AQMI, « un mouvement franchisé d’Al Qaida », explique Alain RODIER :

Alain Rodier, ancien officier du renseignement, est aujourd’hui directeur de recherche au Centre français de recherches sur le renseignement (CF2R).  Il a bien voulu nous expliquer ce qu’est AQMI, responsable de la mort de Michel Germaneau.

 

Qu’est ce que l’AQMI ?

« Al Qaida au Maghreb islamique a succédé au Groupe Salafiste pour la prédication et le combat le 25 janvier 2007 en faisant officiellement allégeance à Oussama Ben Laden. Ce groupe insurrectionnel algérien est ainsi devenu un mouvement franchisé d’Al-Qaida. Son objectif déclaré était d’étendre le djihad à l’ensemble du Maghreb en intégrant d’autres groupes islamiques locaux. En fait, sa zone d’action s’est étendue surtout à l’ensemble du Sahel de la Mauritanie en passant par le Mali, le Niger, le Nigeria et le Tchad. AQMI a monté à la fin 2009 un site internet de propagande « l’Institut al Andalous ».

Que pensent-ils de la France ?

Si les islamistes extrémistes n’aiment généralement pas la France considérée comme un pays impie qui agresse les Croyants en Afghanistan et au Liban, les membres d’AQMI ont des raisons supplémentaires pour lui en vouloir. Le passé colonial reste dans tous les esprits. Le soutien, réel ou supposé, accordé par Paris au régime du président Bouteflika est considéré comme une véritable agression contre les « vrais musulmans algériens ». De plus les rumeurs de « maltraitance » des frères immigrés sur le territoire français courent le djebel en s’appuyant sur l’interdiction du port du voile à l’école et de la burqa dans les lieux publics, sur les actes de racisme survenant ici et là, etc. L’intervention de militaires français de ces derniers jours au Mali conforte l’idée que Paris est l’ennemi numéro un d’AQMI. En résumé, les activistes et les sympathisants d’AQMI haïssent la France.

Comment AQMI est-elle organisée ?

Le chef d’AQMI est Abdel Malek Droukdel, mais au début 2010, des rumeurs laissaient entendre qu’il avait été remplacé par Yazid M’barek alias Abou Youcef el-Annabi. Même s’il est très difficile de les compter, ce mouvement serait fort d’un petit millier d’activistes dont une petite partie serait des étrangers (Libyens, Mauritaniens, Nigériens et Maliens). Environ 400 seraient dans le Sahel, les autres dans des maquis au sud-est d’Alger. Des anciens combattants ayant servi en Irak et en Afghanistan serviraient également dans les rangs d’AQMI.

L’organisation est bâtie autour de cinq « régions militaires » dont la « neuvième » couvre le sud de l’Algérie et le Sahel. Cette appellation de « neuvième » est militaire, un peu comme nos numéros de régiments.

Qu’en est-il de cette « 9ème » ?

Elle est placée sous le commandement de Yahia Djouadi alias Yahia Abou Amar Etiarti dit l’« Emir du Sahara ». Un de ses hommes les plus fidèles est Abid Hammadou alias Abdelhamid Abou Zeid responsable de nombreux enlèvements et de la mort d’un otage britannique en 2009. C’est lui qui détenait Michel Germaneau. On note un vrai durcissement de la part de ce groupe.

Abou Zeid est à la tête de la katiba Tareq Ibn Ziyad ou El Fatihine. Parallèlement, il existerait au moins trois autres katibas dépendantes de la 9° région : la El Nasr Aflou, Talaia es-Salafia et la Mouhadjiroune. Pour des raisons de sécurité, ces katibas auraient été fractionnées en petites unités appelées « Seriyas ».

Quels sont les liens entre AQMI et le banditisme ?

Il semble que le mouvement djihadiste profite du trafic de la cocaïne, qui arrive d’Amérique du sud en Afrique noire et remonte vers l’Europe via le Sahara et le Sahel. AQMI se contenterait d’assurer la « protection » des différents trafics qui se déroulent au Sahel, c’est-à-dire qu’il rackette les contrebandiers.Par contre, l’ancien chef du GSPC au Sahel Moktar Belmoktar semble avoir quitté AQMI pour se livrer la contrebande, sa première activité. »

 Jean-Dominique Merchet

Source  :  http://secretdefense.blogs.liberation.fr/defense/ le 26/07/2010

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