Le président mauritanien semble amorcer jusqu’ici un équilibre diplomatique entre le monde arabe et le monde africain mais au plan de sa politique intérieure il a choisi la politique d’autruche pour l’unite nationale et la cohésion sociale.
Un constat des observateurs 6 mois après l’élection de Ould Ghazouani à la tête de la Mauritanie. C’est un président qui porte sur ses épaules un lourd héritage d’un régime autoritaire qui a conduit le pays à une impasse politique et économique. Pour parer au plus presse Ould Ghazouani s’est doté d’un programme ambitieux qui demande des investissements pour assainir les finances publiques à cause d’une dette publique abyssale qui dépasse les 100 pour cent du PIB. Et un courage politique pour l’unite nationale et la cohésion sociale. C’est vers ses deux alliés arabes les Émirats arabes unis, l’Arabie Saoudite et son partenaire l’Union européenne qu’il va se tourner.
L’aide de 2 milliards de dollars d’Abu Dabi est une véritable bouffée d’oxygène et une aubaine pour le gouvernement pour conduire à bien les reformes. Une diplomatie arabe agissante et un partenariat fort avec l’UE qui d2bloque 24 millions d’euros pour appuyer le secteur de la santé en pleine restructuration. Son ouverture avec l’Afrique s’est traduite d’abord par une politique de bon voisinage avec notamment le Sénégal avec qui il partage l’accord gazier le plus important depuis les indépendances. Les premiers mètres cubes sont attendus en 2022. Et c’est le Sénégal également ou il effectua sa première sortie après son élection pour participer au forum de Dakar sur la sécurité en Afrique. Puis à Ouagadougou pour le sommet d’urgence du G5 Sahel et le sommet de la CEDEAO dont la Mauritanie n’est pas membre mais s’apprête a signer un accord de libre échange.
La Mauritanie retrouve ainsi toute sa vocation géo-politique de trait d’union entre le monde arabe et le monde africain mais cet équilibre diplomatique ne va pas sans une politique intérieure juste et égalitaire sans la paix sociale qui passe par un mieux vivre entre les différentes composantes nationales. C’est le point noir de ce début de quinquennat. Ould Ghazouani s’est enfermé dans ses reformes malgré une timide normalisation avec l’opposition qui réclame à cor et à cri le dialogue inclusif dans un contexte trouble ou le pouvoir poursuit des arrestations arbitraires de militantes des droits de l’homme sur fond de l’instrumentalisation de la justice et de la religion à des fins politiques avec un procès en perspective de 10 activistes associatifs accusés d’atteinte à la religion et de prosélytisme chrétien.
Un retour à l’autoritarisme dans sa forme la plus brutale qui cache un État raciste et esclavagiste pareil au régime précédent avec les nominations dans les hautes sphères de l’armée de la police de la sûreté de l’Etat dans la haute administration qui obéissent au seul critère tribal et clientéliste excluant les Haratines et les négro-africains.
L’actualité vient de confirmer un flop gouvernemental avec la menace du ministre de l’intérieur contre les auteurs de publication de discours haineux sur les réseaux sociaux. Ce n’est pas pour apaiser le climat politique tendu par la sortie médiatique du président de l’IRA à Genève lauréat du prix du courage qui qualifiait le système mauritanien d’apartheid. Une politique intérieure qui n’en finit pas de diviser les mauritaniens aggravant la fracture sociale et nationale. Ould Ghazouani donne ainsi l’image d’un président sourd au problème de la cohabitation depuis déjà des décennies écornée par les différents locataires du palais de Nouakchott. Peut être c’est trop demander à des chefs de l’exécutif habitues à jouer la politique du pire.
Cherif Kane
Coordinateur journaliste
(Reçu à Kassataya 03 mars 2020)
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