La Banque mondiale alerte sur la dette des pays les plus pauvres

Selon le rapport annuel de la Banque mondiale, les pays à bas et moyen revenu dépensent davantage pour rembourser leur dette extérieure qu’ils ne reçoivent de financements pour se développer.

Le Monde  – La crise qui menace les pays à bas et moyen revenu n’est plus seulement celle de la dette mais du financement de leur développement. Le rapport annuel sur la dette de la Banque mondiale, publié mercredi 3 décembre, montre que, pour la troisième année de suite, ces derniers dépensent davantage pour rembourser leur dette extérieure qu’ils ne reçoivent de financements pour se développer. Un solde négatif, qui a atteint 205,1 milliards de dollars (176 milliards d’euros) en 2024, et même 741 milliards de dollars si l’on y ajoute les soldes des deux années précédentes. Soit l’écart le plus important depuis au moins cinquante ans. « La hausse du coût du service de la dette absorbe une part croissante des recettes publiques, ce qui risque de réduire les dépenses de santé, d’éducation et d’infrastructures – et d’entamer les perspectives de croissance », avertit la Banque mondiale.

Le groupe de pays étudié est toutefois très hétérogène puisqu’il comprend à la fois la Chine, deuxième puissance économique de la planète, et Haïti, l’un des pays les plus pauvres. Si l’on s’intéresse aux 78 pays les plus vulnérables, ceux qui sont bénéficiaires du fonds de l’Association internationale de développement de la Banque mondiale, la situation est préoccupante. Entre 2014 et 2024, la part de la dette détenue par des créanciers privés est celle qui a augmenté le plus rapidement. En 2024, ces derniers ont prêté à ces Etats 22,3 milliards de dollars, soit le tiers de leurs nouveaux prêts, un montant qui a doublé par rapport à l’année précédente. Or, ces prêts sont plus coûteux et de plus courte durée.

Les pays pauvres ont déboursé le montant record de 118,1 milliards de dollars en 2024 au titre de leur remboursement, soit un bond de 16,5 % par rapport à l’année précédente. Ces nations les plus fragiles « voient leur marge de manœuvre budgétaire se rétrécir, ce qui les rend vulnérables au moindre choc et complique le financement de leur développement », constate l’institution de Washington. Le Sénégal, le Laos, le Mozambique ou encore le Pakistan sont parmi les pays les plus touchés. Avec une dette qui a atteint l’équivalent de 132 % du produit intérieur brut (PIB), le Sénégal est, quant à lui, le pays le plus endetté d’Afrique subsaharienne et son déficit public s’est creusé à 14 % du PIB.

Paysage des créanciers de plus en plus fragmenté

« Les coûts d’emprunt élevés ne s’expliquent pas seulement par les risques liés au pays mais aussi par des facteurs extérieurs : un cadre de restructuration de la dette qui manque de souplesse, des créanciers nombreux et qui ont du mal à s’accorder entre eux et, enfin, un système financier international incapable d’absorber les chocs », avancent les deux économistes Ishac Diwan et Brendan Harnoys-Vannier dans une étude, publiée en septembre, par le groupe de réflexion français Finance for Development Lab. De fait, le Club de Paris, qui regroupe les principaux pays créanciers de la planète, ne détient plus que 7 % des dettes. Le paysage des créanciers est de plus en plus fragmenté avec l’arrivée des détenteurs d’obligation souveraine.

Avec des possibilités de financements extérieurs à bon marché de plus en plus rares, les pays se tournent vers l’épargne intérieure. Sur les 86 pays en développement qui publient des statistiques, 50 d’entre eux ont vu leur dette intérieure augmenter plus vite que leur dette extérieure. « Ce type d’emprunt public se fait généralement au détriment du secteur privé : les banques commerciales locales se chargent d’obligations d’Etat, alors qu’elles devraient prêter au secteur privé », déplore la Banque mondiale. « Alors que les gouvernements se tournent vers l’emprunt intérieur, les banques sont davantage exposées au risque lié à la dette publique », ajoute le Fonds monétaire international (FMI), dans une note de blog publiée le 18 novembre.

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Source : Le Monde 
 
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