La transformation numérique en Mauritanie : un chantier ambitieux aux contours flous

Le Quotidien de Nouakchott – La transformation numérique figure parmi les priorités affichées des autorités mauritaniennes. En janvier dernier, un projet de 4,3 millions de dollars, soutenu par l’Allemagne, a été lancé pour promouvoir ce processus. De plus, le gouvernement souhaite renforcer son partenariat avec la Chine dans ce domaine, une démarche illustrée par la rencontre entre le ministre de la Transformation numérique et de la Modernisation de l’administration, Ahmed Salem Bede Etvagha, et l’ambassadeur de Chine en Mauritanie, Zhang Zhongdong.

Si ces initiatives semblent traduire une volonté politique de modernisation, elles suscitent plusieurs interrogations. Quel est le véritable plan d’action du gouvernement ? Quels sont les résultats concrets obtenus jusqu’ici ? Le partenariat avec la Chine est-il la solution adaptée aux défis du numérique en Mauritanie ?

Un retard accablant dans le numérique

Les indicateurs internationaux montrent l’ampleur du défi. La Mauritanie est classée au 165e rang mondial dans l’indice de développement de l’e-gouvernement (EGDI) 2024 des Nations unies, avec un score de 0,3491 sur 1, nettement inférieur à la moyenne africaine (0,4247). En matière de développement des TIC, le pays obtient 55,5 sur 100, se positionnant au 21e rang africain sur 47 pays. Concernant la cybersécurité, la Mauritanie est reléguée dans la quatrième et dernière catégorie des pays ayant encore de grands efforts à fournir.

Ces chiffres témoignent d’un retard structurel majeur qui ne pourra être résorbé sans une stratégie claire et des investissements massifs. Or, à ce jour, les axes précis du plan de transformation numérique restent flous. Le gouvernement a adopté un « Agenda national de transformation numérique 2022-2025 », mais la mise en œuvre concrète de cette feuille de route demeure peu visible.

Un partenariat sino-mauritanien aux contours incertains

Le gouvernement semble miser sur la coopération avec la Chine pour combler son retard numérique. Certes, la Chine affiche des performances impressionnantes dans le domaine digital, avec un classement 35e mondial en EGDI et un score de 85,8 sur 100 dans l’indice de développement des TIC de l’UIT. Cependant, les modalités de cette coopération n’ont pas encore été définies. Aucun accord concret n’a été signé, et les discussions restent à un stade préliminaire.

Au-delà du simple transfert de technologie, la question cruciale reste celle de la souveraineté numérique. La Chine est connue pour son modèle de gouvernance digitale strict et centralisé, loin des standards de transparence et de protection des données que devrait viser un État soucieux d’un développement numérique inclusif et durable. Le risque d’une dépendance excessive aux infrastructures et solutions chinoises, sans capacité locale de développement, est réel.

Une présence ministérielle dans les forums, mais pour quels résultats ?

Le ministre Ahmed Salem Ould Bede a participé au Mobile World Congress à Barcelone, où il a rencontré des responsables de l’Afrexim Bank et de Huawei. Si ces rencontres peuvent être interprétées comme des opportunités, elles n’ont d’intérêt que si elles se traduisent par des actions concrètes en faveur du développement numérique en Mauritanie.

Le manque de transparence sur les avancées réelles reste un problème récurrent. Aucun bilan officiel n’a été publié sur la mise en œuvre de l’Agenda national de transformation numérique. De plus, les initiatives nationales semblent se limiter à des annonces de financement ou de coopération, sans véritable suivi des engagements pris.

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Source : Le Quotidien de Nouakchott (Mauritanie)

 

 

 

 

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