Le 28 novembre 2010, la Mauritanie fêtera ses 50 ans de souveraineté. La célébration du cinquantenaire de l’indépendance nationale sera l’occasion de revisiter l’histoire par l’évocation de ceux et celles qui ont grandement contribué à la construction de la Nation. Au moment où s’approche cette échéance historique, on ne peut ne pas parler d’un homme qui a profondément marqué la Mauritanie et sa ville, Kaédi, de son emprunt indélébile, il s’agit de Youssouf Koïta Il y a 50 ans que la Mauritanie a accédé à la souveraineté internationale. La célébration de cette indépendance nous donne l’occasion de revisiter le passé. Partout, il sera question des hommes et de leurs faits qui ont marqué la marche de la Mauritanie.
Les témoignages, les déclarations seront à la Une de nos journaux, dans les documentaires et autres interviews que nos médias vont diffuser. La parole sera donnée à certains acteurs, objectifs témoins d’un passé. Ils relateront les moments qu’ils ont vécus. Mais hélas ! D’autres s’érigeront en témoins fictifs, ils tenteront à leur manière de décrire ce passé.
Beaucoup de témoignages vont édulcorer ce véritable moment qui doit être restitué avec fidélité, sans complaisante et sans esprit partisan.
Il est connu que la Mauritanie recèle de talents, d’honnêtes citoyens mais aussi d’hommes prêts à raconter leur histoire, leur vérité, leur perception croyant qu’elles sont celles de la Mauritanie.
Au moment où s’approche cette échéance historique, on ne peut ne pas parler d’un homme qui a profondément marqué la Mauritanie et sa ville, Kaédi, de son emprunt indélébile, il s’agit de Youssouf Koïta. Le 1er maire de Kaédi, était un homme ambitieux, visionnaire. Hélas, il nous a quitté très tôt à la fleur de l’âge, à un moment où la Mauritanie se construisait doucement, dans la sérénité, l’unité malgré quelques soubresauts de l’histoire et surtout dans la transparence.
Au mois de septembre 1971, par un hivernage pluvieux, la nouvelle est tombée comme un coup de massue. Le Président Youssouf Koïta est décédé en Espagne.
Ce cinquantenaire est une occasion pour lui rendre un vibrant hommage, plus que jamais sa place reste désespérément vide. Presque 40ans après la disparition du député maire de Kaédi, la ville se trouve aujourd’hui les pieds dans l’eau et pourtant il pleuvait beaucoup plus en avant. Mais la politique d’urbanisation qu’il avait initié avait sécurisé la ville. Des digues en terre battue ceinturaient DIMBE, autre nom de Kaédi.
Les attributions anarchiques de terrains étaient bannies. Après lui et surtout pendant les années de plomb que la vallée a connues, les walis véreux sans scrupule, cupides ont dénaturé la ville. Ils ont procédé à des distributions éhontées. Même le haut lieu historique qui se trouvait entre les deux plus vieux quartiers, Gattaga et Touldé, est cédé à coût de centaine de milliers d’Ouguiyas. Les places publiques ainsi que les routes sont distribuées. Au moment où notre pays célèbre ses 50 ans, Kaédi a reculé de 50ans. La perle du Foutah qui a connu depuis les années 50 l’eau et l’électricité est aujourd’hui une ville plongée dans l’obscurité une fois que le soleil a fini sa course quotidienne.
Visionnaire
Youssouf Koïta, visionnaire, avait déjà, dans les années 60, un plan de développement pour sa ville. La tannerie, et l’abattoir frigorifique qui font partie de ses œuvres sont présentement un amas de ferraille, un cimetière pour animaux.
L’école d’agriculture qui a formé tant de cadres du monde rural est aujourd’hui une coquille vide. La plaine de Wandama reste un projet mort né. Le projet d’embouche bovine n’a jamais vu le jour, la recherche et l’IFAC sont l’ombre d’eux même. Le PPG qui donnait par hectare 7 tonnes, est inexploité depuis plusieurs années à cause d’un travail bâclé.
Kaédi était une plaque tournante du pays, tous les Chefs d’Etats en visite en Mauritanie faisaient un tour dans la ville (Ahmed Ahidjo du Cameroun, Ahmed Sekou Touré de Guinée, Habib Bourguiba de Tunisie, Houari Boumediene d’Algérie, Kenneth Kaunda de Zambie, Yacoubou Gown de Nigeria, Léopold Sédar Senghor du Sénégal, Modibo Keïta du Mali et d’autres encore ont foulé le sol de Kaédi).
En visite dans cette ville bercée par le fleuve Sénégal au moment où le walo étendait à perte de vue ses pieds de mil qui tendaient vers la maturité, Ahidjo a eu cette réflexion. « La Mauritanie est certes un pays au grand désert mais peut s’auto suffire grâce aux terres arables de Kaédi et l’action de son paysannat dynamique et entreprenant.»
Et les hommes dans tout ça ? Ceux qui ont succédé à Youssouf Koïta sont d’une carence indescriptible ; ils ont fini malheureusement par semer la haine et la division entre Kaédiens, des kaedien qui ont toujours vécu ensemble dans l’harmonie, l’entente, la cordialité ou le mot partage avait un sens.
Jamais à Kaédi, le critère de l’ethnie n’a été évoqué, les politiciens en quête de notoriété, à la traîne et soumis au régime honni de Ould Taya, ont mis en avant de leur préoccupation la division. Conséquence Kaédi est meurtrie, Kaédi est déconfiture.
Mais l’action de Youssouf Koïta n’a pas été vaine, une nouvelle génération de Kaédiens s’apprête à reprendre le flambeau pour marcher sur les traces encore visible du député maire.
Ce cinquantenaire qui se profile à l’horizon et au même moment où Kaédi est malheureusement inondée, la cohésion, l’entente devraient être au centre de nos préoccupations.
DIAGANA ABDOUL SALAM
Source: Le Quotidien de Nouakchott