
– Quelques heures après la seconde investiture de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis, le 20 janvier, Elon Musk, fervent soutien du nouveau locataire de la Maison Blanche et son conseiller à la tête du DOGE (le département de l’efficacité gouvernementale), se tape la poitrine gauche avec la main droite, puis tend le bras, paume ouverte, par deux fois, devant les caméras du monde entier. La similitude évidente du geste avec le salut fasciste, utilisé comme signe de ralliement par les régimes de Benito Mussolini et d’Adolf Hitler, relance les spéculations quant à la proximité de Trump et de son mouvement MAGA (« Make America Great Again ») avec l’idéologie fasciste.
D’autant qu’un mois plus tard, Steve Bannon, ancien conseiller de Trump et figure de l’extrême droite américaine, reprend le geste à la Conservative Political Action Conference. La question, multidimensionnelle, agite le champ politico-médiatique et les cercles académiques depuis le premier mandat du milliardaire. Nombreux sont ceux qui n’hésitent plus à qualifier de « fasciste » la politique du nouveau président : c’est le cas de l’ancien chef de cabinet de Donald Trump John Kelly ou de l’historienne américaine Ruth Ben-Ghiat. La pertinence de l’étiquette, pourtant, reste âprement discutée.
Pour éclairer ce débat, deux chercheurs se sont prêtés, pour Le Monde, au jeu de l’entretien croisé. Olivier Burtin est maître de conférences en civilisation des Etats-Unis à l’université de Picardie Jules-Verne et spécialiste du rôle de l’extrême droite au sein de la société américaine. Marc Lazar est professeur émérite d’histoire et de sociologie politique à Sciences Po et titulaire de la chaire Relations franco-italiennes pour l’Europe de la Libre université internationale des études sociales, à Rome.
Comment les historiens définissent-ils le fascisme ?
Marc Lazar : La définition du fascisme a toujours été sujette à débat car, à l’origine, ce n’est pas une idéologie mais un mouvement, les Faisceaux italiens de combat, fondé en 1919 par Benito Mussolini. Il naît de l’irruption des masses en politique, dans l’Italie du début du XXe siècle, et prend la forme d’une contestation des deux grandes idéologies qui dominent alors le champ politique : d’un côté, le libéralisme, de l’autre, le grand mouvement ouvrier dans ses variantes socialiste et communiste.
Le fascisme naît aussi et surtout de la Grande Guerre : l’intensité des combats a accoutumé les jeunes hommes à l’acte de donner la mort et facilité la diffusion d’un virilisme exacerbé. Après le conflit, ils reviennent en Italie avec la volonté de bousculer profondément les mœurs politiques et d’user de la violence, s’il le faut. Organisé autour d’un leader, ce « fascisme-mouvement » est donc un parti armé appuyé sur des références nationalistes et, en particulier, sur une mythologie qui voit dans les dispositions du traité de Versailles [du 28 juin 1919] une injustice et une « victoire mutilée » pour l’Italie.
Parvenu au pouvoir en octobre 1922, il devient autre chose : un régime fasciste qui instaure un parti unique et une dictature, et qui a rapidement pour ambition d’engendrer une humanité nouvelle par le biais d’un encadrement complet de la société. Phénomène politique complexe, le fascisme mêle des aspects conservateurs et révolutionnaires, parce qu’il souhaite bouleverser le mode traditionnel de comportement.
Cette catégorie peut-elle être étendue à d’autres périodes et mouvements politiques ?
M. L. : Dans le champ académique, deux écoles s’opposent. L’une, dite « restrictive », représentée notamment par l’historien italien Emilio Gentile et les historiens français, considère que le fascisme commence en 1919 et finit en 1945, et qu’il ne peut qualifier que les régimes italien et allemand de cette période.
Une deuxième école, dite « générique », représentée notamment par les historiens britanniques et américains Roger Griffin, Robert Paxton, George Mosse ou Stanley Payne, considère que la notion de fascisme peut être étendue à d’autres mouvements et régimes politiques qui se distinguent par une croyance dans le déclin fondamental des sociétés, un nationalisme exacerbé et le recours à la violence. Les adeptes de cette deuxième interprétation ne sont pas tous d’accord, certains considérant que la Hongrie de l’amiral Miklos Horthy ou la Phalange espagnole relevaient du fascisme et d’autres non ; mais nombre d’entre eux tendent à associer le péronisme au fascisme, et presque tous estiment qu’il y a eu des fascistes argentins.
