité l’administration hôtelière à vouloir organiser une conférence de presse, le vendredi 04 mars afin en vue de démentir la rumeur.
Des invitations furent, de ce pas, adressées à quelques organes de presse de la place. Et rendez-vous fut pris pour 17 H précises.
Sur place, après plusieurs minutes d’attente, alors que les représentants des médias étaient à l’attente, tomba la décision d’annulation du fameux point de presse.
Le Secrétaire Général du comité syndical de l’Hôtel informa en effet les journalistes de l’annulation pure et simple de la cérémonie. Et pour cause : le Ministre de tutelle, M N’diaye Bâh en déplacement au moment des faits, en a décidé ainsi, du moins jusqu’à son retour de voyage.
Il ressort en outre de certaines indiscrétions sur place que la presse d’Etat a reçu consigne ferme de s’abstenir de couvrir l’événement, à savoir, le point de presse. C’est avec des excuses plates que les organisateurs reconduisirent donc leurs invités.
Une vraie fausse rumeur
S’il existe véritablement un centre de recrutement de mercenaires maliens pour la Libye, ce n’est assurément pas l’Hôtel Laïco Amitié. Seule raison : l’endroit n’est point discret pour ce genre d’opérations.
« Un hôtel de Bamako appartenant à la Libye», c’est bien la mention à l’origine de la veillée d’armes des autorités maliennes. Si l’Hôtel en question a été en effet tacheté par le Guide Libyen, l’endroit ne sied en effet pas aux activités de ce genre qui se veulent discrètes de nature.
Aussi, dans un communiqué dont nous avions reçu copie, le comité syndical des travailleurs de l’Hôtel dément catégoriquement la rumeur (lire communiqué).
Le personnel de l’Hôtel tient à rappeler que ces rumeurs sont de nature à discréditer l’hôtel et à faire fuir la clientèle. Un raisonnement justement à l’origine de l’initiative de la conférence de presse reportée sine die.
La décision du syndicat de démentir au plus vite la rumeur s’avérait en effet la démarche la plus sensée. Mais pour des raisons que seul le gouvernement malien à détenir, cette option a été écartée. Evidemment, la seule absence du Ministre N’diaye Bâh ne saurait justifier son annulation. Il ne s’agit ni plus ni moins qu’une volonté des plus hautes autorités du pays.
Il faut dire que l’Etat malien mène en ce moment ce qu’il convient d’appeler la politique de l’autruche face au phénomène de la révolte dans le monde arabe. Une option dont l’efficacité reste à démontrer. C’est connu, le démon n’effraie pas le démon. Mais plutôt la lumière.
B.S. Diarra
Source : Le Combat via MaliWeb le 08/03/2011