Du centre de santé de Sebkha, à l’hôpital national de Nouakchott, un homme a pris dans ses bras, dans un taxi son bébé qui venait de naître. Le chauffeur de l’ambulance était absent. L’enfant, entre la vie et la mort pendant ce transfert chaotique…n’a pas pu être sauvé.
Le récit de Abdoul samba Diop est un douloureux concentré de ce qui se passe dans certaines structures de santé de la Mauritanie ; inconscience, arrogance, négligence….
Le Mardi premier février, à 7heures, j’amène mon épouse enceinte au centre de santé de Sebkha. A notre arrivée, on nous dit d’attendre la sage-femme. A 09 heures, elle arrive. Après avoir consulté ma femme, elle l’entraîne dans un grand salon rempli de courant d’air avec des vitrines cassées, des lits sans draps…
A 13 heures la sage-femme rentre chez-elle et laisse madame sous la surveillance d’une accoucheuse. J’interpelle un homme en blouse blanche pour lui demander le médecin chef. Il me répond qu’il ne vient que pour 30 minutes et repart et qu’on ne le revoit que le lendemain matin. A 21 heures, les cris de mon épouse se font entendre. Il faut encore appeler les infirmières ou les accoucheuses par téléphone. Toute notre attention fut troublée par les cris d’une handicapée mentale en travail. Elle a accouché sous nos yeux, devant la porte de la maternité.
Finalement, J ai pu, grâce a un infirmier, voir le Docteur chirurgien. Ce dernier consulte ma femme et lui fait une écographie pour voir la position du Bébé. Le chirurgien me fait entendre que si d’ici une heure elle n’accouche pas, il lui faudra une césarienne.
À 22 h 00, elle accouche d’un beau garçon qui respire à peine. A défaut de dispositif pour le ranimer, à défaut de médecin, l’accoucheuse me demande de prendre mon fils et de l’amener à l’hôpital national, à la pédiatrie pour qu’il soit sauvé. Le chauffeur de l’ambulance est introuvable. J’ai alors embarqué mon nouveau né entre la vie et la mort dans un taxi. Arrivée à la réanimation de l’Hôpital, le docteur SY demande pourquoi le bébé n’a pas été amené plutôt. Je lui fais comprendre que je suis venu en taxi du centre de Sebkha. Il me prescrit une ordonnance que je paie rapidement. Quelques minutes après, le bébé reçoit une injection. Mon bébé émet son premier cri. Le docteur me dit de retourner voir l’état de la maman. Le Bébé va rester sous couveuse. Je suis reparti. A mon arrivée, mon épouse me demande ou est son enfant. Toute la nuit, je n’ai pas pu fermer l’œil. Le lendemain, à 07h 30, je reviens à la pédiatrie. Je tombe sur un autre médecin du nom de Kane Seydou. Je lui demande l’état de mon bébé. Il m’éconduit sans ménagement en me disant ne pas être concerné par mon cas. A 10 h15, j’étais encore devant la pédiatrie. C’est à cet endroit qu’une infirmière me dit que mon bébé est décédé. Ce qui est bizarre « la carte d’identification de décédé » de mon enfant est signé et cacheté par docteur Kane ! L’infirmière me demande de passer à la caisse avant de prendre le corps de mon bébé. Après avoir payé la caution, je prends le petit corps inerte. Je le ramène à la maison pour que sa mère le regarde pour la dernière fois. Ensuite, je prends la route du cimetière
Abdoul Samba Diop
Source : Le Quotidien de Nouakchott le 13/02/2011