Cette question n’a pas préoccupé que les historiens : d’autres acteurs ont contribué à étendre l’utilisation de l’étiquette « fasciste » au-delà de l’expérience italienne des années 1919-1945. Des intellectuels, d’abord : l’écrivain Pier Paolo Pasolini affirme ainsi, dans ses Ecrits corsaires [Flammarion, 1976], que la société de consommation est un fascisme par son pouvoir uniformisant sur les individus. De même, le philosophe Umberto Eco énonce, lors d’une conférence, en 1995, les critères de ce qu’il appelle l’« ur-fascisme », c’est-à-dire le « fascisme éternel ».
L’usage du terme s’est enfin répandu avec l’instrumentalisation politique du fascisme par l’antifascisme, qui étend l’étiquette à toutes les droites pour les disqualifier : en 1958, par exemple, lorsque le général de Gaulle revient au pouvoir en France, la gauche défile au cri de : « Le fascisme ne passera pas ! »
L’approche « générique » du fascisme permet-elle aux historiens d’utiliser la notion dans le contexte états-unien ?
Olivier Burtin : Si, à la suite de la formulation du « fascisme générique », le concept a été appliqué à certaines expériences asiatiques ou latino-américaines, l’historiographie états-unienne s’est longtemps tenue à l’écart de ce développement. L’arrivée de Trump au pouvoir en 2017 a cependant changé la donne : de nombreux historiens ont dépassé leurs réticences à prendre au sérieux l’existence d’une tradition fasciste au sein même des Etats-Unis.
Les historiens considèrent désormais qu’elle a eu plusieurs représentants. Dès l’entre-deux-guerres, des personnalités comme William Dudley Pelley, leader d’une milice paramilitaire appelée la Légion d’argent, faisaient l’apologie d’un nationalisme, d’un anticommunisme et d’un antisémitisme très violents. Cette tradition ne s’éteint pas avec la seconde guerre mondiale : en 1959, George Lincoln Rockwell crée le Parti nazi américain, qui adopte la croix gammée comme symbole et le salut Sieg Heil [« salut à la victoire »] – il est notamment à l’origine du slogan « White Power ». Dans les années 1970-1980, la scène politique américaine compte un personnage comme David Duke : après un passage au sein d’un parti néonazi alors qu’il est encore étudiant, il se tourne vers le Ku Klux Klan, puis devient le principal représentant de l’extrême droite américaine de l’époque, allant jusqu’à gagner une élection en Louisiane.
Il faut également mentionner ce qu’on appelait à l’époque du premier mandat de Trump l’« alt-right » – la droite alternative. Dans les années 2010, cette nébuleuse de négationnistes, de podcasteurs et de miliciens d’extrême droite s’est rassemblée autour d’une idéologie qui flirtait ouvertement avec le fascisme. Si elle ne représente pas toute l’extrême droite américaine, la tradition fasciste a eu une influence indéniable sur la vie politique du pays : elle a su créer des thèmes et des slogans qui ont eu un écho bien au-delà de ses cercles.
Lors du premier mandat de Trump, l’opinion dominante, dans les champs académique et médiatique, considérait qu’il ne pouvait être qualifié de fasciste. Pourquoi ?
O. B. : Il y avait d’abord l’idée qu’utiliser le terme « fascisme » conduirait, en identifiant le président à une tradition étrangère, à minimiser les racines profondément américaines du phénomène Trump et à « excuser » l’Amérique. Beaucoup d’observateurs estimaient aussi que le terme ne permettait pas de saisir les spécificités et les nouveautés du trumpisme – par exemple, le fait qu’il se diffuse principalement via les réseaux sociaux. Enfin, le terme ayant pu être instrumentalisé de façon abusive à la gauche et à la droite de l’échiquier politique, certains spécialistes le considéraient comme inopérant dans un contexte scientifique strict : ils suggéraient donc de l’abandonner.
