Dans une interview accordée à Kassataya le dimanche 18/04/2010, Ahmed Ould DADDAH est longuement revenu sur sa place au sein de la Cooordination de l’Opposition Démocratique, ses rapports avec les autres partis membres de la COD, sur la situation du pays, sur la question de l’esclavage et des langues nationales, sur le terrorisme.
S’inscrivant sans états d’âme dans la logique d’une opposition à tous crins, le leader historique de l’opposition a assumé une opposition sans concessions au Président de la République, Mohamed ould Abdel Aziz, qu’il considère comme « chef de l’Etat et non Président….Aziz est président de facto et non de jure », car arrivé, selon lui, au pouvoir par la force et par le biais d’élections truquées.
« Le pouvoir confond confiture et architecture » :
Interrogé sur sa perception de l’actuel régime, fidèle à lui même Ahmed ould DADDAH n’a pas mâché ses mots : « Pouvoir défaillant », « Pays immobile », « absence de l’Etat sur tous les fronts », « Aziz fait de l’amateurisme et de l’improvisation », « depuis 8 mois pas 1 projet initié par le régime qui ait vu le jour »… rejettant sur le pouvoir la responsabilité de la situation économique, politique, sociale actuelle.
Dénonçant une une situation économique et sociale « très critique », Ahmed ould DADDAH a critiqué ce qu’il appelle une « situation bloquée » : absence de réserves céréalières, absence de projets sur le plan de l’alimentation, hausse des prix, difficultés de survie pour les populations, début de famine dans certaines régions de la Mauritanie, perte de repères des citoyens qui « sont abreuvés de déclarations » mais qui ne voient rien changer…
Sur la question de la lutte anti terroriste menée par le pouvoir, Ahmed ould DADDAH a rejetté le tout sécuritaire accusant le Président d’utiliser le terrorisme comme « faire valoir ». Selon le président du RFD la lutte contre le terrorisme doit passer, en premier lieu, par « l’application d’une justice qui soit la même pour tout le monde ». A la question sur des conseils éventuels au gouvernement sur cette question , Ahmed ould DADDAH a renvoyé les autorités actuelles à son programme.
Ahmed ould DADDAH et la COD : « l’opposition se porte bien » :
A la question de ses relations avec Messaoud ould Boulkheïr et les autres membres de la COD, Ahmed ould DADDAH a répété à plusieurs reprises que les relations étaient au beau fixe : « Nous sommes unis et nous mettons nos forces ensemble pour le futur de la Mauritanie, pour sortir le pays de l’impasse dans laquelle il se débat. Il n’y a pas de divergences fondamentales mais plutôt émulation entre nous ». Sur les déclarations des différents leaders de l’opposition lors du meeting de samedi dernier,Ahmed Ould DADDAH a rappelé que celles ci n’impliquaient que les partis qui les prononçaient, allusion à peine voilée aux déclarations guerrières de l’APP et sur la responsabilité personnelle de ceux qui ont harangué la foule. : « Nous avons des positions politiques. Nous sommes des partenaires ayant chacun son style… Au RFD nous n’organisons pas d’Intifada »
Interrogé sur ses rapports avec Messaoud ould BOULKHEÏR, Ahmed ould DADDAH, a affirmé, en évitant de s’étendre sur les déclarations peu tendres à son égard de Messaoud ould Boulkheïr, que le Président de l’APP est « un très grand leader de l’opposition » avec qui son parti travaille au sein de l’opposition.
Taclant l’actuel régime le Président du RFD est revenu sur le dialogue avec le pouvoir, accusant celui ci de surdité : « Nous n’avons pas demandé le partage du pouvoir. Nous croyons simplement que le dialogue est la solution de la sagesse », « Nous ne sommes pas des militaires qui ne changent les choses que par la force »….
La question linguistique : « La Mauritanie est un pays musulman, arabe et africain » :
Revenant sur les propos tenus par des membres du gouvernement et qu’il juge provocateurs et sur les réactions que ces propos ont suscitées, en particulier les manifestations violentes à l’Université de NKTT, Ahmed ould DADDAH a réaffirmé que la Mauritanie « est un pays musulman, arabe et africain », demandant que la place de l’arabe soit renforcée et poussée en avant et que les langues nationales puissent être officialisées, étudiées et utilisées.
« J’ai été très impressionné par l’attitude des étudiants du Sud qui, pendant les manifestations, n’ont pas rejetté l’arabe mais qui ont exprimé un malaise ».
Ahmed ould DADDAH a demandé que des Etats Généraux de l’Education soient tenus afin que
« les gens se mettent ensemble à discuter, à proposer, à sortir un schéma cohérent et rassembleur en mettant de côté un esprit d’exclusion » pour que la Mauritanie reste un « pays riche de sa diversité, de sa symbiose vis à vis des pays arabes frères et des pays africains frères ».
Questionné sur la déclaration d’allègeance de certains leaders politiques à Kaddaffi et sur l’absence de réaction du Président de la République , fidèle à lui même , Ahmed Ould DADDAH a taclé ould Abdel Aziz « Je ne suis pas dupe. Dans le régime actuel personne ne peut éternuer sans autorisation ».
Interrogé sur le pourquoi de cette visite en Libye et sur l’allégeance, Ahmed ould DADDAH a accusé le pouvoir actuel d’avoir une grande responsabilité dans le recul de la notion de l’Etat et de la chose publiques, dénonçant le voyage éclair du Président de la République du Tchad à la Libye.
« Je n’ai pas besoin de Père politique. Ma référence : la Mauritanie. Et ça me suffit »
L’esclavage :
« L’esclavage n’existe plus juridiquement. Il y a des séquelles qui sont extrêmement graves…. Il faut une politique cohérente socialement, politiquement, économiquement avec, par exemple, créations de micro projets ( agriculture, pêche, formation…)…La loi, dans notre pays, n’est pas appliquée et probablement celle là [mdrl : la loi criminalisant l’esclavage] encore moins que les autres ».
Fûts toxiques à la mine de Tasiast :
Sur l’affaire revélée par 2 députés du RFD et par des journalistes, le Président du RFD a demandé au gouvernement de mettre sur pied une commission parlementaire pour diligenter une enquête.
Ahmed ould DADDAH et la magistrature suprême :
Interrogé sur le pourquoi de ses échecs aux présidentielles Ahmed ould DADDAH a accusé le manque de transparences et d’honnêteté aux élections passées : « Il manque à tous ceux qui ne sont pas le pouvoir des élections honnêtes et transparentes. Si les élections avaient été transparentes Aziz ne serait pas président. Celui qui sera élu honnêtement et démocratiquement aura mon aide et mon soutien ».
Mariem mint DERWICH
Résumé de l’interview mené par Abdoulaye DIAGANA et Mariem mint DERWICH le 18/04/2010
Rediffusion Lundi 19/04/2010 à :
– 18H 00 heure française, 16 H 00 Tu
– 21 H 00 heure française, 19 H 00 TU