Libération – Crise de confiance à RFI. Mardi, une majorité de journalistes a voté une motion de défiance contre la direction accusée de flottement déontologique. «La direction ne peut pas laisser une journaliste de RFI se faire insulter par un de ses confrères de la chaîne, même si c’est dans un autre média, ce n’est pas possible», dénonce auprès de Libération Sabine Mellet, la déléguée du CGT-SNJ pour France Médias Monde (FMM), maison mère de la radio.
Son syndicat a signé la lettre soumise par un collectif de journalistes à l’origine de la motion de défiance, qui posait la question suivante : «Faites-vous confiance à la direction de RFI pour appliquer et faire respecter les principes déontologiques qui régissent tout média, pour défendre et promouvoir une information libre et indépendante ?» Sur les 524 journalistes éligibles, un peu plus de la moitié a voté (287 personnes) et 190 d’entre eux «ne font pas confiance à la direction», soit 67,1 % des votants, selon le décompte de la SDJ.
Les reproches affluent
Les tensions ont débuté en novembre, avec une série d’enquêtes sur les détournements de fonds en République démocratique du Congo (RDC), réalisée par 19 médias d’un consortium international, dont RFI. La journaliste Sonia Rolley participe pour la radio aux révélations des Congo Leaks, qui mettent en cause la famille Kabila, laquelle aurait détourné au moins 138 millions de dollars d’argent public.
Dans la foulée, Alain Foka, un journaliste star de RFI, très populaire en Afrique francophone, interviewe sans prévenir sa rédaction Jules Alingete, un inspecteur général des finances de la RDC, qui critique les enquêtes en question…
L’affaire s’envenime et les reproches affluent en interne. D’abord parce qu’Alain Foka a utilisé les logos de RFI et France 24 — qui ont la même maison mère — pour une vidéo refusée par la rédaction en amont et publiée sur sa propre chaîne YouTube. Aussi parce que Jules Alingete parle de «faux» et d’«insinuations» l’après-midi… alors qu’il donnait raison au travail des journalistes, le matin même, sur RFI.
En cause également, l’attitude du journaliste, à qui est reprochée une certaine complaisance lors de son entretien avec le haut fonctionnaire : il ne le questionne pas sur son changement d’avis sur l’enquête de sa consœur.
Enfin, le positionnement de la direction de RFI, qui avait à la fois défendu le travail d’enquête réalisé par Sonia Rolley et jugé l’interview d’Alain Foka «irréprochable». Elle a depuis évoqué en interne «une double sanction» qui viserait «un collaborateur» sans préciser s’il s’agit bien de Alain Foka. Pas de quoi dissiper les troubles chez des journalistes de RFI, réputés pour leur déontologie en béton.
Refonte des texte
A la suite du vote, Thomas Legrand-Hedel, le directeur de la communication de France Médias Monde, relativise un scrutin «qui représente 36% du corps électoral» et souligne que la direction ne «minimise pas le problème». «Le travail de communication engagé va se poursuivre», assure-t-il à Libération.
Julie Malfoy
Source : Libération (France)
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