Au fur et à mesure de l’avancée du premier mandat de Trump, le nombre de personnes qui s’opposaient à l’utilisation du terme « fascisme » pour caractériser le trumpisme s’est réduit. L’attaque contre le Capitole du 6 janvier 2021 a ainsi démontré de manière évidente que le président américain était prêt, au besoin, à user de la violence politique pour renverser le résultat d’une élection démocratique légitime. Cette date a constitué un tournant important : elle a convaincu de nombreux observateurs, aux Etats-Unis, de la validité du terme. L’éminent historien du fascisme Robert Paxton, qui se refusait jusque-là à l’employer, a d’ailleurs changé d’avis.
La question est posée à nouveaux frais depuis la réélection de Trump et sa prise de fonctions, en janvier. Quelles transformations justifient, selon vous, ce réexamen ?
O. B. : Le Trump auquel nous faisons face aujourd’hui n’est pas le même que celui de 2015-2016 : il s’est radicalisé. Cette droitisation a été palpable tout au long de la campagne électorale de 2024.
Lors de son premier mandat, Trump était freiné par plusieurs obstacles : son inexpérience du gouvernement ; la présence dans son administration de personnes jouant le rôle de garde-fous ou encore l’opposition au Congrès de la vieille garde du Parti républicain ; l’absence de programme clair et structuré.
Aujourd’hui, ces obstacles n’existent plus. Trump a une meilleure connaissance de l’appareil d’Etat américain, toute opposition interne au sein du Parti républicain a disparu et il peut s’appuyer un programme finement élaboré, le Project 2025, pour guider son action. Nous sommes désormais en mesure de le juger sur ses actes plutôt que sur ses discours.
Pensez-vous, aujourd’hui, que le trumpisme s’apparente au fascisme ?
M. L. : Il y a incontestablement des analogies entre les deux régimes : le nationalisme, la volonté de remettre en cause une partie des libertés académiques, les menaces contre la presse, la répression contre les contestataires, notamment les étudiants. Mais une analogie n’est pas une homologie. Si Trump représente un défi absolument considérable pour la démocratie et pour les libertés, parler de fascisme pour qualifier sa personne et sa politique me paraît compliqué tant la situation américaine présente de profondes différences avec le fascisme historique.
Il y a d’abord la question de la violence : l’assaut du Capitole par ses partisans, certes brutal, n’a rien à voir avec la férocité des bandes armées italiennes qui terrorisaient leurs adversaires politiques et la population. Il y a également le fait que le fascisme suppose un Etat fort : si le gouvernement fédéral est puissant sur le plan politique, Trump conduit actuellement, à travers l’action d’Elon Musk et du Department of Government Efficiency [« département de l’efficacité gouvernementale »], une politique de réduction du périmètre étatique, et l’économie américaine est loin d’être soumise à l’autorité de l’Etat comme elle l’était sous le fascisme. Enfin, le fascisme se caractérise par l’encadrement général de la société et la préparation systématique de la population pour engendrer une humanité nouvelle : ils n’ont pas cours aux Etats-Unis, qui ne connaissent pas de parti unique.
Utiliser le terme « fascisme » pour qualifier le trumpisme me paraît donc poser problème. Si nous parlons du trumpisme comme d’un fascisme, comment décrire, par exemple, aux yeux des jeunes générations, l’horreur spécifique du régime fasciste italien ? Recourir au terme « fascisme » est, en outre, une facilité qui ne nous permet pas de comprendre la spécificité de ce qui est en train d’advenir. Il nous faudrait inventer un nouveau terme, comme l’ont fait les contemporains du fascisme, du bolchevisme et du nazisme qui, face à ces régimes inédits, inventèrent la notion de totalitarisme.
O. B. : Il faut, à mes yeux, distinguer trois choses : la figure de Trump, son mouvement et la forme de son régime politique.
Trump n’est pas un idéologue : il a démontré qu’il était capable de prendre toute position et son contraire tant, pour lui, la fin – c’est-à-dire la réalisation de ses intérêts personnels – justifie les moyens. Lui accoler le terme « fasciste » serait mal comprendre sa relation instrumentale à la politique.
