La cherté du coût de la vie à Dakar vue par les expatriés

 BBC Afrique – L’inflation touche de nombreux pays dans le monde.

En Afrique, le Sénégal se retrouve parmi les pays où le coût de la vie devient de plus en plus cher, avec les prix des denrées de premières nécessités qui continuent de grimper. Ce qui déteint sur le quotidien des populations.

Dakar est donc devenue la ville où la cherté de la vie est fréquemment abordée dans les débats. Les prix du loyer, de l’électricité, des denrées alimentaires… explosent. Les mesures d’encadrement de la situation ne donnent presque rien, parce que ne sont pas toujours appliquées.

« Vivre, non. C’est compliqué. On survit à Dakar », confie à BBC Afrique Yolaine Etouke, Camerounaise, Etudiante/journaliste qui vit à Dieuppeul au cœur de Dakar.

Les expatriés ne sont pas épargnés

 

Crédit photo, Yolaine Etouke

Légende image, Yolaine Etouke

Le Sénégal est un beau pays, Dakar est une belle ville, reconnaissent des expatriés interrogés par BBC Afrique. Au nombre de ces étrangers, des étudiants qui ont quitté leur pays pour poursuivre leurs études dans le pays de Léopold Sedar Senghor.

Il faisait relativement bon vivre à Dakar dans un passé récent, admettent-ils tous. Mais depuis quelques années, les choses se compliquent avec une cherté de la vie que les quelques 4 millions d’habitants de la capitale sénégalaise, y compris les étrangers, arrivent difficilement à supporter.

« Au début, on entend des gens dire que les étrangers sont mieux lotis et ils font bien face à la vie chère. Mais je vous dis que c’est faux. Etrangers ou Sénégalais, nous sommes tous dans le même bateau », indique Sarah, Gabonaise, étudiante en management à Dakar.

Pour elle, les contributions envoyées par les parents depuis son pays d’origine, qui, entre-temps couvrent ses besoins, n’arrivent plus à faire la moitié du mois. Elle est obligée de faire de petits boulots en plus pour « arrondir les angles » comme elle le dit.

« Il m’arrive de faire le ménage pour des Sénégalais pour tenir jusqu’à la fin du mois », ajoute-t-elle.

Loyers inaccessibles

 

Crédit photo, Seyllou

Le logement reste la principale préoccupation des habitants à Dakar. Les coûts des loyers reviennent excessivement chers et, visiblement, la situation n’est pas près de changer, malgré les dispositions prises par les autorités sénégalaises.

Pour Yolaine Etouke, le coût de la vie a considérablement augmenté depuis son arrivée à Dakar en 2020. « Même s’il y a eu cette réduction de 15% au niveau des loyers, de nombreux bailleurs dont le mien, sont revenus sur les anciens prix », regrette-elle.

Yolaine vit à Dakar dans un studio qu’elle paie à 150.000 FCFA le mois (254$ US). Un prix qu’elle trouve excessivement cher. « Ce que je paie ici à Dakar pour un studio, à Doula ou Yaoundé, on trouve ça à 50 ou 60.000 FCFA maxi (101$ US). Les 150.000 FCFA là, c’est pour avoir toute une villa pour moi seule chez moi au Cameroun », explique-t-elle. Et de préciser que c’est dans un quartier huppé de Douala.

On a l’impression, renchérit Sarah qui partage deux chambres salon avec son frère et sa sœur, qu’on vit dans une ville européenne ici. « Payer 300.000 FCFA pour notre appartement, c’est trop cher par rapport à chez moi au Gabon », souligne-t-elle.

Le logement est aussi abordable à Cotonou qu’à Lomé où un studio qu’on paie à Dakar à 150.000 FCFA peut être trouvé à 45 ou 50.000 FCFA avec toutes les commodités, selon Donan, journaliste béninois qui vit dans la capitale sénégalaise depuis environ 10 ans.

Un haut fonctionnaire du système des Nations Unies qui habite la capitale, interrogé par la BBC, reconnaît aussi cette cherté de la vie, surtout en ce qui concerne le logement. Il soulève la nécessité pour l’Etat de faire respecter les mesures prises récemment pour réguler le secteur.

« J’ai fait beaucoup de capitales africaines. Ce que je vois ici m’interpelle. Mes collègues et moi discutons souvent du prix excessivement élevé du logement à Dakar. Cela pénalise les ménages modestes », déclare-t-il.

Surenchère

Pour ce haut fonctionnaire, certains ont raison de penser que la vie chère ne touche pas les étrangers. Puisque certains bailleurs préfèrent laisser leur appartement aux étrangers qu’ils estiment des « bons payeurs », plutôt qu’à leurs frères sénégalais qu’ils traitent de « mauvais payeurs ».

« Ce sont toutes ces considérations qui nous mettent dans la situation dans laquelle nous sommes aujourd’hui. Certains viennent faire croire à Dakar que leur pays est un paradis sur terre », renchérit Yolaine qui souligne que c’est surtout des étudiants dont les parents occupent de hautes fonctions dans leur pays d’origine, qui n’hésitent pas à prendre des appartements coûteux à Dakar « dès les premiers instants que les bailleurs leur donnent le prix ».

Ces étudiants, poursuit-elle, peuvent verser la somme d’une année de loyer pour un studio à 150.000 FCFA. Les bailleurs n’en demandent pas mieux. « Ils savent qu’il y aura toujours ces personnes nées avec la cuillère d’or dans la bouche qui vont prendre leur appartement si nous autres avons des difficultés à les payer ».

Flambée des prix des denrées

Là aussi, c’est un combat que les étrangers, surtout les étudiants, livrent avec le prix des denrées alimentaires. « Si tu ne veux pas manger du riz du lundi à dimanche et que tu veux chercher quelque chose venant du plat de chez toi, il faut t’attendre à casser ta tirelire, parce que c’est Dakar ici », ironise Sarah.

Et Yolaine qui dit ne pas comprendre comment les prix sont fixés sur le marché, d’ajouter : « Vous pouvez acheter un kilo de viande à 3.800 FCFA aujourd’hui et le retrouver le jour d’après à 4.800 FCFA ».

Il y a deux ans, par exemple, le kilo d’oignons était à 500 FCFA. Aujourd’hui, on se retrouve avec le même kilo d’oignons à 1.300 FCFA, selon elle.

« Il faut reconnaître qu’il y a une exagération dans les prix parfois au niveau des commerçants», fait remarquer Donan qui souligne par ailleurs que le kilo du poulet de chair qu’on trouve à 5.000 FCFA à Dakar se vend à moins de 3.000 FCFA à Cotonou ou à Lomé.

Dans la capitale sénégalaise, il faut « avoir plusieurs cordes à son arc » comme le dit Yolaine pour pouvoir s’en sortir. « Les petits boulots que je fais ici et là, en plus de mon travail, me permettent de joindre les deux bouts », ajoute-t-elle.

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Isidore Kowounou

BBC Afrique

Source : BBC Afrique (Royaume-Uni)

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