France – Municipales 2026 : faut-il faire du « copier-coller » pour être élu ?

Gaspard Gantzer, ancien conseiller de François Hollande à l'Élysée, analyse pour Vanity Fair les séquences marquantes de la campagne des élections municipales de mars 2026. Pour cette nouvelle chronique, il pose la question de l'inspiration en politique.

Vanity Fair  – C’est une recette qui en rappelle d’autres. Vidéos mettant en scène la rencontre avec les habitants, affiches de meeting de couleurs vives, inaugurations du QG de campagne sur fond de DJ aux platines et chants à s’en époumoner, multiplication des comptes de soutien sur les réseaux sociaux selon les franges sociales de l’électorat visé : l’effet Zohran Mamdani infuse partout.

À l’approche des élections des 15 et 22 mars, plusieurs campagnes semblent entrer dans une ère d’imitation assumée du candidat victorieux à New York. En effet, quand une stratégie enthousiasme et mène à la victoire, elle devient un modèle que d’autres cherchent naturellement à reproduire. Et cette dynamique n’est que le dernier épisode d’une longue tradition d’emprunts entre aspirants dirigeants politiques. Alors, jusqu’où l’imitation peut-elle aller ?

Les temps ont changé et les figures aussi. En 1965, Jean Lecanuet, conseillé par Michel Bongrand, voulait être le « Kennedy français ». Plus récemment, à l’Élysée, alors que François Hollande invoquait plutôt Blum, Mitterrand, Jospin ou le père Queuille, corrézien comme lui, nous regardions du côté de Barack Obama, Justin Trudeau ou Matteo Renzi pour penser la communication présidentielle. En 2017, Emmanuel Macron prolongeait cette filiation en assumant ses inspirations, appelant Obama entre les deux tours de l’élection de 2022 pour lui témoigner sa reconnaissance, avant de préférer le mode « viriliste », quitte à se battre avec les ours, à la Poutine. Aujourd’hui, aux portes du pouvoir, l’extrême droite française rêve de Donald Trump, de Giorgia Meloni ou de Javier Milei.

Que la célèbre citation de Picasso « Les bons artistes copient, les grands artistes volent » en témoigne, imiter n’est pas forcément un défaut. Certaines méthodes ont fait leurs preuves et ont produit des victoires. En 2008, Obama révolutionnait le porte-à-porte grâce à la géolocalisation et à l’identification fine des soutiens. Ces techniques ont été importées en France en 2012 puis en 2017, et plus aucune campagne à peu près sérieuse ne peut désormais s’en passer. La stratégie est comprise : mobiliser ses sympathisants plutôt que convaincre ses opposants.

Audiences ciblées et programme clair

En 2022, les communistes ont repris les codes graphiques d’Alexandria Ocasio-Cortez pour moderniser les campagnes de Fabien Roussel et Ian Brossat. En 2026, Karim Bouamrane, présenté comme un « Obama français » par le New York Times, emprunte cette fois à Zohran Mamdani, tandis que les Insoumis reprennent les couleurs vives et contrastées du maire new-yorkais.

Le « moment Mamdani » va plus loin qu’une simple reprise de codes et des techniques de communication de l’agence Fight, fondée par des anciens stratèges de la campagne de Kamala Harris. Il repose sur la joie, l’enthousiasme, l’énergie collective, mais surtout sur une compréhension fine de l’époque. La communication politique ne se pense plus comme des discours au peuple, mais en micro-communautés. Plusieurs comptes Instagram existent pour toucher différents publics, chacun avec sa propre grammaire.

Les campagnes ne cherchent plus les interviews sur les grandes chaînes mais les micro-podcasts, les créateurs aux audiences fragmentées, qui additionnées finissent par faire masse. Si un bon tractage fait du bien au moral des troupes, les SMS ciblés, les mails individualisés et la segmentation numérique sont dorénavant privilégiés. Le tout s’appuie sur un programme éminemment lisible, structuré autour de quelques grandes propositions comme la gratuité des transports (David Belliard n’échappe pas à la tentation), le pouvoir d’achat, et autres mesures fortes, suffisamment claires et peu nombreuses pour infuser vite.

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