A Washington, sous les auspices de Donald Trump, la RDC et le Rwanda signent un accord de paix fragile

Sous pression américaine, Kigali et Kinshasa ont signé, le 4 décembre, un accord de paix présenté comme « historique » par Donald Trump. Derrière la mise en scène diplomatique, la méfiance reste palpable entre Paul Kagame et Félix Tshisekedi, et les combats se poursuivent dans l’Est congolais.

Le Monde  – Le président américain, Donald Trump, avait beau célébrer à grand renfort de superlatifs un « accord de paix historique », « un grand miracle » destiné à mettre un terme à « l’un des pires conflits » au monde, les deux présidents signataires, le Rwandais, Paul Kagame, et son homologue de la République démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi, ne débordaient pas du même enthousiasme. Rassemblés à Washington, jeudi 4 décembre, les deux hommes ont évité de se serrer la main, ou même de se croiser du regard d’une façon si ostensible que Donald Trump s’autorisait un trait d’ironie : « Regardez, comme ils s’aiment l’un l’autre ! »

Car, passé cette séquence médiatique organisée dans les salons de l’Institut des Etats-Unis pour la paix – opportunément rebaptisé la nuit précédente « Institut Donald Trump pour la paix » – le plus dur reste à faire. « S’engager sur un plan de paix est une chose, le mettre en œuvre en est une autre », glissait le président burundais, Evariste Ndayishimiye, présent en tant que grand témoin à cette signature, au même titre que son homologue du Kenya, William Ruto, et le président de l’Union africaine, l’Angolais Joao Lourenço.

Ce texte dessine un cadre ambitieux, « puissant et détaillé », selon Donald Trump, pour tenter de résoudre un conflit qui, par séquences ravageuses, endeuille l’est de la RDC depuis plus de trente ans. Il prévoit notamment la cessation des hostilités, avec l’instauration d’un cessez-le-feu permanent, un programme de désarmement, un processus de retour des personnes déplacées et des mesures de justice contre les responsables d’exactions.

Pour en arriver là, il a fallu tout le pouvoir de conviction des Etats-Unis et l’implication de Donald Trump depuis son retour à la Maison Blanche en janvier. A raison, Paul Kagame a rappelé qu’il y eut avant cela « un nombre incalculable » d’échecs. « Nous nous sommes efforcés davantage que les autres » au succès de cette entreprise, a expliqué le président américain. Massad Boulos, son conseiller principal pour l’Afrique, s’y est attelé dès sa nomination, en avril. Il a effectué plusieurs voyages dans les Grands Lacs à un rythme inédit pour « une région qui est loin de faire les grands titres », a souligné Paul Kagame.

Drame humanitaire

Pourtant, l’incendie qui consume cette partie orientale de la RDC, frontalière du Rwanda, s’est rallumé en novembre 2021. Des confins du Nord-Kivu, il s’est propagé progressivement à toute la province puis au Sud-Kivu. Le Mouvement du 23 mars (M23) – nom tiré, fort à propos, d’un précédent accord de paix devenu caduc– avait repris les armes, officiellement pour défendre les droits discriminés de la communauté tutsi congolaise. Mais, très tôt, les experts des Nations unies (ONU) sur la RDC identifiaient, dans leurs rapports semestriels, l’implication des forces armées rwandaises aux côtés de cette rébellion, sur le territoire congolais.

Paul Kagame, lui, reconnaît seulement avoir pris des « mesures défensives » sur sa frontière, destinées officiellement à protéger son pays des incursions d’un autre mouvement rebelle, hutu celui-là, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). La veille de la signature de l’accord de paix, Yolande Makolo, la porte-parole du gouvernement rwandais, expliquait que « le problème sécuritaire pour le Rwanda est la présence, depuis trente et un ans, au Congo, d’anciens génocidaires qui veulent finir ce qu’ils ont commencé en 1994 ». Cette année-là, durant cent jours, 800 000 Tutsi rwandais furent exterminés par une entreprise génocidaire échafaudée à l’échelle du pays par le régime extrémiste hutu alors au pouvoir à Kigali.

De nos jours, les opérations et ambitions du M23 et de son aile politique de l’Alliance fleuve Congo (AFC) outrepassent la lutte contre la menace des FDLR et la protection d’une communauté. Sous commandement rwandais, selon l’ONU, la rébellion a mis en déroute l’armée congolaise, structurellement défaillante. Elle occupe un territoire presque aussi étendu que le Rwanda lui-même, au prix d’un drame humanitaire difficilement quantifiable mais se chiffrant en milliers de morts et en centaines de milliers de personnes déplacées de force. Un bilan macabre qui s’ajoute à celui des précédentes phases de conflit dans la région des Grands Lacs.

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Source : Le Monde 

 

 

 

 

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