
– Le Sénégal s’enfonce dans l’ornière. Depuis la publication, en février, du rapport de la Cour des comptes révélant une dette cachée de 7 milliards de dollars, les mauvaises nouvelles s’accumulent. Au point que le gouvernement prépare les esprits à un « plan de redressement » dont les contours devraient être annoncés dans les jours à venir, laissant craindre la mise en place d’une cure d’austérité.
Le dernier coup de semonce est venu, le 30 juin, d’un rapport mis à jour de la banque britannique Barclays réévaluant la dette publique du pays à 119 % du PIB pour 2024. Un chiffre calculé à partir du document de programmation budgétaire et économique pluriannuel du ministère de l’économie de juin 2025, qui fait du Sénégal le pays le plus endetté d’Afrique.
« Nous avons hérité d’un pays malade. Le régime précédent a hypothéqué le pays et les générations à venir », a réagi mardi 1er juillet au soir le premier ministre, Ousmane Sonko, dans une allocution de 45 minutes diffusée en direct sur les réseaux sociaux, avant d’annoncer qu’un « plan de redressement » serait présenté sous peu. « Nous expliquerons ce que nous attendons du peuple, comment l’Etat doit réduire ses dépenses et comment avancer avec nos partenaires », a promis le chef du gouvernement, sans plus de détails.
« Presque tout l’argent est consacré à la dette »
La tâche s’annonce rude. En février, le rapport d’audit publié par la Cour des comptes avait déjà réévalué l’encours de la dette à 99,7 % du PIB, contre 83 % prévus par la précédente administration. Le déficit budgétaire, lui, était passé de 4,9 % à 12,3 % du PIB. Des révélations qui avaient eu pour conséquence la dégradation de la note souveraine du Sénégal, abaissée à B3 par l’agence de notation Moody’s.
Aujourd’hui, ce sont les obligations d’Etat sénégalaises en dollars qui ont perdu de leur valeur sur les marchés internationaux : – 15 % pour celles à échéance 2033, – 32,8 % pour celles de 2048. Une conséquence directe de la perception des investisseurs face à l’évolution de la santé financière du pays.
D’après la loi de finances rectificative, votée samedi 28 juin, près de 39,7 % des dépenses du budget général, fixées à 6 364,8 milliards de francs CFA (9,7 milliards d’euros environ), sont déjà englouties par les salaires de la fonction publique (1 485 milliards de francs CFA, soit 2,26 milliards d’euros) et le remboursement des emprunts (1 057 milliards de francs CFA, soit 1,6 milliard d’euros). « Presque tout l’argent du pays est consacré à la dette », a confirmé Ousmane Sonko mardi soir.
« La démarche de transparence des nouvelles autorités autour de la dette est globalement saluée par les investisseurs. Néanmoins, beaucoup s’inquiètent du fait que cela traîne en longueur », souligne un responsable du FMI.
Nécessité d’une réforme fiscale
Pour les autorités, la situation est d’autant plus sombre que la croissance économique a été revue à la baisse pour 2025, passant de 9,7 % à 8 % selon la Banque mondiale. Tout comme les projections des recettes espérées de l’exploitation du pétrole et de gaz. Pour 2025, la loi de finances rectificative ne prévoit que 48,1 milliards de francs CFA (73,2 millions d’euros) de recettes liées à la production d’hydrocarbures, et 227,2 milliards (346 millions d’euros) pour les trois prochaines années.
Le « plan de redressement » annoncé va-t-il s’accompagner d’une cure d’austérité ? A plusieurs reprises ces derniers mois, le ministère des finances a communiqué sur la nécessité d’une réforme fiscale, « ambitieuse et structurelle ». « Il est question de supprimer un certain nombre de subventions à l’énergie, des exonérations fiscales, mais aussi d’élargir l’assiette d’imposition », explique un haut fonctionnaire, proche du dossier. « Il faut faire payer moins les Sénégalais, mais tous les Sénégalais », avait énoncé Ousmane Sonko lors de la déclaration de politique générale fin 2024.
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