Pendant plus d’un an, l’organisation dirigée par le fils de Moammar Kadhafi, Saif al-Islam al-Kadhafi, a organisé un dialogue en prison entre les autorités libyennes et des membres du Groupe islamique combattant libyen (GICL).
Selon le porte-parole de la Fondation Kadhafi, Mohamed Allagui, « ces personnes ont achevé leur programme de réhabilitation, qui était destiné à les faire renoncer à la violence et à les réinsérer dans la société libyenne ».
L’ancien dirigeant du GICL Khaled Cherif a invité les détenus libérés à « être utiles à eux-mêmes, à leurs familles et à leur patrie ». Cherif, qui a accompagné d’anciens dirigeants islamistes pour assister à cette libération, leur a conseillé « d’honorer leurs promesses et de participer à la construction de la Libye ».
« C’est une mesure positive qui, je l’espère, est destinée à la réforme et à la réconciliation, et non à tromper l’opinion ni à servir de propagande médiatique », a expliqué Slah Baiou à Magharebia.
Ce programme de réintégration a déjà connu plusieurs succès antérieurs. Dans son manifeste intitulé Etudes correctives publié l’an dernier, le GICL avait répudié al-Qaida et dénoncé les meurtres de civils sous le prétexte du djihad. En mars, la Libye avait libéré 214 militants emprisonnés, dont l’émir du GICL Abdelhakim Belhaj.
Pour sa part, l’ancien responsable de la section médias du GICL et membre du Conseil de la choura Noman Benotman voit le dialogue de la Libye avec ces prisonniers comme l’exemple d’une « expérience significative dans le combat contre l’extrémisme ».
« [Le] succès de cette expérience libyenne », a déclaré Benotman au quotidien londonien Asharq Alawsat le 2 septembre « s’est avéré efficace pour éloigner les islamistes des antres du mal ».
Mais tout le monde n’est pas convaincu par le fait que cette libération soit une bonne chose.
« Certains régimes arabes ont réalisé le prix qu’ils ont eu à payer en échange de la trève avec les groupes islamiques », a déclaré Monia Ferjani, spécialiste de l’Islam politique.
« Ce n’est un secret pour personne que les mouvements fondamentalistes ont modifié leur technique au stade actuel, au point que certains sont allés jusqu’à parler de ‘Lumière du fondamentalisme’, destinée à promouvoir l’islamisme derrière un visage humain », a-t-elle ajouté.
Ces « néofondamentalistes », comme elle les appelle, « ne luttent plus contre les lois des hommes avec une charia révélée par Dieu », mais au contraire « défendent la charia en utilisant des lois faites par l’homme ».
« La décision de libération en Libye en est un exemple vivant », ajoute-t-elle.
Pour Maher Sliti, un étudiant, la décision de libérer ces détenus envoie un nouveau message aux jeunes du Maghreb qui sont tentés de rejoindre les groupes extrémistes : celui que « la route se rétrécit toujours plus, et le dialogue et la lutte pacifique sont suffisants pour initier le changement ».
« La mesure prise par les autorités libyenne est également un message adressé aux leaders arabes, les invitant à engager le dialogue avec leurs adversaires, quand bien même ce sont des extrémistes », ajoute Sliti.
« Manier le bâton et agiter la carotte ne peut conduire qu’à des échanges violents et à tomber dans l’inconnu », a-t-il conclu.
Jamel Arfaoui
Source : magharebia.com le 07/09/2010