Dakar, la croissance urbaine participe fortement à intensifier les inondations

The Conversation  Depuis plus de deux décennies, les inondations urbaines surviennent régulièrement dans plusieurs quartiers de Dakar. Le plan ORSEC, mécanisme d’urgence visant la coordination et la gestion des catastrophes au Sénégal, a ainsi été déclenché en 2005, 2009, 2012, 2019, 2020, 2021 et 2022.

Ces épisodes de plus en plus fréquents ne sont pas sans conséquences : les inondations de 2005, par exemple, ont généré des épidémies de choléra. En 2009, les dommages et pertes liés aux inondations ont été évalués à 35,5 milliards de franc CFA.

Quant à celles du 26 août 2012, elles ont lourdement affecté les populations et entraîné six morts à Dakar, treize sur l’ensemble du pays. Ces inondations ont également des conséquences sanitaires (épidémies de choléra, paludisme…) en raison de la stagnation des eaux, plusieurs mois après la fin de l’hivernage.



Dakar, une croissance urbaine rapide

 

Pour revenir aux origines du phénomène, rappelons que Dakar a connu un étalement urbain croissant, avec une accélération notable à partir de la sécheresse des années 70-80. Celle-ci a été l’un des principaux facteurs d’exode rural et de migration vers la capitale.

Actuellement, la capitale sénégalaise concentre sur moins de 0,3 % de la superficie du pays près de 25 % de la population nationale et 50 % de la population urbaine.

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D’ouest en est, les villes de Dakar, Pikine, Guédiawaye, Keur Massar et Rufisque forment ainsi un continuum urbain très imperméabilisé et marqué par une forte densité de population : plus de 7 000 habitants au kilomètre carré (km2), contre une moyenne nationale de 92 habitants/km2, selon le dernier recensement. Cette forme d’urbanisation, très gourmande de surface, s’étend rapidement dans l’espace avec un habitat principalement horizontal.

 

Extension spatiale de l’urbanisation à Dakar de 1921 à 2018

Infrastructures obsolètes ou insuffisantes

 

Dans le même temps, les infrastructures de drainage des eaux pluviales ont très peu évolué. La prise en compte réelle des problèmes de drainage des eaux de pluie a réellement démarré à la suite des inondations de 2012, avec l’exécution du projet de gestion des eaux pluviales et d’adaptation au changement climatique (PROGEP 1). Il visait la mise en place de mesures structurelles (constructions de canaux de drainage et bassins de rétention, ouvrages de rejets en mer) et non structurelles (amélioration de la gouvernance, communication, sensibilisation et intégration des populations dans la gestion du risque) pour libérer certaines zones de Pikine et Guédiawaye des inondations

Nombre de secteurs sont par ailleurs encore sous-équipés pour le drainage, malgré leur urbanisation massive. Ceci a motivé le lancement pour 2021-2026 d’un prolongement du projet avec PROGEP 2, centré sur les zones périurbaines, notamment au niveau de Keur Massar et ses environs. Sa mission était de renforcer les infrastructures de drainage tout en améliorant les capacités de planification et de gestion intégrée des inondations urbaines.

L’extension urbaine se poursuit désormais vers Thiès à l’Est et le département de Mbour au Sud, facilité par la densification du réseau d’axes routier. Ce triangle stratégique Dakar-Thiès-Mbour (appelé le grand Dakar), qui a déjà commencé à accueillir des aménagements structurants (aéroport international Blaise Diagne, prolongement de l’autoroute à péage, ville nouvelle de Diamniadio), y présage déjà une densification de l’urbanisation dans les prochaines décennies.

Des sols urbains imperméables

 

À Dakar, les sols sont majoritairement sableux et très filtrants, et des mesures d’infiltration ont montré que le ruissellement était négligeable sur ces sols. Par ailleurs, des mesures de pluie et d’écoulement réalisées à Dakar dans les années 90 ont révélé que les écoulements étaient directement liés au degré d’urbanisation des zones étudiées, ce qui est cohérent avec le fait que les sols naturels sont très perméables.

En d’autres termes, la part de pluies qui ruissellent en surface est proportionnelle aux surfaces urbanisées de la zone considérée. Cette hypothèse, établie sur un bassin test, a été généralisée sur toute la presqu’île. Ceci indique que la progression de l’écoulement, en volume et en débit, est directement égale à l’évolution du degré d’urbanisation.

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Hydrologue, Institut de recherche pour le développement (IRD)

Géographe-hydrologue, spécialité inondations urbaines, Institut de recherche pour le développement (IRD)

 

 

 

 

Source : The Conversation 

 

 

 

 

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