Côte d’Ivoire : des milliers d’opposants défilent à Abidjan pour dire « Non à un quatrième mandat ! » d’Alassane Ouattara

Le président sortant a annoncé fin juillet qu’il était candidat à un quatrième mandat consécutif, alors que plusieurs grandes figures de l’opposition ont été exclues du scrutin.

Le Monde – Pari réussi pour l’opposition ivoirienne, qui a réuni des milliers de personnes dans les rues d’Abidjan, samedi 9 août, à moins de trois mois de l’élection présidentielle. Malgré un climat politique tendu marqué par la candidature du président Alassane Ouattara à un quatrième mandat consécutif et par une série d’arrestations et de convocations judiciaires de cadres de l’opposition, la manifestation s’est déroulée dans le calme sur le boulevard de la Solidarité à Yopougon, commune la plus peuplée de la capitale économique et fief traditionnel de l’ancien président Laurent Gbagbo.

« Non à un quatrième mandat ! » et « Trop c’est trop ! » ont scandé les manifestants pendant plus de quatre heures, portant les uns des pagnes à l’effigie de Laurent Gbagbo, à la tête du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), les autres de Tidjane Thiam, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), tous deux exclus du scrutin et réunis depuis juin au sein d’une alliance baptisée « Front commun ». Leurs militants réclament une révision de la liste électorale avant le scrutin présidentiel du 25 octobre. Beaucoup ont défilé en brandissant le drapeau bleu du PPA-CI dans une main et le drapeau vert du PDCI dans l’autre.

« Nous voulons un nouveau régime »

« Cette mobilisation commune, c’est la preuve que toute la Côte d’Ivoire veut des élections libres et transparentes, sans exclusion, s’est réjoui Dibahi Dodo Amédée, député des sous-préfectures de Namané et d’Iboguhé, au centre-ouest du pays. Le peuple va choisir son candidat : Laurent Gbagbo ou Tidjane Thiam, ce sera aux électeurs de trancher. Mais ce qui est sûr, c’est que le quatrième mandat ne passera pas, nous voulons un nouveau régime. »

La loi fondamentale ivoirienne prévoit un maximum de deux mandats, mais le Conseil constitutionnel a estimé en 2020 qu’avec la nouvelle Constitution adoptée quatre ans plus tôt, le compteur des mandats présidentiels avait été remis à zéro. Une interprétation que les détracteurs du président sortant contestent.

« On est fatigués d’Alassane Ouattara !, criait un manifestant. Je suis venu de San Pedro [ville côtière à 300 km à l’ouest d’Abidjan], j’ai payé mon transport de ma poche. Personne ne m’a envoyé ici, que mon amour pour Laurent Gbagbo. C’est la première fois qu’on a le droit de manifester depuis son retour au pays en 2021 ! »

L’ex-chef de l’Etat, 80 ans, inéligible à la suite de sa condamnation par la justice ivoirienne en 2018 dans l’affaire du « braquage » de la BCEAO pendant la crise post-électorale de 2011, n’a pas pris part à la marche. Qu’à cela ne tienne : « Laurent Gbagbo est un esprit, ont chanté des militants du PPA-CI en montrant son portrait. Même quand il sera mort, on continuera son combat. »

Arrestations et convocations judiciaires

Le président du PDCI, Tidjane Thiam, était également absent du cortège. En exil depuis plusieurs mois après avoir été radié de la liste électorale, au motif qu’il aurait perdu sa nationalité ivoirienne entre 1987 et 2024, l’ancien banquier d’affaires pilote sa campagne depuis Paris.

Ces derniers mois, plusieurs cadres et militants du PDCI et du PPA-CI ont été arrêtés par les forces de sécurité ou convoqués à la préfecture de police. Certains ont pris la voie de l’exil, disant craindre pour leur sécurité. Depuis la soirée du vendredi 8 août, trois responsables du parti de Laurent Gbagbo, dont l’ancien ministre de la défense Moïse Lida Kouassi, sont auditionnés à la préfecture de police, et n’ont pas pu participer à la marche.

Aussi les militants réclament-ils leur libération, tout en dénonçant un « harcèlement judiciaire ». « On va d’arrestations en arrestations, déplore Hortense Louma Séri, présidente de la Ligue des femmes du PPA-CI. Mais ça ne nous décourage pas. Moi-même, je risque d’être convoquée après m’être exprimée dans la presse. Ça ne me fait pas peur, je suis prête. »

 

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 (Abidjan, correspondance)

 

 

Source :  Le Monde

 

 

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