Les Africains qui ont marqué 2024 : Emerse Faé, Imane Khelif, Tyla, Halidou Tinto…

Au cours de l’année 2024, ils ont fait la une de l’actualité africaine et incarné une forme d’excellence. Artistes, chercheurs, entrepreneurs… chacun d’eux a remporté des succès et méritait, selon les journalistes du « Monde Afrique », d’être mis en lumière.

Le Monde  – Certains ont remporté des trophées sportifs, d’autres ont été remarqués pour la qualité de leur œuvre artistique, leur contribution à la médecine ou leurs idées innovantes. Retour en quinze noms sur ceux qui ont fait l’année 2024 en Afrique.

Chidimma Adetshina, mannequin sud-africano-nigériane

L’année 2024 avait très mal commencé pour Chidimma Adetshina. Cette mannequin, candidate à l’élection de Miss Afrique du Sud, a dû renoncer à la finale du concours de beauté, en août, après avoir été la cible d’une campagne d’attaques xénophobes. Cette étudiante en droit de 23 ans, née à Soweto d’une mère sud-africaine d’origine mozambicaine et d’un père nigérian, avait été attaquée sur ses origines et fait l’objet d’une enquête sur sa citoyenneté diligentée par le ministère de l’intérieur sud-africain.

Mais trois semaines plus tard, le 31 août, elle est couronnée au Nigeria dans un concours concurrent de celui de Miss Monde, Miss Univers. Elle a été invitée à y participer en vertu de sa deuxième nationalité, nigériane, qu’elle a héritée de son père. Ultime revanche : le 18 novembre, elle termine première dauphine du concours Miss Univers 2024, remporté par la Danoise Victoria Kjaer Theilvig. Elle y décroche aussi le titre Miss Univers Afrique et Océanie. La reine de beauté a depuis décidé de quitter l’Afrique du Sud pour s’installer au Nigeria.

Aliko Dangote, entrepreneur nigérian

Il n’est guère besoin de présenter encore Aliko Dangote, l’homme le plus riche d’Afrique. Mais le magnat nigérian, qui a bâti son empire sur le ciment, a pris un tournant majeur en 2024 avec l’entrée en service de sa mégaraffinerie construite en périphérie de Lagos, la capitale économique du Nigeria. Le milliardaire devient ainsi une figure-clé de ce secteur pétrolier qui a enrichi tant de Nigérians, mais dont lui-même s’était tenu à l’écart pendant des années.

Ce projet colossal à 20 milliards de dollars, un « monstre », selon ses propres mots, a connu un démarrage chaotique : approvisionnements en brut insuffisants, manque d’acheteurs, tensions avec les autorités… Il promet cependant de résoudre le grand paradoxe du Nigeria, contraint jusqu’ici d’importer l’essentiel de son carburant faute de raffiner lui-même les centaines de milliers de barils extraits chaque jour de son sous-sol.

Kamel Daoud, écrivain franco-algérien

Avec un roman qui plonge dans les plaies de l’histoire de son pays, Kamel Daoud est devenu le 4 novembre le premier Algérien à recevoir la plus prestigieuse récompense littéraire française, le prix Goncourt. A 54 ans, l’ancien journaliste au Quotidien d’Oran et chroniqueur au Point campe Houris (Gallimard, 416 pages, 23 euros) dans la « décennie noire » et emmène son lecteur dans les horreurs de la guerre civile qui, entre 1991 et 2002, a fait entre 60 000 et 200 000 morts selon les bilans.

Assuré de bien se vendre en France grâce à sa récompense, le roman ne peut être acheté en Algérie, car avec l’évocation de ce pan d’histoire, il viole l’interdiction de parler des « blessures de la tragédie nationale », d’après la « charte pour la paix et la réconciliation » adoptée par référendum en 2005, sous l’égide de l’ancien président Abdelazkiz Bouteflika. Kamel Daoud, qui a été naturalisé français, a choisi depuis 2023 de résider en France.

Luol Deng, ex-basketteur sud-soudanais

Cette ancienne star des Chicago Bulls, qui a brillé quinze ans sur les parquets de la NBA, aurait pu poursuivre sa carrière aux Etats-Unis. Mais quand est arrivée l’heure de sa retraite en tant que joueur professionnel, en 2019, Luol Deng a préféré se lancer dans une aventure bien plus difficile : rentrer au Soudan du Sud, son pays, qu’il avait fui enfant à cause des guerres, prendre la tête de la fédération de basket et emmener la sélection nationale aux Jeux olympiques de Paris.

A 39 ans, il a réussi son pari, révélant à travers les performances de l’équipe masculine qu’il a su former le potentiel du basket sud-soudanais. « Tout ce qu’il manque, ce sont les opportunités, les équipements, les ressources, car le talent est bien là. Et c’est comme ça sur l’ensemble du continent », confiait récemment à The Players Tribune celui qui est devenu une idole au Soudan du Sud.

