AFP – « Je suis un Berlinois, j’ai ma vie ici », explique à l’AFP le vidéaste de 27 ans, arrivé à 18 ans à Berlin lors de la grande crise des réfugiés en 2015, dont il est devenu l’un des symboles après sa photo prise à l’époque avec la chancelière allemande tout sourire.
Ce cliché a immortalisé la politique d’accueil de l’Allemagne il y a près de dix ans. Elle avait ouvert ses frontières à près d’un million de personnes, soit la plus importante diaspora syrienne dans l’UE.
Diplôme de communication en poche, après des études qu’il a financées en travaillant deux jours par semaine dans un supermarché, Anas Modamani est désormais pigiste pour la chaîne publique de radio et télévision allemande Deutsche Welle à Berlin, qui diffuse à l’international.
© AFP Le journaliste syrien, Anas Modaman, titulaire aujourd’hui d’un passeport allemand, tient un appareil photo et un microphone dans une rue de Berlin, le 11 décembre 2024 |
« J’ai un appartement merveilleux, une femme très belle, j’ai tout ce qu’il me faut ici », constate-t-il.
Anas Modamani vit désormais avec sa fiancée ukrainienne, arrivée en Allemagne quelques mois avant l’invasion de son pays par la Russie en février 2022.
A eux deux ils sont un couple symbole: les Ukrainiens et les Syriens constituent les deux plus grandes communautés de réfugiés dans le pays.
Comme lui, sa fiancée travaille, elle est ingénieure en mécanique depuis la fin de ses études à Berlin.
Parti de Syrie car « il ne voulait pas faire son service militaire », Anas Modamani dit qu’il ne veut pas y retourner car « il y a vécu des choses terribles ». « J’y ai perdu des amis. Des membres de ma famille sont morts à cause du régime », raconte-t-il.
« Je me fais du souci »
Depuis la chute d’Assad dimanche, le débat enfle en Allemagne et dans d’autres pays d’Europe pour renvoyer en Syrie les réfugiés.
A moins de trois mois d’élections législatives prévues le 23 février prochain, l’extrême droite et les conservateurs allemands rivalisent d’appels aux expulsions.
© AFP Le Syrien Anas Modamani, aujourd’hui titulaire d’un passeport allemand et journaliste pour la radio et télévision Dutsche Welle, consulte son téléphone portable dans un magasin à Berlin, le 11 décembre 2024 |
Une attitude fustigée mercredi par la ministre des Affaires étrangères, l’écologiste Annalena Baerbock, qui juge que « cela témoigne manifestement d’un manque de réalisme sur la situation au Proche-Orient ».
« Pour mes amis qui n’ont pas de passeport allemand, contrairement à moi, je me fais du souci », reconnaît Anas Modamani. « La guerre est certes terminée, mais la situation n’est pas sûre, nous devons voir comment cela évolue », ajoute-t-il.
S’il « a plus d’amis à Berlin qu’en Syrie », ses parents et ses frères et s?urs vivent encore près de Damas, à une demie heure en voiture.
Il souligne qu’Israël mène des centaines de frappes contre son pays. « Cela peut toucher n’importe qui (…) Quand j’ai récemment téléphoné à ma mère, ils étaient cachés dans la cave », raconte-t-il.
Pour le moment, ses parents, qui ont tous les deux la cinquantaine, veulent observer la situation. Son père électricien répare des générateurs.
« Pour toujours dans l’histoire »
Faire venir sa famille en Allemagne risque désormais toutefois d’être beaucoup plus compliqué qu’avant. Berlin a décidé lundi de suspendre les décisions sur les demandes d’asile en cours d’exilés syriens.
Berlin (AFP)
Source : Courrier international (France)
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