France – Aida, 12 ans, retenue à Orly : « la zone d’attente, c’est inhumain »

Info MigrantsAprès cinq jours de maintien dans la zone d’attente d’Orly, Aida*, une jeune fille de 12 ans, en a été libérée mercredi. Partie du Sénégal où elle est née, elle devait rejoindre son père et ses frères et sœurs, de nationalité française, en France. Son histoire met à nouveau en lumière les conditions de rétention de mineurs en France, « traumatisantes » selon les associations et avocats engagés sur ces questions.

 

Aida*, une jeune fille de 12 ans devant rejoindre sa famille française a été placée dans la zone d’attente d’Orly samedi 19 octobre, en vue d’un éloignement vers le Sénégal. Elle vient juste d’en être libérée, ce mercredi 23 octobre. Le jour même où elle devait reprendre sa scolarité en France.

La jeune fille, née au Sénégal en 2012, était inscrite sur le registre des Français établis à l’étranger hors de France depuis 2014, et détentrice d’un passeport depuis janvier 2020. Elle devait rejoindre son père à son domicile de Montreuil (Seine-Saint-Denis) où résident déjà ses sœurs, tous de nationalité française.

Mais à son arrivée à l’aéroport, rien ne se passe comme prévu : son passeport lui est retiré. La jeune fille se voit refuser l’entrée sur le territoire français. Elle est immédiatement retenue en zone d’attente : ces locaux, situés aux frontières françaises (ports, aéroports, gares internationales) sont dédiés aux étrangers ne remplissant pas les conditions d’entrée en France.

Le placement en zone d’attente a rendu la jeune fille « très angoissée », déplore Samy Djemaoun, son avocat. « Elle commençait à avoir des boutons sur le visage. Même pour un adulte, la zone d’attente, c’est inhumain. Alors pour un enfant… »

Tous les matins durant cinq jours Aida devait quitter l’hôtel où dorment les étrangers dans son cas, pour rejoindre à 6 heures du matin la zone d’attente. Elle devait y rester jusqu’à 21 heures le soir. « L’espace « enfants » de la zone d’attente, c’est trois mètres carré, séparée de la zone adultes par un simple paravent. Elle ne pouvait pas sortir dans la cour, car c’est réservé aux adultes », dénonce Samy Djemaoun. Les repas ? « Chips, eau, compote ». Pendant près de cinq jours, « elle est restée toute seule, accompagnée seulement par une nounou mandatée par la compagnie aérienne », décrit-il encore.

Procédure irrégulière : « soit tout le monde est Français, soit personne ne l’est ! »

 

Pourquoi ce retrait de passeport et cette rétention ? « Elle a été placée en zone d’attente parce qu’on lui a retiré son passeport au motif qu’il y a eu un retrait du certificat de nationalité », explique Me Samy Djemaoun.

En effet, en juin 2020, l’administration lui a refusé la délivrance d’un certificat de nationalité, « au motif que son grand-père paternel, qui avait eu la nationalité française et par qui se fait la filiation, n’avait pas placé sa résidence en France », explique Me Samy Djemaoun. « Sauf que le père de ma cliente, ainsi que ses frères et sœurs, sont sans aucune remise en question de leur nationalité. Ils ont toujours un certificat de nationalité. Dans une même fratrie, soit tout le monde est Français, soit personne ne l’est ! »

Dans son ordonnance du 23 octobre qui libère Aida* de la zone d’attente, le juge des référés du tribunal de Melun indique que la demande de restitution du passeport de la jeune fille, suite logique du refus de délivrer un certificat de nationalité, date d’il y a trois ans et « n’a pas été régulièrement notifiée » à la famille. Ce qui empêche un droit au recours. La procédure, irrégulière, n’était donc « pas opposable lors de son arrivée en France le 19 octobre ».

Depuis le début de l’été, « on a rarement suivi autant de mineurs en zones d’attente’

 

Le maintien en rétention d’enfants isolés comme Aida « sont rares, mais ces derniers temps, c’est arrivé plus que d’habitude », estime Samy Djemaoun. L’avocat a défendu quatre dossiers similaires, depuis août, rien que sur la zone d’Orly.

« Avant-hier encore il y avait deux mineurs à Orly, dont un jeune Sahraoui qui a passé vingt jours dans la zone d’attente… Jusqu’à arriver à la fin du délai légal d’enfermement », complète Charlène Cuartero Saez, coordinatrice des missions dans les zones d’attentes pour l’Anafé. « Ces derniers temps, ça bat son plein », confirme-t-elle. « Et pas qu’à Orly : on a suivi des situations similaires de mineurs isolés et enfermés à Roissy, Marseille, Lyon, un peu partout. Bien sûr l’enfermement des enfants en zone d’attente n’est pas nouveau, mais depuis le début de l’été, on a rarement suivi autant de mineurs – sans que l’on sache expliquer pourquoi. Vu les conditions dans ces zones d’attente, c’est effrayant ».

En septembre, c’est une enfant âgée de seulement 10 ans, Aya, qui avait été bloquée quatre jours à Orly, avant de passer devant la juge. Au cours d’une audience chaotique, lors de laquelle la mère d’Aya a fait une crise d’angoisse et un malaise, la juge avait décidé de maintenir l’enfant en zone d’attente. La petite-fille n’a été libérée que deux jours plus tard par la police aux frontières.

L’Anafé avait épinglé des « conditions traumatisantes » pour l’enfant : « présence constante de policiers parfois armés, grillages, caméras, difficultés pour s’alimenter ou encore pour se reposer ».

 

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Maïa Courtois

 

 

 

Source : Info Migrants (France)

 

 

 

 

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