Du côté de son mouvement, il y a, en revanche, des gens qui se définissent comme fascistes et qui le voient comme un relais important de leurs idées, voire comme leur champion. Trump n’a jamais désavoué ouvertement ces soutiens venus de l’extrême droite – je pense à David Duke ou à la milice néofasciste des Proud Boys [« garçons fiers »].
En ce qui concerne l’idéologie du mouvement trumpiste lui-même, les similarités avec le fascisme sont pour le moins troublantes. L’idéologie du mouvement MAGA repose sur l’idée que le groupe qui contrôlait historiquement les différents leviers de pouvoir aux Etats-Unis – les hommes blancs et principalement chrétiens – a été « remplacé » par d’autres groupes sociaux – les femmes et les personnes de couleur. Selon eux, ce groupe autrefois dominant est aujourd’hui dominé, victime de discriminations, voire exclu du système politique, et ses valeurs ne sont plus reconnues comme les valeurs dominantes dans la société. Le trumpisme est donc, comme le fascisme, imprégné de la peur du déclin et de la nostalgie d’un âge d’or perdu qu’il faudrait retrouver.
Enfin, citons, parmi les similarités entre le fascisme et le trumpisme, le refus d’accorder le respect et le statut d’opposition légitime à ses adversaires politiques – les démocrates sont considérés comme des traîtres à la nation avec lesquels il ne peut plus y avoir de débat politique raisonné – et, plus largement, le rejet du libéralisme et du pluralisme politiques.
Qu’en est-il du régime politique instauré par Trump ?
O. B. : Le régime politique états-unien n’est pas, à l’heure actuelle, un régime fasciste comparable à ceux de l’entre-deux-guerres, mais les ressemblances avec le fascisme sont, à mes yeux, plus importantes que les différences. S’il n’y a pas de parti armé, le rôle de la violence en politique grandit chaque jour aux Etats-Unis : plusieurs personnalités politiques du Parti démocrate et du Parti républicain opposées à Trump se sont fait l’écho de menaces contre leur famille.
S’il n’y a pas de parti unique, Trump continue, comme lors de son premier mandat, à mettre en place des mesures visant à affaiblir les think tanks, les cabinets d’avocats et les organisations de levées de fonds du Parti démocrate : son objectif est de saper durablement l’opposition politique et de faire en sorte que, grâce à des élections faussées, le Parti républicain soit en mesure de se maintenir au pouvoir de façon quasi perpétuelle.
S’il n’existe pas d’organisations de jeunesse qui enrégimentent les jeunes Américains dès leur plus jeune âge, des tentatives de cooptation de la société civile commencent à se faire jour, notamment dans le milieu universitaire ou dans celui des médias.
S’il n’y a pas de promotion claire d’une humanité nouvelle, comme on pouvait le voir dans l’entre-deux-guerres en Europe, le mouvement MAGA est porteur d’un masculinisme visant à la régénération d’un certain idéal de la masculinité traditionnelle et à la réinstallation de la domination masculine dans la famille et la société. Il promeut, par ailleurs, un néonatalisme qui appelle les Américains blancs à faire plus d’enfants pour contrecarrer le déclin démographique de la population blanche aux Etats-Unis et en Europe.
Enfin, si Trump témoigne, depuis son retour au pouvoir, d’une volonté de réduire l’Etat social à la portion congrue, il renforce considérablement la puissance de l’Etat dans les domaines qui relèvent de l’exécutif, notamment l’immigration et la défense. En s’appuyant sur la théorie de l’« exécutif unitaire » – l’idée selon laquelle la branche exécutive du pouvoir aux Etats-Unis n’aurait quasiment aucun compte à rendre au pouvoir législatif du Congrès –, il tente d’imposer une vision de l’Etat fort et d’en faire le bras armé de son agenda politique.
M. L. : C’est vrai, mais des éléments fondamentaux du fascisme manquent, à mes yeux, à l’appel. Il y a d’abord la question du peuple. Pour Trump, le peuple est, si j’ose dire, « bon » – à condition qu’il soit, selon lui, nettoyé des immigrants qui « contaminent » son sang. Benito Mussolini, au contraire, considérait que le peuple n’était pas à la hauteur de ses aspirations : il le valorisait, l’encensait même, mais il le percevait comme corrompu, « dévirilisé » par la dolce vita romaine et par l’Eglise catholique – il devait donc être rééduqué et dressé.
