Au Sénégal, le pouvoir traque les crimes financiers, l’opposition dénonce une justice aux ordres

Mis en place en septembre 2024, le Pool judiciaire financier est chargé de mener la lutte contre la corruption, au risque d’être accusé de chasse aux sorcières.

Le Monde  – La somme est imprimée à la une des journaux du Sénégal, martelée sur les ondes. Ce sont 125 milliards de francs CFA, soit 190 millions d’euros, qui seraient concernés par une affaire sur laquelle enquête le Pool judiciaire financier. L’investigation, déclenchée, selon le parquet, à la suite d’un rapport de la Cellule nationale de traitement des informations financières, chargée de surveiller les mouvements financiers suspects, porte sur des faits présumés de blanchiment de capitaux, d’escroquerie sur les deniers publics, de corruption, de trafic d’influence et d’abus de biens sociaux.

Au cœur du dossier, on retrouve cité Mouhamadou Ngom, plus connu sous le nom de Farba Ngom, député de l’Alliance pour la République, le parti au pouvoir il y a encore un an. Descendant d’une lignée de griots, il est devenu celui de l’ancien président Macky Sall, dont il est dit très proche. Dans sa région de Matam, c’est un homme puissant qui a su à résister à la vague électorale du parti Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), arrivé vainqueur aux derniers scrutins présidentiel et législatif.

Pour ses conseils et camarades, l’affaire est entendue : le nouveau pouvoir cherche à utiliser le bras judiciaire pour se débarrasser d’un opposant. Ils en veulent pour preuve qu’en novembre 2024, lors de la campagne pour les législatives, le premier ministre Ousmane Sonko accusait, sans le nommer, Farba Ngom de pratiques véreuses et assénait que « ce sera la dernière élection au Sénégal à laquelle il prendra part ». « Farba Ngom ne sait même pas de quoi il est soupçonné. Une instruction est-elle seulement ouverte ? Tout ce dont on dispose, ce sont des on-dit sur des rapports administratifs », rétorque son avocat, El Hadj Diouf.

Levées d’immunités parlementaires

Le 24 janvier, sur demande du ministre de la justice, l’Assemblée nationale, dominée par le Pastef, a voté la levée de l’immunité parlementaire de Farba Ngom. Les élus de l’Alliance pour la République ont boycotté le vote et claqué la porte de l’hémicycle. Depuis, la tension est palpable dans la classe politique. La formation Nouvelle responsabilité a annoncé, mardi 4 février, avoir appris l’existence d’une demande de levée de l’immunité parlementaire de son leader, l’ancien premier ministre et rival malheureux de Bassirou Diomaye Faye à la présidentielle, Amadou Ba.

La presse sénégalaise a également publié des articles selon lesquels l’ex-ministre de l’industrie, Moustapha Diop, pourrait lui aussi voir son immunité levée après que son nom soit apparu dans le dossier d’une inspectrice du Trésor, placée sous mandat de dépôt pour des détournements de fonds, ayant assuré aux enquêteurs lui avoir versé de l’argent.

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Source : Le Monde – (Le 06 février 2025)

 

 

 

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