Madagascar : Cl Randrianirina, l’officier qui a pris le pouvoir

Agence de Presse Africaine  – Ancien gouverneur et ex-détenu formé à Antsirabe, le colonel Michaël Randrianirina, figure populaire du CAPSAT, a finalement pris la tête du pays après l’exfiltration du président Rajoelina.

Formé à l’Académie militaire d’Antsirabe, ancien gouverneur, ex-détenu et désormais homme fort de Madagascar,  le colonel Mikaël Randrianirina incarne la figure d’un militaire qui a d’abord refusé tout rôle politique avant de saisir finalement les rênes du pouvoir, après l’exfiltration du président Andry Rajoelina par la France.

Originaire d’Androy, dans le sud du pays, cet officier du Corps d’armée des personnels et des services administratifs et techniques (CAPSAT) présente un parcours atypique. Condamné et brièvement détenu en 2024, il a repris son statut d’officier actif après sa sortie de l’hôpital militaire de Soavinandriana, pour réapparaître sur la scène publique durant les récentes mobilisations du mouvement citoyen « Gen Z ».

C’est lors de ces manifestations antigouvernementales qu’il s’est fait connaître du grand public en appelant publiquement les forces de sécurité à ne pas tirer sur les manifestants, un geste qui lui a valu une certaine popularité auprès de la population mobilisée. L’officier affirme toutefois ne pas entretenir de contacts avec les acteurs politiques ou les mouvements de jeunesse.

Un refus initial de tout rôle politique

Dans un premier temps, le colonel Randrianirina s’est défendu de jouer un rôle dans la crise institutionnelle. Lors d’un entretien accordé à Jeune Afrique et RFI, il affirmait : « Je ne détiens pas le pouvoir. Le contrôle de l’armée, non, je ne le détiens pas. C’est le chef d’état-major général (CEMGA) qui a le contrôle de l’armée ». Se présentant comme un simple « officier exécutant », il rejetait les accusations de coup d’État formulées par le président Rajoelina : « Je ne pense pas qu’il y ait eu un coup d’État. L’armée a simplement montré qu’elle existe encore et a répondu à l’appel du peuple malagasy ».

Cette posture de retrait contrastait avec sa présence visible lors des mobilisations et son appel aux forces de sécurité, mais le colonel maintenait fermement qu’il n’était qu’un acteur secondaire. « Pour l’instant, je suis un simple officier. Dieu seul sait la suite », déclarait-il alors.

La prise de pouvoir après l’exfiltration de Rajoelina

Les événements se sont accélérés le 14 octobre lorsque l’Assemblée nationale a voté une motion d’empêchement contre le président Rajoelina avec 130 voix pour et une abstention sur 131 députés présents. Cette motion intervenait après une tentative de dissolution de l’institution par décret présidentiel, jugé « dépourvu de valeur juridique » par le vice-président de l’Assemblée, Siteny Randrianasoloniaiko.

Le président Rajoelina a alors quitté le territoire pour des raisons de sécurité, exfiltré par la France, bien qu’il affirme ne pas avoir démissionné et se déclare toujours en poste.

C’est dans ce contexte que le colonel Randrianirina a finalement décidé d’assumer un rôle de premier plan. Le 15 octobre, il a annoncé au Palais présidentiel la prise de contrôle par l’armée : « On est ici pour prendre le pouvoir parce que ça a assez duré quand même, la crise, et on va prendre nos responsabilités », a-t-il déclaré, proclamant la création d’un Conseil de défense nationale de transition (CDNT), composé de cinq officiers supérieurs issus de l’armée, de la gendarmerie et de la police nationale.

Une légitimité validée par la Haute Cour

Dans la soirée du même jour, la Haute Cour constitutionnelle a formalisé cette prise de pouvoir en constatant la vacance des postes de Président de la République et de Président du Sénat. Elle a « invité le colonel Randrianirina à exercer les fonctions de chef de l’État par intérim », sous son contrôle, transformant ainsi le coup de force militaire en transition constitutionnelle.

Cette validation juridique intervient après la saisine du vice-président de l’Assemblée nationale dénonçant les violations répétées de la Constitution par le président Rajoelina.

Une transition encadrée

Le colonel Randrianirina a annoncé qu’un gouvernement civil sera mis en place « après quelques jours » pour gérer les affaires courantes de l’État, précisant que la transition « concerne exclusivement la fonction présidentielle ».
L’Assemblée nationale demeure en fonction, mais plusieurs institutions ont été suspendues, dont le Sénat, la Commission électorale (CENI), la Haute Cour de justice et le HCDDED.

La Haute Cour constitutionnelle a fixé la durée maximale de la transition à deux ans, avec obligation d’organiser des élections présidentielles dans un délai de 30 à 60 jours. Les nouvelles autorités affirment vouloir « rétablir la stabilité », préparer un « retour à la légalité républicaine » et organiser un référement constitutionnel ainsi que des élections générales.

Réactions internationales et position de Rajoelina

L’Union africaine et la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) appellent au respect de l’ordre constitutionnel et à un retour rapide à la légalité républicaine, dans un contexte où le président Rajoelina, bien qu’exfiltré, n’a pas démissionné et se déclare toujours en fonction.

Le colonel Randrianirina, qui reconnaît que la situation actuelle peut être qualifiée de « chaos » tout en en attribuant la responsabilité « aux dirigeants », est ainsi passé du statut d’observateur à celui d’acteur principal d’une transition dont l’issue reste incertaine.

Source : Agence de Presse Africaine (APA)

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