Il y a, ensuite, la question du bellicisme. Il était au cœur du fascisme, qui valorisait la guerre, alors que la politique américaine est ambivalente sur ce point : si l’administration Trump a récemment manifesté des ambitions impérialistes, le président se revendique comme un artisan de la paix et surfe sur le refus des Américains de mourir à l’étranger.
Il y a enfin, et surtout, le contexte historique. Lorsque le fascisme s’instaure en Italie, la tradition et la culture démocratiques y sont à la fois très récentes et très fragiles. Malgré tous les défauts et toutes les limites de la démocratie américaine, la presse y est toujours libre et il existe des contre-pouvoirs. La tradition démocratique états-unienne est ancienne : elle n’a pas dit son dernier mot.
D’autres termes vous sembleraient-ils plus appropriés ?
M. L. : Nous avons d’autres notions à disposition, notamment celle de démocratie illibérale, un terme revendiqué par le premier ministre hongrois, Viktor Orban, lui-même source d’inspiration pour les mouvements d’extrême droite à travers le monde. Un démocrate illibéral se plie au jeu de l’élection, tout en réduisant les libertés et en imposant une forme de contrôle sur la société. Trump est sans doute un démocrate illibéral, mais un fasciste, on n’en est pas là !
O. B. : Je suis d’accord. On peut parler de démocratie illibérale ou de régime autoritaire compétitif. Il reste un degré de compétition politique entre le Parti démocrate et le Parti républicain, mais les règles du jeu ne sont plus impartiales et honnêtes – le parti au pouvoir truque les élections pour maintenir une façade démocratique tout en s’assurant que les résultats des élections lui soient toujours favorables.
Pourquoi la question de la proximité du trumpisme avec l’idéologie fasciste se pose-t-elle de façon si pressante ?
M. L. : Ce débat sur la question du fascisme est né avant le surgissement du phénomène trumpien. En France, on a eu ce type d’interrogation avec le Front national [devenu Rassemblement national en 2018] ; en Italie, avec l’arrivée de Silvio Berlusconi au pouvoir [en 1994] ou la victoire de Giorgia Meloni [en 2022]. Nos démocraties sont profondément imprégnées d’antifascisme : l’apparition de phénomènes politiques semblant avoir un lien, ou en ayant un, avec le fascisme est donc interprétée comme un signe de leur affaiblissement.
Parce que la démocratie américaine est considérée comme un modèle et une source d’inspiration pour le reste des démocraties occidentales, l’émergence du phénomène Trump a légitimement relancé cette question dans un contexte d’augmentation du niveau de défiance politique et de montée des populismes dans la plupart des démocraties occidentales.
Si la question se pose de façon aussi aiguë, c’est aussi parce qu’un certain nombre de ces mouvements populistes – Vox en Espagne, Alternative für Deutschland en Allemagne, Fratelli d’Italia en Italie – sont « anti-antifascistes ». Le parti de Giorgia Meloni se distancie du régime fasciste, condamne les lois antisémites de 1938, mais il parle d’un passé révolu : il critique donc les antifascistes qui ne veulent pas oublier les crimes de Mussolini. Cet « anti-antifascisme » incite à poser la question du rapport au fascisme de ces entités politiques.
O. B. : Poser la question du fascisme de Trump permet de mesurer la gravité de la situation actuelle, mais aussi de ne pas considérer Trump comme un phénomène isolé, une anomalie dans l’histoire américaine. On ne peut expliquer son ascension au sein du système politique américain sans prendre en compte les bases sociales et les traditions politiques – y compris fascistes – dans lesquelles s’inscrit son mouvement. L’extrême droite a de profondes racines dans la société américaine : elle ne disparaîtra pas avec Trump. L’existence de toute une génération d’acteurs politiques comme le vice-président, J. D. Vance, qui prépare déjà « l’après-Trump », en est la preuve.
Source :
– (Le 03 mai 2025)
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com