Filles mineures domestiques en Mauritanie : L’AFCF et son partenaire s’attaquent au phénomène

«Aminata, a neuf ans. Elle est la quinzième fille d’une famille polygame de quinze enfants. D’un village reculé de la vallée du fleuve Sénégal, elle a été envoyée par sa mère à une de ses lointaines tantes résidant à Nouakchott. Comme toutes les filles placées, elle se réveille à six heures.

 

Pendant que les enfants de sa famille «adoptive » se préparent à aller à l’école, Aminata leur prépare à manger… » Des fillettes qui triment pendant que les autres sont en classe, il en existe des milliers en Mauritanie….

En 2009, l’association mauritanienne des femmes chef de famille (AFCF) en partenariat avec Terre des Hommes et la coopération espagnole (AECID) lance le projet « Assistance, protection et insertion des filles domestiques mineures.»
Le projet a mis en place 10 comités dans les neuf moughataa de Nouakchott. Des comités qui se composent des parents d’origine des filles domestiques, de leur famille d’accueil, des familles qui les emploient et des mairies. Les comités sont dirigés par des points focaux de l’AFCF et accompagnés par trois assistantes sociales et un avocat.
Il arrive souvent, comme dans le cas d’Aminata, cité plus haut, que la famille d’accueil soit celle qui emploie la fille. C’est la situation des filles placées qui sont inscrites dans un plan d’action future de l’AFCF.
Au profit des filles domestiques mineures, le projet a mis en place cinq classes d’alphabétisation dans cinq Moughataa de Nouakchott (80 filles suivent régulièrement des cours dans ces classe), neuf AGR (activités génératrice de revenus), distributions de denrées alimentaires au profit de huit familles.
Avant le lancement de ce projet, avec ses partenaires Terre des Homme et AECID, l’AFCF avait réalisé une étude sur l’ensemble des aspects du phénomène des filles domestiques mineurs dans sept régions de la Mauritanie (Nouakchott, Nouadhibou, Rosso, Kaédi, Néma, Aioun et Sélibabi). Le projet va s’étendre à toutes les villes couvertes par l’enquête.
Cette étude vise à préparer la stratégie de l’AFCF, la création d’un cadre institutionnelle et juridique pour la protection des filles mineures domestiques. « Ce que nous voulons, au-delà de la législation générale sur les mineures, c’est une réglementation spécifique aux filles domestiques mineures » dit Aminiteou Mint Moctar, présidente de l’AFCF.
L’AFCF et ses partenaires entendent apporter assistance juridique aux filles domestiques mineures au niveau de la justice, des hôpitaux pour aider les victimes de violences et maltraitances à être rétablies dans leurs droits.
Par l’alphabétisation, la formation professionnelle et les AGR, le projet suit les victimes pour qu’elles ne replongent dans la domesticité.
Du début du projet (aout 2009) à mais 2010, il a été recensé 900 filles domestiques mineures victimes. Victimes de « viols, de rasages de têtes, de menaces, de refus de paiement…
Pour chaque victime, il est établi une fiche d’écoute comportant sa photo, son témoignage, sa situation sociale, son quartier, sa région d’origine ou son pays d’origine.

Tabou, impunité…
L’enquête et le travail sur le terrain ont débouché sur plusieurs constats. La majorité des filles domestiques mineures vient de zones rurales reculées. Elles sont à la recherche de travail pour soutenir leurs parents pauvres. D’autres viennent de quartiers périphériques de Nouakchott. Elles sont issues de familles pauvres, de ménages séparés, polygames, elles sont orphelines ou filles de parents inaptes à travailler.
Une autre catégorie de filles domestiques mineures vient de pays estrangers (Sénégal, Gambie, Mali, Sierra Léone, Guinée…) Certaines d’entre elles sont amenées par des trafiquants de main d’œuvre et son doublement exploitées. Elles sont domestique le jour et placées dans des maisons clauses la nuit.
Il y a enfin des filles candidates à l’immigration clandestine. Elles sont aux mains de réseaux. L’argent qu’elles gagnent en travaillant comme domestiques et prostituées au bout de deux ans ou trois ans est remis aux passeurs. Elles tentent ensuite de prendre le chemin du Maroc ou de l’Espagne. Très souvent, elles sont escroquées.
La lutte contre le phénomène des filles domestiques mineures, selon la présidente de l’AFCF, est rendue difficile par l’impunité dont jouissent les coupables qui exploitent ces filles, le manque de concertation entre les autorités et les associations défenseurs des droits de l’Homme, le manque de communication et le tabou qui entoure ce phénomène.

Khalilou Diagana

Ordonnance n°2005-015 portant protection pénale de l’enfant

PARAGRAPHE DEUXIEME: DU HARCÈLEMENT SEXUEL
Article 25. – Le fait de harceler un enfant en usant d’ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle, par une personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions, est puni de deux mois à huit mois d’emprisonnement et de 100.000 à 140.000 ouguiyas d’amende.
Le harcèlement et ou l’exploitation sexuels d’un enfant en situation légale de travail domestique, en situation de placement ou confié à une famille est puni de quatre mois à deux ans d’emprisonnement et une amende de 200.000 ouguiyas à 300.000 ouguiyas.

SECTION II : DU TRAVAIL ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL DE L’ENFANT
Article 60.
– Le fait d’obtenir d’un enfant en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance, la fourniture de services non rétribués ou en échange d’une rétribution manifestement sans rapport avec l’importance du travail accompli, le fait de le soumettre à des conditions de travail ou d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine est puni de six mois à un an d’emprisonnement et de 200.000 à
400.000 d’ouguiya d’amende nonobstant les travaux effectués dans le cadre familial.

Article 61. – Les infractions définies à l’article 60 sont punies de un à trois ans d’emprisonnement et de 400.000 à 800.000 ouguiyas d’amende lorsqu’elles sont commises à l’égard de plusieurs enfants.

Article 62. – Le travail de l’enfant n’ayant pas encore atteint l’âge de la fin de la scolarité obligatoire est interdit.
Le travail, qui compromet la santé ou la scolarité de l’enfant, est puni de trois mois à un an d’emprisonnement et 120.000 à 200.000 ouguiyas d’amende.
Sont punis d’un emprisonnement de trois à six mois et d’une amende de 120.000 à 240.000 ouguiyas les personnes qui contreviennent aux dispositions légales relatives à l’âge minimum et aux pires formes de travail des enfants.

Source  :  www.quotidien-nouakchott.com  le 11/07/2010

 

 

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