Mati Diop, cinéaste franco-sénégalaise

« L’annonce de la restitution des œuvres d’art à l’Afrique, c’était comme une gifle », expliquait, en mars, la cinéaste franco-sénégalaise Mati Diop au Monde, au sujet de la naissance de son documentaire Dahomey – un ancien royaume situé dans le sud du Bénin. Deux semaines plus tôt, la cinéaste franco-sénégalaise avait remporté l’Ours d’or à la Berlinale pour ce film qui suit le retour de vingt-six œuvres béninoises pillées lors de l’invasion des troupes coloniales françaises, en 1892, du Musée du quai Branly, à Paris, jusqu’à leur arrivée à Cotonou, au Bénin, le 10 novembre 2021.

Fille du musicien sénégalais Wasis Diop, nièce du cinéaste Djibril Diop Mambéty (1945-1998), la réalisatrice et actrice de 42 ans signe son deuxième long-métrage après Atlantique, Grand Prix du jury au Festival de Cannes en 2019.

Miryam Djangala Fall, militante des droits des femmes centrafricaine

Nul doute que Miryam Djangala Fall aurait préféré ne jamais avoir à recevoir cet honneur : le prix Simone-Veil 2024 de la République française pour l’égalité femmes-hommes. Car derrière l’intitulé froidement générique de cette distinction se cache une vie de tourments et de souffrances, longtemps indicibles, mais que cette Centrafricaine de 35 ans a décidé de révéler en 2020, comme une libération.

Miryam Djangala Fall a, en effet, été une victime d’outrages sexuels à répétition subis depuis son adolescence comme autant de symptômes de la folie meurtrière qui secoue par spasmes récurrents son pays. Enfant, la jeune femme rêvait d’être avocate. Le Mouvement des survivantes de Centrafrique, dont elle est coordinatrice, est aujourd’hui son prétoire. « J’ai réussi à transformer mes souffrances en force », explique-t-elle.

Tosin Eniolorunda, entrepreneur nigérian

C’est un club très sélect que l’entrepreneur nigérian Tosin Eniolorunda a tout juste rejoint avec sa société Moniepoint : celui des « licornes », ces entreprises non cotées valorisées plus d’un milliard de dollars. Elles sont moins d’une dizaine à l’échelle de l’Afrique. Moniepoint y a accédé à l’issue d’une levée de fonds de 110 millions de dollars bouclée à la fin d’octobre, à laquelle Google a participé.

En neuf ans, la start-up s’est imposée comme l’une des principales plateformes de paiement pour les petites et moyennes entreprises nigérianes et offre désormais ses services bancaires aux particuliers. Ses performances illustrent la vitalité entrepreneuriale du Nigeria. Malgré une crise économique qui ne cesse d’empirer, le pays le plus peuplé d’Afrique est celui qui compte le plus de licornes (cinq sur huit). L’ingénieur informatique Tosin Eniolorunda travaillait pour l’une d’elles, Interswitch, la pionnière des fintech nigérianes, avant de lancer sa propre société.

Emerse Faé, sélectionneur ivoirien

A tout juste 40 ans, Emerse Faé a été l’homme providentiel de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2024, celui par lequel le miracle est arrivé. Alors que la sélection ivoirienne de football, menée par Jean-Louis Gasset, venait de vivre des phases de groupe catastrophiques et avait frôlé l’élimination, le Français a été remplacé au pied levé par son adjoint. Emerse Faé hérite alors d’une équipe « au fond du trou ».

Le jeune entraîneur parvient à ressusciter les Eléphants ivoiriens et à les guider de victoire en victoire, face au Sénégal, au Mali et à la République démocratique du Congo, jusqu’à remporter la CAN à domicile après une finale spectaculaire contre le Nigeria (2-1). Il n’est que le deuxième sélectionneur national ivoirien à gagner cette compétition, après Yéo Martial, en 1992.

Titularisé après la CAN, il est décoré avec tous ses joueurs de l’Ordre national, la plus grande distinction en Côte d’Ivoire. Ce « conte de Faé » lui a valu également le titre d’entraîneur de l’année aux derniers Awards de la Confédération africaine de football.

Gayane Faye, chercheur sénégalais

Le 16 août, après quatre années de travail acharné, Gayane Faye et ses équipes de l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar ont réalisé une première dans l’histoire du Sénégal : lancer dans l’espace un satellite nommé Gaindesat (le satellite Gaïndé, ou « du lion » en français) à l’aide d’une fusée Falcon 9 développée par la société SpaceX. « Quand j’ai vu le feu propulser l’appareil, tout est devenu réel, c’était une immense satisfaction et une fierté », confie le coordinateur du projet spatial sénégalais au Monde.

Entièrement confectionné au Sénégal, Gaindesat a été conçu pour répondre à deux missions principales : la collecte de données environnementales et d’images du Sénégal. « Cette réussite est aussi un plaidoyer auprès de la jeunesse sénégalaise pour démontrer que de grandes choses sont possibles, y compris au Sénégal », assure le chercheur, dont le projet a contribué à former quinze jeunes ingénieurs.

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  (Abidjan, correspondance), , ,  (Dakar, correspondance) et  (Juba, correspondance)

Source : Le Monde  – Le 31 décembre 2024

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