Mauritanie – Édito– Le sursaut nécessaire contre les vieux démons sociétaux !

La DépêcheA-t-on vraiment entendu le président ? En déclarant à N’Beikit Lahouach qu’« aucune tolérance ne sera désormais accordée à l’instrumentalisation tribale ou régionale », Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani n’a pas seulement lancé un avertissement : il a posé un acte politique fort.

Dans un pays où les appartenances communautaires continuent trop souvent de supplanter le sentiment national, ce message sonne comme un rappel à l’ordre – et comme un test pour la citoyenneté dans la République.

Depuis trop longtemps, le tribalisme, le régionalisme et les solidarités communautaristes parasitent la vie publique. Ils s’infiltrent dans les nominations, donnent de l’eau au moulin des séparatistes, alimentent les querelles bizantines.

En lançant ce discours politique dans une région phare et en rappelant que les fonctionnaires et agents publics n’ont pas à s’en faire les relais, le chef de l’État a visé le cœur du problème : faire la part entre loyauté institutionnelle et loyauté communautaire. Cette confusion mine la confiance dans l’État et alimente un immobilisme social qui empêche l’émergence d’un véritable citoyen mauritanien, libre et conscient de ses droits.

Mais la parole présidentielle, aussi claire soit-elle, ne suffira pas. L’histoire récente l’a montré : les appels à l’unité nationale restent lettre morte si les élites – politiques, administratives, religieuses ou sociales – continuent de jouer le double jeu. Si les problèmes profonds ne sont pas réglés et la justice sociale instaurée.

L’heure est donc venue pour un sursaut collectif. La responsabilité des élites, comme l’a souligné le président, est immense : elles doivent être les premières à rompre avec les pratiques qu’elles dénoncent en public et entretiennent en privé.

Le ton ferme adopté par le président Ghazouani marque peut-être un tournant, si des exemples sont donnés. Sa promesse d’en finir avec les hiérarchies tribales et les réflexes d’exclusion s’inscrit dans une vision d’un État moderne, fondé sur l’égalité et la citoyenneté. Encore faut-il que cette vision s’enracine dans les faits. Le déplacement du chef de l’État dans le Dhar, centré sur le développement local et les projets concrets, montre que la cohésion nationale passe aussi par la justice territoriale : aucun citoyen ne doit se sentir oublié.

Oui, l’unité nationale n’est pas un slogan. C’est une construction patiente, exigeante, qui suppose de dépasser les réflexes du passé pour bâtir un avenir commun. Le président a sonné la fin de la complaisance : reste à savoir si la société, dans toutes ses composantes, saura répondre à cet appel ou s’il aura, tout simplement, prêcher dans un désert.

 

 

Jedna DEIDA

 

 

 

Source : La Dépêche – (Mauritanie) – Le 10 novembre 2025

 

 

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