Les familles venues identifier les leurs sont confrontées à des visions terribles…
Une jeune fille hurle, hystérique, le visage noyé de larmes. Elle vient d’identifier le corps mutilé de son frère à la morgue de l’hôpital de Benghazi, dans l’est de la Libye contrôlé par les opposants au régime de Mouammar Kadhafi.
« La plupart des familles n’ont toujours pas retrouvé leurs proches, explique le docteur Djamil Howedi, chef du département de radiologie. De temps en temps, nous les trouvons enterrés dans la rue. Ils ont brûlé ces hommes. Quand les habitants sont allés dans la (base militaire), ils ont découvert qu’ils avaient été ligotés et brûlés vifs parce qu’ils avaient refusé de se battre. »
Les habitants de Benghazi célèbrent leur libération, mais beaucoup comptent aussi leurs morts dans la répression violente qui a précédé. « Je suis le témoin de cet acte criminel depuis le premier jour. J’ai vu 13 cadavres, l’un avec une balle dans la nuque. Un autre avait une balle dans la colonne vertébrale. Beaucoup des blessés sont handicapés à vie, ils ont tous de 13 à 20 ans », poursuit Djamil Howedi. « Je sais par les chiffres de l’hôpital que 220 à 250 personnes sont mortes », ajoute-t-il. Aucun bilan définitif des victimes du soulèvement populaire contre le colonel Kadhafi n’a pu encore être établi.
Les familles venues identifier les leurs sont confrontées à des visions terribles. Une odeur âcre de désinfectant se mélange à celle des corps carbonisés dans les couloirs et les salles de l’établissement, rebaptisé l’« hôpital des martyrs ».
Dans l’une des salles de la morgue ont été déposées des housses mortuaires, à moitié ouvertes. Huit cadavres calcinés ont été exposés. Une foule observe la scène. Un médecin ouvre un grand tiroir métallique, découvrant le cadavre d’un jeune homme au torse mutilé. Certains proches explosent de colère, d’autres sanglotent. « Il faut voir ça. Il faut montrer cette cruauté au monde entier », déclare un homme.
Source : Reuters via L’Orient le Jour le 26/02/2011