
RFI – Les pêcheurs sénégalais, victimes collatérales de la lutte contre l’immigration clandestine en Mauritanie ? Alors que Nouakchott a entamé une vaste opération d’expulsions de migrants subsahariens en situation irrégulière depuis le début du mois de mars, les responsables de la pêche artisanale au Sénégal s’inquiètent et alertent sur une série d’arrestations de pêcheurs sénégalais qui travaillent dans le secteur en Mauritanie. La semaine dernière, les autorités sénégalaises s’étaient déjà indignées du traitement réservé aux Sénégalais lors de leur arrestation et expulsion par les autorités mauritaniennes. Reportage dans la ville de Saint Louis.
Assis sur des bancs face à la mer, devant des pêcheurs qui réparent leurs filets, ils sont cinq à parler des problèmes que rencontrent actuellement les pêcheurs en Mauritanie. Moussa Diene, membre du syndicat autonome des pêcheurs au Sénégal, raconte ce qu’il a vu à Nouakchott au début du mois
« Là-bas, les pêcheurs vivent un calvaire. Un pêcheur qui sort de chez lui pour aller se procurer de la nourriture à la boutique, ils t’amènent au poste, ils t’embarquent. Ils te demandent des sous », témoigne-t-il.
Mais quelques fois, l’argent n’est pas suffisant, comme le raconte Faly Seck, un pêcheur, qui a fui Nouakchott lundi après avoir été interpellé par la police mauritanienne. « Ils m’ont demandé si j’avais une carte de séjour. J’ai répondu : “J’ai pas de carte de séjour mais si vous m’indiquez où trouver cette carte j’y vais directement. Mais les Mauritaniens ont dit ouvertement qu’ils ont arrêté l’attribution de cartes de séjour. C’est le grand problème qu’on rencontre actuellement en Mauritanie.” »
Quitter la Mauritanie
Sans carte, celui qui est aussi président de la commission jeunesse de l’Union nationale des pêcheurs artisanaux du Sénégal (Unapas) a préféré quitter la Mauritanie au plus vite plutôt que de risquer une nouvelle arrestation. Mais il enrage fasse à cette exigence contradictoire des autorités mauritaniennes. Moussa Diene, du syndicat des pêcheurs, estime aussi : « Un pays souverain a le droit de rétablir ses lois, mais ils doivent respecter les personnes, les traiter normalement, demander un papier de séjour à un pêcheur qui est sous couvert d’un opérateur mauritanien et le refouler comme ça. C’est pas une bonne coopération, vraiment ce n’est pas bon ! »
Combien de pêcheurs sénégalais ont été arrêtés ou refoulés ? Aucun chiffre officiel ne circule, un rapport parlementaire faisait état la semaine dernière de « 400 sénégalais sans papiers détenus dans des conditions précaires en Mauritanie ». Dans l’immédiat, les pêcheurs sénégalais appellent les autorités à trancher au plus vite cette question de carte de séjour pour pouvoir retourner travailler sans crainte d’être arrêté ou expulsé.
Notre correspondante à Dakar, Léa-Lisa Westerhoff