Mauritanie – Baissez la dot… Faites des enfants… !

En dépit de son étendue territoriale considérable et de ses ressources naturelles abondantes, la Mauritanie est confrontée à des défis majeurs dans les domaines du développement économique, politique et social.

Le pays compte une population estimée à environ 4,5 millions d’habitants, un chiffre qui semble relativement modeste compte tenu de sa superficie dépassant le million de kilomètres carrés. Bien que la jeunesse de la population offre un potentiel démographique, cela exige des investissements substantiels dans les secteurs de l’éducation et de la formation.

La croissance démographique de la Mauritanie est relativement lente, et les taux de natalité sont modérés, malgré une croissance démographique positive depuis 1960, selon les données de la Banque Mondiale. En 2021 et 2022, le taux de natalité oscillait entre 32 et 33 naissances pour 1000 habitants. Il est important de noter que ces variations dans la taille de la population sont principalement attribuables au solde naturel, qui représente 99% de ces variations, plutôt qu’au solde migratoire, qui ne représente que 1%.

En comparaison, la densité de population en Mauritanie est de 3,5 habitants par kilomètre carré, tandis qu’elle est de 80 au Sénégal et de 90 au Maroc, et le Mali voisin, avec une superficie sensiblement identique, abrite une population de 21 millions d’habitants environ.

De plus, la Mauritanie fait face à une émigration significative de jeunes talents à la recherche de meilleures opportunités à l’étranger, ce qui diminue son capital humain. Ainsi, le faible nombre d’habitants par rapport à la superficie du pays entraîne des répercussions économiques, sociales et politiques, nécessitant une réflexion approfondie et la mise en œuvre de stratégies pour relever les défis du développement dans un contexte de sous-peuplement.

Parmi les diverses stratégies envisageables, l’utilisation de la démographie comme levier de développement peut s’avérer particulièrement appropriée pour la Mauritanie. La croissance démographique peut être un atout précieux pour le pays à condition d’être gérée de manière réfléchie. Une population en expansion offre un potentiel considérable en termes de main-d’œuvre, de marché intérieur et de ressources humaines pour soutenir la croissance économique et le développement social. Dans cette perspective, plusieurs possibilités s’offrent au pays.

La mise en place d’une politique pro-natale, qui encourage chaleureusement les familles à avoir plus d’enfants en offrant une gamme d’avantages financiers et sociaux, peut être envisagée. La France, depuis la fin de la seconde Guerre mondiale, est souvent citée en exemple pour ses politiques pro-natales généreuses, comprenant des allocations familiales, des avantages fiscaux pour les familles nombreuses, et des congés de maternité et de paternité rémunérés.

Cependant, il est impératif de souligner que cette stratégie doit être équilibrée, en veillant à ce que des politiques et des programmes concomitants garantissent la santé, l’éducation et le bien-être de la population, tout en visant à réduire la mortalité infantile et maternelle. L’harmonie entre la croissance démographique et la pérennité s’impose comme un impératif essentiel afin de tirer pleinement profit de cette opportunité bénie.

La promotion de l’égalité des sexes, en offrant aux femmes un meilleur accès à l’éducation, à la santé et à l’emploi, pourrait également influencer positivement les taux de natalité. Des pays tels que la Suède et l’Afrique du Sud ont réussi à maintenir des taux de natalité élevés tout en soutenant l’égalité des sexes, en mettant en place des programmes visant à améliorer l’accès des jeunes femmes à l’enseignement supérieur et à la formation professionnelle.

Les migrations circulaires offriraient une opportunité aux travailleurs mauritaniens établis à l’étranger de contribuer activement au développement économique de leur pays d’origine en envoyant des fonds. Cette approche va au-delà de la simple mobilité géographique. Elle incarne une notion de dualité, où les individus se trouvent entre deux mondes, deux réalités. Les migrants circulaires deviennent ainsi des acteurs actifs dans l’économie, apportant des ressources et de nouvelles perspectives à leur patrie d’origine.

La promesse des migrations circulaires réside non seulement dans la transmission de richesses monétaires, mais transcende également les chiffres. Le gouvernement, par le biais d’institutions telles que l’APIM, pourrait encourager cette pratique en mettant en place des programmes d’incitation et en créant un environnement favorable au retour des compétences, tout en luttant contre le phénomène de « brain drain ». L’expérience internationale des travailleurs peut s’avérer précieuse pour le développement économique de leur pays d’origine, apportant de nouvelles compétences, des idées novatrices et des réseaux internationaux.

L’exemple de l’Espagne, qui met en œuvre une politique de migration circulaire en relation avec le Maroc et le Sénégal, illustre la dimension universelle de cette approche. Il souligne que les flux migratoires ne sont pas simplement des mouvements de populations, mais des liens entre les nations, des courants de changement et d’évolution. Une politique éclairée peut contribuer à empêcher les pays sous-peuplés de perdre leur population talentueuse.

La politique de main-d’œuvre étrangère, parfois désignée sous le terme élégant de « politique d’immigration sélective ou choisie, » constitue une approche éclairée qui permet à un État d’ouvrir ses bras à des travailleurs venus d’horizons lointains pour combler les lacunes en main-d’œuvre, renforcer son assise économique et répondre de manière éclairée aux besoins spécifiques du marché du travail.

À une époque où les arcanes du pouvoir politique en Mauritanie se plongent dans l’épineuse problématique de la citoyenneté, en initiant un recensement dès l’an 2011 qui engendre une situation d’apatridie pour de nombreux concitoyens, il suscite un profond émerveillement de constater que d’autres nations, dispersées aux quatre coins du monde, s’adonnent à des approches novatrices en vue d’accroître leur population active.

Cette politique de la main-d’œuvre étrangère implique fréquemment la mise en place de réglementations et de procédures méticuleuses pour attirer et administrer les travailleurs étrangers de manière régulée et méthodique. Et cela se pérennise par l’installation définitive de des ces populations dans les pays d’accueil.

Le Canada illustre un exemple emblématique de réussite en matière de politique de main-d’œuvre étrangère, en s’appuyant sur un système d’immigration axé sur les critères de compétence pour favoriser l’arrivée de travailleurs hautement qualifiés. D’autres nations, telles que l’Australie et Singapour, ont également embrassé cette politique, privilégiant des travailleurs chevronnés dans les domaines de la technologie de l’information et de la finance, tandis que le Qatar se tourne vers cette approche pour alimenter son secteur pétrolier et ses projets de construction grandioses.

En somme, la démographie peut être un atout majeur dans la quête du développement économique pour la Mauritanie. En capitalisant sur une population jeune, en encourageant l’émigration choisie et en favorisant la migration circulaire, la Mauritanie peut transformer sa démographie en une force motrice du progrès économique. Toutefois, pour maximiser ces avantages, une approche équilibrée et une gestion éclairée sont essentielles. Il est important de noter que chaque pays est unique, et qu’il n’existe pas de solution universelle. Les politiques démographiques doivent être adaptées aux besoins et aux réalités spécifiques de chaque nation.

 

 

Aboubacry Lam

 

 

 

(Reçu à Kassataya.com le 28 octobre 2023)

 

 

 

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