Inondations dans la Vallée : Le lit du désastre

Après Bakel, Matam, Podor et Saint-Louis dans la psychose

Le Quotidien – C’est le sale temps dans les villages situés à l’Est du pays. Les populations des villages de la commune de Ballou, dans le département de Bakel, vivent, depuis presque une semaine, dans la désolation provoquée par les lâchers du barrage de Manantali qui ont causé de fortes inondations. Le fleuve Sénégal est sorti de son lit pour envahir les champs et les maisons, poussant les populations à se réfugier sur les terrasses ou dans les hautes terres du Diéri. Si les premières aides de l’Etat sont arrivées, c’est une goutte d’eau dans ce fleuve de besoins. Mais, la chaîne de solidarité locale mise en place par les ressortissants de la zone éparpillés entre Dakar et la diaspora tente de pallier les défaillances de l’Etat.

Dans le nu de la vie… Depuis 6 jours, les maisons des habitants des villages d’Aroundou, Yafera, Golmy, Balou et d’autres localités, situées dans le département de Bakel et le long du fleuve Sénégal complètement déchaîné, sont sous les eaux. «Pour se déplacer, seules les pirogues sont utilisées. Quel que soit l’endroit où l’on veut aller. C’est vraiment difficile», explique l’édile de Balou, Cheikhna Camara.

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Ces villages situés à la lisière du Sénégal, à proximité de la Mauritanie, sont une carte postale de la réussite des enfants du coin qui ont émigré très tôt vers la France. Ce sont de belles bâtisses, des infrastructures de dernière génération construites à la sueur et à la solidarité des résidents qui n’ont rien à envier aux populations citadines. Depuis presque une semaine, c’est l’Apocalypse. Les populations sinistrées sont actuellement déplacées au niveau du Dieri, à proximité des champs, pour échapper aux eaux.

D’autres sont nichées sur les terrasses. Figées dans ce moment de détresse continue, observant du haut de leurs maisons, le chaos se propager, elles attendent un appui conséquent de l’Etat, qui traîne les pieds pour déclencher le Plan Orsec. «Il faut un minimum d’accompagnement pour nous permettre de survivre. Sinon, d’autres conséquences pourraient s’ajouter à la situation», alerte Mamadou Diabe Cissokho, habitant à Aroundou. Il y a surtout la probable survenance de maladies diarrhéiques. «Malheureusement, nous n’avons pas encore suffisamment de tentes pour ériger des abris de fortune. C’est vraiment difficile, ce qui se passe dans la commune», ajoute-t-il.

En venant de Dakar, tout s’arrête à Bakel qui est encore épargnée par la montée du fleuve. Le reste ? Tous les autres villages sont devenus lacustres. Les réseaux de communication sont coupés, prolongeant l’isolement des habitants. «Se déplacer dans la contrée est devenu un gros risque. Nous utilisons les pirogues pour se déplacer, raconte M. Cissokho. Il faut emprunter les pirogues pour aller jusqu’à Balou pour pouvoir trouver un véhicule pour rallier Bakel ou Kidira. C’est non seulement éreintant, mais trop risqué. Je suis chauffeur de formation et c’est moi qui conduis l’horaire du village. Je suis obligé de me garer à l’entrée de Balou, dans un endroit non inondé, pour attendre les clients. Eux aussi sont obligés de prendre les pirogues pour faire la distance. Et c’est de là que nous embarquons pour Kidira ou Bakel. Car c’est seulement à ces niveaux que nous pouvons trouver de la nourriture ou des denrées nécessaires à la survie des populations déboussolées. C’est vraiment dur», témoigne-t-il.

Aujourd’hui, ils vivent sous les eaux, mais n’ont plus accès à l’eau potable. «Il y a un manque d’eau potable partout. L’eau des ruissellements s’est mélangée à l’eau des puits et des robinets. Elle est inutilisable actuellement. L’eau commence même à devenir malodorante», alerte Mamadou Diabe Cissokho. Dans certains endroits, les populations ont voulu recourir aux puits désaffectés depuis plusieurs années à cause de la pénurie du liquide précieux. «Actuellement, ce sont des sachets d’eau qui sont distribués aux populations sinistrées. Et cela, pas en quantité suffisante. Tout le monde n’en a pas en quantité. Et c’est pourquoi certains besoins, comme se laver ou faire le linge, sont renvoyés à plus tard. L’urgence demeure la boisson et la cuisson», ajoute-t-il.

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Quid de l’électricité ? «Il n’y en a plus», ont témoigné les sinistrés. Depuis le début des inondations, le courant est coupé pour des raisons de sécurité. «Ce qui fait qu’au soir, c’est vraiment la catastrophe. Il va falloir batailler avec les eaux et l’obscurité.

Les populations sont fatiguées», enchaîne M. Camara. Le 3ème problème est évoqué par les populations. Il s’agit du réseau téléphonique qui est aussi hors service, déconnectant totalement la zone du reste du pays et de la diaspora où vit une grande partie des ressortissants de ces villages sinistrés. «Le signal a disparu. Passer un appel ou se connecter à internet n’est plus à l’ordre du jour. Sans occulter le manque de nourriture et de soins», continue à peindre M. Cissokho.

La réaction de l’Etat décriée 

Aujourd’hui, il faut penser à créer des hôpitaux mobiles, car la structure sanitaire de Yafera est aussi hors service après qu’elle a été envahie par les eaux. «Il n’y a aucun accès et les populations ont besoin de se soigner. Surtout dans cette situation où l’eau des ruissellements est mélangée avec celle des puits et autres points d’eau. Les populations de ces contrées sont vraiment fatiguées. L’Etat doit diligenter ses interventions pendant qu’il est encore temps», supplie un habitant de Yaféra.

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AD, une autre sinistrée, enchaîne : «Malheureusement, la réaction de l’Etat laisse à désirer. Comment peut-on attendre jusqu’au 3ème jour pour vouloir réagir ? Pendant ce temps, les eaux continuent leur furie dévastatrice. C’est désolant. Pis encore, le ministre a promis de l’aide aux sinistrés. Cette aide est certes parvenue, mais elle est insignifiante vu le besoin et l’urgence. Dans cette partie du pays, précise AD, c’est tout le monde qui est impacté. Personne n’a été épargné par la crue. Même ceux qui habitent en hauteur sont touchés, car ils ne peuvent pas descendre pour vaquer à leurs occupations. Certes l’eau ne les a pas atteints, mais ils sont prisonniers là où ils sont.»

De l’eau et de la nourriture en urgence

Actuellement, les populations sont réellement fatiguées, rappelle Sohané Barry. «Elles se battent jour et nuit contre les eaux, seules, sans aucune assistance», s’en désole-t-il. Elles attendent l’acheminement des motopompes pour accélérer le processus de pompage. «Nous faisons face aux problèmes d’eau potable et de nourriture. Les eaux des ruissellements sont mélangées aux eaux des puits et des forages. Ce qui fait qu’il n’y a plus d’eau potable.

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Abdoulaye FALL

 

 

 

Source : Le Quotidien (Sénégal)

 

 

 

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