
Courrier international – Réunis à Accra (Ghana) les 17 et 18 août, les chefs d’état-major des États membres de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont peaufiné “la logistique et la stratégie” de la force d’intervention de l’organisation, et se sont entendus sur le “Jour J” du lancement de l’opération, rapporte la Deutsche Welle.
“Nous sommes prêts à intervenir dès que l’ordre sera donné”, a déclaré en clôture de la réunion le commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de la Cédéao, Abdel-Fatau Musah. “Le Jour J a également été décidé, mais nous n’allons pas le révéler”, a-t-il ajouté devant la presse. Tout comme il a refusé de dévoiler “combien de soldats seraient déployés, et les autres détails stratégiques”, souligne la radio allemande.
Comme à son habitude depuis le début de la crise, l’organisation régionale a manié vendredi la carotte et le bâton. Tout en assurant que sa force d’intervention était fin prête à entrer au Niger, elle a réaffirmé que “l’option d’une solution diplomatique [restait] sur la table” et qu’elle laissait “la porte ouverte à un départ négocié des putschistes”, observe El País.
M. Musah a ainsi évoqué une “possible” mission diplomatique, samedi à Niamey. “Mais nous n’allons pas maintenir le dialogue indéfiniment, nous allons devoir fixer une limite”, a-t-il averti. “Le coup d’État au Niger a été la goutte qui a fait déborder le vase”.
La junte accrochée au pouvoir
Depuis le putsch du 26 juillet, la junte dirigée par le général Abdourahamane Tchiani n’a montré aucun signe suggérant qu’elle pourrait renoncer au pouvoir. Les missions de médiation envoyées par la Cédéao ont systématiquement trouvé porte close à Niamey, en dépit des menaces et des sanctions de l’organisation régionale et des Occidentaux.
Les chances paraissent donc minces de voir la mission de samedi – si tant est qu’elle ait lieu et que le général Tchiani accepte de rencontrer la délégation – obtenir le départ des militaires et le retour au pouvoir du président Mohamed Bazoum. La Cédéao n’aura alors d’autre choix que de mettre à exécution sa menace d’intervention militaire.
“Reste à savoir quel type de soutien va recevoir” cette opération, s’interroge le Financial Times. “La France et les États-Unis, qui ont tous deux des troupes au Niger, ont soutenu les efforts de la Cédéao pour rétablir l’ordre constitutionnel sans dire pour autant s’ils accueilleraient favorablement une action militaire”, note le quotidien britannique.
Et au Nigeria, poids lourd de l’organisation, l’idée d’une intervention armée au Niger a suscité une vive opposition “de tous les côtés du spectre politique”, ainsi que dans “la société civile et les médias”, ajoute le titre économique.
Mais selon Al-Jazeera, “la plupart des quinze États membres de la Cédéao sont prêts à contribuer à la force commune, à l’exception du Cap-Vert [opposé à l’intervention] et des pays dirigés par des juntes militaires – le Mali, le Burkina Faso et la Guinée”.
“Vives inquiétudes pour le peuple nigérien”
La junte nigérienne n’avait pas réagi vendredi soir aux annonces du bloc régional, mais elle a affirmé à plusieurs reprises qu’elle répliquerait immédiatement à toute intervention militaire extérieure – avec le soutien probable du Mali et du Burkina Faso, solidaires des putschistes nigériens.
Alors que la menace d’un conflit au cœur de l’une des régions les plus instables d’Afrique se s’amplifie de jour en jour, “le Haut-Commissaire des droits de l’homme de l’ONU, Volker Türk, a exprimé ses vives inquiétudes pour le peuple nigérien, contraint d’endurer encore plus de misère depuis le coup d’État militaire du mois dernier”, écrit ActuNiger.
Depuis Genève, M. Türk a rappelé vendredi que la population du Niger, l’un des pays les plus pauvres au monde, “a déjà subi beaucoup d’épreuves au fil des ans”.
“Aujourd’hui, même les personnes élues par la population du Niger pour construire une voie permettant de mettre fin à leur dénuement ont été destituées par la force et sont détenues par les responsables du coup d’État, remettant ainsi en cause l’ordre constitutionnel.”
Le Haut-Commissaire s’est également inquiété de la décision de la junte de poursuivre le président Bazoum en justice pour “haute trahison”, une accusation “sans fondement juridique”, estime-t-il.
Source : Courrier international
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