Le coup de force qui a déboulonné Mahamadou Tanja est certainement une autre leçon à l’endroit de tous les dictateurs africains. Ils sont légion ces dirigeants africains qui peinent à comprendre que la nouvelle dynamique de démocratisation ne permet plus que les textes soient torpillés en toute impunité.
Après, les premières expériences du multipartisme ayant vu les premières élections des années 90 manipulées et fraudées en faveur des tyrans convertis en présidents élus, il ya eu un travail sérieux sur les contenus de la démocratisation ; inauguré notamment par les limitations de mandats présidentiels (Bénin, Mali, Ghana, etc.). Très peu de chefs d’Etat ont compris et respecté cette nouvelle donne. Mais beaucoup d’autres ont cédé à la tentation au détriment d’un certain réalisme. Mahamadou Tanja est de ces chefs d’Etat qui n’ont pas su sortir la tête haute de cette comédie du pouvoir où on fait miroiter au dictateur qu’il est indispensable à son pays. En voulant prolonger sa présence à la tête de son pays contre vents et marées, le voilà humilié par un coup d’Etat que la communauté internationale s’amusera, encore une fois, à condamner, comme elle le fait avec tous les autres, avant d’en bénir les auteurs.
C’est connu : retour à l’ordre constitutionnel, respect des libertés, etc. La chanson est la même ; et après ce sont les ballets diplomatiques très couteux ; à l’UA surtout. Et puis, ce sont toujours les peuples qui finiront par payer les pots cassés de ces instabilités politiques des pays africains. Car du côté des anciens colonisateurs ce qui compte (el wa’er, diraient les hassanophones), c’est la vie de leurs ressortissants et la sauvegarde de leurs intérêt. Ça, nos dictateurs qui nous ont habitué à des séries de coup d’Etat sous prétexte de rectification, de changements, et d’amélioration de nos conditions de vie, ne le saisissent pas ou refusent de le comprendre ; tellement ils nous donnent l’impression de vouloir rester alliés aux puissances au grand dam de leurs peuples.
S’accrocher au pouvoir, même après avoir dépassé l’âge d’être président, il n’y a qu’en Afrique (et dans le monde arabe) que cela se voit.
Mandela avait donné le bon exemple en se contentant d’un seul mandat présidentiel. Abdoulaye Wade souhaite, lui, rempiler en 2012. Il est né en 1926.
Nous, ici en Mauritanie, avons fixé l’âge limite de candidature à une élection présidentielle à 75 ans. Depuis le début du 21e siècle nous avons commis deux coups d’Etat militaires. L’un pour apporter le « changement », l’autre pour ajouter la « rectification »… Et le siècle n’a que dix ans. La Mauritanie, comme république, va en avoir cinquante dans 9 mois. Et du chemin à faire encore.
Kissima
La Tribune N°489 du 22 février 2010