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The Conversation – Il y a 60 ans, Malcolm X était assassiné. Face à la perte de l’un des piliers du mouvement des droits civiques, l’Amérique noire est alors majoritairement en deuil. Un artiste de jazz talentueux Leon Thomas compose alors une chanson révolutionnaire. Méconnue en France, celle-ci exprime la douleur mêlée d’espoir des Afro-Américains, tout en défiant le système raciste et en comparant un musulman étiqueté « ennemi de l’État » à Jésus-Christ. Un hommage musical qui transcende le temps et continue de résonner aujourd’hui.
À la fin des années 1950, des musiciens de premier plan comme Charlie Parker, Charles Mingus et John Coltrane ont explicitement introduit la politique dans leur jazz, alors que le mouvement pour les droits civiques commençait à prendre de l’ampleur aux États-Unis. Comme le musicien Gilad Atzmon l’a souligné :
« Les Noirs américains réclamaient la liberté, et le jazz l’exprimait mieux que de simples mots. »
Cette tendance s’est poursuivie et intensifiée au cours des décennies suivantes, en particulier dans le free et le spiritual jazz. Ces sous-genres représentaient une bataille plus virulente pour la liberté politique.
Profondément beau
En 1969, le chanteur de jazz d’avant-garde Leon Thomas a composé « Malcolm’s gone » (en français « Malcolm est parti ») avec le géant du jazz spirituel Pharoah Sanders. Il s’agit d’un hommage d’une grande beauté au militant révolutionnaire américain des droits civiques, Malcolm X, qui a été assassiné en 1965.
La chanson figure sur le premier album solo de Leon Thomas, « Spirits Known and Unknown ».
Elle met en vedette Sanders (au saxophone ténor) et d’autres sommités du free jazz comme Cecil McBee (basse), Lonnie Liston Smith (claviers) et Roy Haynes (batterie).
Décédé en 1999, Leon Thomas est une figure souvent oubliée de la musique populaire. Il est remarquable pour son style vocal jazz unique, caractérisé par l’utilisation expérimentale du yodel et du scatting, ainsi que pour son envoûtante voix naturelle.
Lorsque les gens le connaissent, c’est surtout pour sa contribution aux enregistrements de grands noms du jazz et du rock tels que Randy Weston, Rahsaan Roland Kirk, Oliver Nelson et Carlos Santana. Pourtant, la portée de son œuvre solo et de sa contribution au jazz, en particulier dans le domaine de la vocalisation, est considérable.
Quelques secondes de silence
Sur « Malcolm’s gone », un morceau principalement instrumental, le premier vers de Leon Thomas est simplement « Malik El-Shabazz », le nom musulman supposé de Malcolm X au moment de sa mort.
Ces mots sont suivis de quelques secondes de silence, avant que le groupe ne commence à jouer une mélodie profondément mélancolique, l’équivalent sonore des émotions que l’on ressent à l’annonce du décès d’un être cher.
Leon Thomas recommence à chanter environ deux minutes plus tard avec les vers :
« Je sais qu’il est parti… mais il n’est pas oublié. »
« Je sais qu’il est mort pour me libérer… oui Malcolm est parti, mais il n’est pas oublié, il est mort pour me sauver, me rendre ma dignité. »
Lecturer of English. PhD Candidate in Afrofuturism and African Studies, University of the Western Cape
Source : The Conversation – (Le 20 février 2025)
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