A la recherche de la capitale perdue de l’empire du Mali

Depuis l’époque coloniale, de nombreuses théories ont été échafaudées concernant le lieu où siégeait le pouvoir de Soundiata Keïta et de ses successeurs. Au Mali ? Au Sénégal ? En Guinée ? Cette quête, si elle n’a pas encore porté ses fruits, a néanmoins permis de faire avancer les recherches sur l’histoire médiévale africaine.

Le Monde – Le célèbre voyageur maghrébin Ibn Battuta assure qu’on y trouvait une mosquée, un palais, des entrepôts, un cimetière musulman et un quartier pour les étrangers. On pense aussi qu’on pouvait y voir fonctionner des fours à poterie, qu’on s’y échangeait de la céramique, des sacs de cauris, des lingots d’or, des barres de sel… Le commerce la reliait à Sijilmassa (Maroc) et au Caire mais aussi, on l’étudie depuis peu, au sud du Sahel. En somme, c’était une ville médiévale animée.

Mais cette cité, la capitale de l’empire malien fondé au XIIIe siècle et qui connut son apogée au XIVe avant de s’éteindre au début du XVIIe, est aujourd’hui introuvable. Le bâti de la ville était fait de banco, un mélange de terre et de paille qui s’érode vite faute d’entretien. « Au stade actuel des connaissances, je ne peux pas déterminer l’emplacement de la capitale de l’empire du Mali », concède l’archéologue malien Mamadou Cissé.

L’empire (ou sultanat) qui s’étendait sur plusieurs pays actuels d’Afrique de l’Ouest passionne les chercheurs. Contre les minimisations de l’histoire africaine, sa grandeur est une source de fierté. Son dirigeant du XIVe siècle, Mansa Moussa, est même devenu un objet de pop culture. Des vidéos virales sur Internet comparent sa richesse à celle de Jeff Bezos et concluent qu’il fut l’homme le plus riche que l’histoire ait connu.

Un pouvoir itinérant ?

 

Cette fascination a provoqué une intense enquête collective pour trouver sa capitale. Des pans entiers de la littérature coloniale sur le Mali sont consacrés à ce seul sujet. L’historien français Hadrien Collet parle même d’« obsession ». Depuis cette époque, les savants croisent les écrits arabes et les traditions orales des griots pour identifier la région où pourrait se cacher la ville disparue. Ils comptent les jours passés à dos de dromadaire de tel auteur maghrébin, les reportent sur des cartes de la région et les comparent aux récits des griots qui identifient dans tel village les descendants d’une lignée qu’on dit royale.

De nombreuses théories ont été échafaudées. L’anthropologue français Claude Meillassoux est allé jusqu’à proposer l’est aurifère du Sénégal. Mais un nom s’était imposé ces dernières décennies avec une certaine réussite : Niani, en Guinée. Les enfants du pays apprennent encore à l’école que ce village accueillit la capitale de l’empire du Mali.

« A l’indépendance, les Républiques malienne et guinéenne ont voulu établir un lien avec la mémoire prestigieuse du sultanat », rappelle l’historien malien Doulaye Konaté. Modibo Keïta, le premier président du Mali (1960-1968), laissait raconter qu’il était un descendant de Soundiata Keïta, présenté par la tradition comme le fondateur de l’empire. Le dirigeant guinéen Sékou Touré (1958-1984), lui, aidé par la Pologne socialiste, fit procéder à des fouilles archéologiques à Niani. Le grand historien Djibril Tamsir Niane était de l’expédition ; dans son classique, Soundjata ou l’Epopée mandingue, il indique lui aussi, en se basant sur les récits des griots, la région de Niani comme le cœur de l’empire.

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 (Dakar, correspondance)

Source : Le Monde

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