La Russie livre des dizaines de chars et de blindés au Mali et réorganise son dispositif militaire en Afrique

Une centaine de véhicules sont arrivés le 17 janvier depuis la Guinée, au moment où le ministère russe de la défense veut accélérer le remplacement du groupe Wagner par Africa Corps dans le pays. « Le Monde » a remonté la trace de ce convoi.

Le Monde – La colonne s’étire à perte de vue. Des dizaines de camions transportant des chars légers, des blindés ou encore des ambulances militaires défilent sur la vidéo d’une trentaine de minutes, tournée à Sébénikoro, dans les faubourgs sud-ouest de Bamako, le 17 janvier. « Ça va jusqu’à la Guinée ! », dont la frontière se situe à une centaine de kilomètres, s’enthousiasme même l’homme qui parle sur la vidéo, Boubou Mabel Diawara, un influenceur malien bien connu pour son soutien à la junte dirigée par le général Assimi Goïta.

S’il ne remonte pas réellement jusqu’à la frontière, ce convoi de matériel russe livré au Mali est inédit par son importance. Jamais, depuis que les militaires putschistes au pouvoir à Bamako se sont liés à Moscou, en 2021, une telle livraison de véhicules n’avait été effectuée. Des hélicoptères Mil de combat et de transport de troupe, ainsi que des avions de chasse Soukhoï ou L-39, avaient déjà été livrés aux autorités maliennes début 2023, mais pas autant de véhicules militaires.

Cet envoi de matériel intervient en pleine réorganisation du dispositif russe en Afrique. Depuis la chute de Bachar Al-Assad, le 8 décembre 2024, la Russie est en position précaire en Syrie, pays qui lui servait de hub logistique pour projeter ses moyens sur le continent, et est contrainte de trouver des solutions de remplacement, notamment en Libye.

Sur la vidéo analysée par la cellule enquête vidéo du Monde sont visibles plus d’une centaine d’engins, dont des blindés de combat BMP-3, des blindés de transport de troupes BTR-82 ou encore des blindés sanitaires « Linza ». Sur certains véhicules sont inscrits des mots en cyrillique : on peut lire « service d’évacuation » à l’arrière d’un camion. D’autres comportent des marquages blancs habituellement utilisés par l’armée russe pour le transport ferroviaire.

Le « Adler » et le « Siyanie Severa » à Conakry

Selon les informations du Monde, ces véhicules militaires russes ont été débarqués au port de Conakry, en Guinée, avant de former le convoi qui a emprunté la route jusqu’à Siguiri et la frontière avec le Mali. Ils ont probablement été transportés à bord de deux navires russes. Le premier, le Adler, appartient à la compagnie M Leasing LLC, placée sous sanctions américaines et européennes pour son rôle dans la logistique militaire de Moscou.

Cette société est notamment soupçonnée d’avoir livré des armes de Corée du Nord en Russie, selon le secrétariat d’Etat à l’économie suisse. Le 14 décembre 2024, le Adler a quitté le port de Mourmansk, dans le nord de la Russie, pour mettre le cap sur Conakry.

Le 21 décembre, un second cargo battant pavillon russe, le Siyanie Severa, a aussi quitté Mourmansk pour voguer vers la Guinée. Ce navire appartient à la compagnie russe OJSC Northern Shipping Company, également sous sanctions américaines pour avoir transporté du materiel militaire de son pays.

D’après les relevés du port de Conakry, le Adler est arrivé le 8 janvier et reparti le 12. A son bord, 1 182 tonnes de « marchandises ». Le Siyanie Severa est, lui, arrivé le 11 janvier avec 834 tonnes de chargement. Sur une image satellite Airbus que Le Monde a pu consulter (mais ne peut publier), ce second cargo est encore visible à quai le 15 janvier. De Conakry, il faut ensuite compter deux jours de route, avec un tel convoi de camions, pour arriver à la frontière avec le Mali, via Siguiri.

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Source : Le Monde

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