« Abraham est décédé ce matin dans une clinique de Marrakech à l’âge de 84 ans », a indiqué Christine Daure-Serfaty, son épouse. Abraham Serfaty souffrait « d’une maladie pulmonaire et avait des problèmes de mémoire », a précisé Mme Daure-Serfaty.
Ancien membre du Parti communiste marocain puis du groupuscule marxiste-léniniste Ila-al-Amam (« En avant »), Abraham Serfaty a passé près de dix-sept ans (de 1974 à 1991) en prison au Maroc. « Il sera enterré après-demain au cimetière juif de Casablanca, près de ses parents », selon son épouse, une enseignante française. En 1972, il avait été arrêté une première fois et avait accusé les autorités de l’avoir « sauvagement torturé ». Après plusieurs mois de clandestinité, Abraham Serfaty avait été condamné en octobre 1977 à la prison à perpétuité sous l’accusation de « complot contre la sûreté de l’Etat ».
Proche à l’époque des thèses indépendantistes du Front Polisario sur le Sahara occidental, il avait passé dix-sept ans en prison à Kénitra (nord de Rabat). Il fut libéré en 1991 par roi Hassan II, père de l’actuel roi, Mohammed VI, après une importance campagne internationale en sa faveur. Il fut aussitôt expulsé du Maroc vers la France, par le ministre de l’intérieur de l’époque, Driss Basri, au motif qu’il était un « ressortissant brésilien ».
En 2000, après l’intronisation du roi Mohammed VI, M. Serfaty avait été autorisé à rentrer au Maroc avec son passeport marocain restitué. Il s’était alors installé à Mohammédia (sud de Rabat) avec son épouse, Christine Daure, qui l’avait toujours soutenu.
Très fatigué ces derniers mois, Abraham Serfaty a vécu le reste de sa vie à Marrakech. Cet ingénieur, qui fut l’un des promoteurs de la politique minière du Maroc indépendant, blâmait aussi les partis politiques pour les lenteurs dans le processus démocratique.
Issu d’une famille de juifs tangérois chassés d’Espagne en 1492, Abraham Serfaty, restait un antisioniste convaincu. « J’irai d’abord en Palestine lorsqu’il y aura un Etat, puis je passerai voir des amis juifs qui se trouvent eu Israël », avait-il confié dans une interview en 2005. « Nous ne pouvons parler de l’expérience des groupes de gauche clandestins au Maroc sans évoquer cet opposant au régime du roi Hassan II », a déclaré le militant de gauche Mohamed Sebbar, de l’assocation marocaine Forum vérité et justice (FVJ).
Source: Le Monde.