Pour la première depuis le déclenchement de son bras de fer avec le pouvoir mauritanien, l’homme d’affaires s’adresse directement à ses clients et à l’opinion publique. S’estimant victime de harcèlement, M. Ould Bouamatou dénonce « une entreprise, menée par Monsieur le Gouverneur de la Banque Centrale de Mauritanie (BCM)… pour détruire la Générale de Banque de Mauritanie (GBM) ». Le PDG du groupe BSA trouve le procédé d’autant plus injuste que « ceux qui ont détourné des milliards d’ouguiyas à la Banque Centrale et ceux qui, contrairement à la GBM, n’ont pas libéré le capital de leur banque ni d’ailleurs procédé réellement aux augmentations de capital exigées par les nouvelles lois, se pavanent dans ses couloirs ».
Le communiqué révèle par ailleurs que les comptes courants de la GBM à la Banque Centrale, créditeurs de 18 milliards 123 millions d’ouguiyas, ont été « virtuellement séquestrés » par la BCM. On y découvre que pour les comptes en devises, cette mesure est effective depuis le mois d’août 2012.
M. Ould Boumatou a donc choisi d’anticiper d’éventuels développements qui pourraient le prendre de court. Aussi, a-t-il décidé de restituer leurs dépôts à ses clients (ONG, Organisations Internationales, Missions Diplomatiques, FMI, Banque Mondiale ainsi qu’à leurs représentants, de même qu’aux entreprises commerciales). Pour les engagements de moins de 10millions d’UM, le banquier renvoie à son conseil Me Yezid Ould El Yezid ; les déposants de la catégorie supérieure devant s’adresser directement à la BCM. S’agissant enfin des débiteurs et de ceux ayant bénéficié de facilités de trésorerie, le banquier les invite à effectuer leurs versements sur le compte de la GBM à la BCM dont le numéro est 3001290.
Dans le même temps, l’homme d’affaires, visiblement très affecté par la crise qu’il traverse, décide « de mettre à l’abri toutes les données informatiques de la GBM pour empêcher la poursuite de cette œuvre de destruction orchestrée par Monsieur le Gouverneur de la Banque Centrale. » Mais il est peu probable que cette décision soit exécutée : la banque a été mise sous scellé le jour même.
M. Mohamed Ould Bouamatou était réputé proche du général Mohamed Ould Abdel Aziz dont il fut le principal soutien après son putsch militaire d’aout 2008 contre le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, seul président mauritanien civil démocratiquement élu depuis l’accession du pays à l’indépendance. Le banquier avait alors mis ses moyens, ses réseaux et son entregent au service de son cousin militaire. L’idylle avait commencé à battre de l’aile peu de temps après l’élection de M.Ould Abdel Aziz au terme de la profonde crise politique consécutive à son coup d’Etat. L’homme d’affaires M. Ould Bouamatou s’était depuis exilé au Maroc d’où il dirige son puissant empire. La crise entre les deux anciens complices a pris une nouvelle tournure avec le redressement fiscal dont fut l’objet le groupe BSA à la fin du mois de janvier 2013.
Dans le communiqué au ton guerrier qu’il publie ce dimanche, M. Ould Bouamatou se dit « déterminé à ce que le droit, le courage et l’abnégation prévalent sur la lâcheté et la cupidité.» Le banquier conclut son communiqué par un avertissement à peine voilé : « Pour qui en douterait, je suis tenace et je ne renonce jamais. Ceci est une déclaration de résistance. » Entre le président Ould Abdel Aziz et son cousin le banquier Ould Bouamatou, la guerre est désormais vraiment ouverte.
Laura CARUELLE pour KASSATAYA
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