rosse déception, mardi 9 juillet, au camping de Boussac-Bourg (Creuse). Retransmise sur grand écran, la défaite de l’équipe de France de football contre l’Espagne en demi-finale de l’Euro (1-2) a chagriné bon nombre des jeunes participants du camp « foot et prière » organisé sur place. « Il a fallu expliquer à certains qu’on ne peut pas toujours gagner dans la vie », rapporte le père Marie-Debrice Tiomela, maître d’œuvre de ce stage mêlant pratiques sportive et religieuse. – G
Vingt-quatre ados et préados âgés de 11 à 14 ans – catholiques pratiquants pour les deux tiers – ont alterné tacles et génuflexions pendant une semaine en mode patronage. Au programme : offices sous la tente, veillées devant les matchs de l’Euro, minichampionnat à quatre équipes – baptisées par les stagiaires eux-mêmes (Les Gitanos, le FC Messe…) et placées sous l’égide de saints patrons (Don Bosco, Jean Paul II…) et du respect des règles du football.
En la matière, le père Tiomela connaît son sujet, lui qui, chaque dimanche, sitôt la messe célébrée, troque sa soutane pour un maillot d’arbitre. L’homme de Dieu, âgé de 42 ans, manie le sifflet depuis décembre 2023. Le club de football de Felletin (Creuse), la commune où il officie à l’année en tant que curé et vicaire de la paroisse environnante, manquait d’arbitres au regard des exigences fédérales. Le prêtre avait alors proposé ses services, avant de réussir l’examen proposé par le district de la Creuse. « Je me suis dit qu’arbitrer serait un bon moyen de rencontrer des gens que je ne verrais jamais dans mon église le dimanche, explique-t-il. C’est à nous, religieux, d’aller vers nos semblables, car on ne vient plus à l’église spontanément, aujourd’hui. »
Passer du ciboire au ballon rond relève parfois du sprint dans un département rural où chaque trajet se compte en demi-heures plutôt qu’en kilomètres. Célébrer une première messe à 9 h 30, puis une seconde deux heures plus tard à 20 kilomètres de là, avant d’aller diriger, dans le canton voisin, un match de 4e division départementale dont le coup d’envoi est prévu à 15 heures, suppose de ne pas traîner en chemin.
Bouc émissaire
Souvent, le « padre » arrive au stade en sandales et col blanc. « Je ne me cache pas, les joueurs savent que je suis prêtre, et cela ne change pas grand-chose à nos relations une fois le match commencé : ceux qui ont la foi vont peut-être faire preuve de mansuétude à mon égard, mais ceux qui sont contre les curés en temps normal vont continuer à l’être sur le terrain », relativise cet ancien aumônier, arrivé en France en 2004 par le biais d’une fraternité missionnaire.
Sans surprise, Marie-Debrice Tiomela a pu vérifier in situ que le rôle d’arbitre s’apparente souvent à celui de bouc émissaire. « Je connais le foot, je savais à quoi m’attendre, poursuit-il. Les joueurs et les dirigeants ne sont jamais contents. Quand rien ne va, c’est toujours de la faute de l’arbitre, et ce reproche est d’autant plus prégnant que les divisions sont de bas niveau. Les joueurs transfèrent sur le terrain leurs frustrations de la semaine. Ce n’est pas une raison, de mon côté, pour être laxiste. »