Sénégal : Juan Branco, l’avocat d’Ousmane Sonko, accuse le pouvoir de « crimes contre l’humanité »

Le gouvernement, qui nie fermement avoir utilisé des civils armés pour réprimer les manifestants, dénonce une démarche « puérile et ridicule » du pamphlétaire français.

Le Monde – Des morts étalés au sol, des pieds, des mains ou des bouches éclatées, des civils traînés par terre ou un enfant utilisé comme bouclier humain par les forces de sécurité. Les images projetées lors de la conférence de presse donnée par Juan Branco dans la matinée du jeudi 22 juin à Paris se voulaient explicites. Pendant un peu plus d’une demi-heure, face à une audience majoritairement composée des partisans de l’opposant sénégalais Ousmane Sonko, l’avocat et pamphlétaire français a présenté ce qu’il considère comme « des éléments de preuve des exactions du régime dirigeant du Sénégal à l’encontre de la population », sur la période comprise entre mars 2021 et mars 2023.

Le président Macky Sall et son ministre de l’intérieur, Antoine Félix Diome, ainsi que « 112 suspects sur l’ensemble de la chaîne de commandement que nous avons reconstituée », sont accusés de commission et complicité à la commission de « crimes contre l’humanité ». Juan Branco avance que les actes ont été commis « dans le cadre d’une attaque générale et systématique contre une population civile » qui aurait fait 50 morts depuis mars 2021, « dans un contexte où la découverte des ressources gazières et pétrolières sur ce territoire a créé une avidité de se maintenir au pouvoir coûte que coûte ».

La veille, celui qui ne se présente pas seulement comme l’avocat d’Ousmane Sonko mais aussi celui de nombreuses parties civiles sénégalaises et franco-sénégalaises, avait affirmé avoir déposé une plainte en France et soumis une demande d’enquête à la Cour pénale internationale (CPI), s’appuyant sur 710 « éléments de preuves ».

« Nervis »

« Des citoyens, des fonctionnaires, des gens travaillant dans l’ensemble des administrations du pays nous ont apporté des éléments de preuves, des documents, des contrats, des vidéos et des témoignages qui nous ont permis d’établir l’existence de 60 crimes de meurtre, considérés comme crimes contre l’humanité, de plusieurs milliers de crimes d’emprisonnement en violation des normes de droit internationales, de plusieurs milliers d’atteintes à la vie et de blessures, et enfin d’actes de persécution et d’autres actes inhumains », a-t-il déclaré d’un ton ferme.

Juan Branco, qui a rejoint la défense d’Ousmane Sonko au printemps mais n’a pas pu assister aux procès visant l’opposant, assure que Marième Faye Sall, la première dame, Amadou Sall, le fils du président, et d’autres proches du dirigeant sénégalais seraient impliqués dans le recrutement et le financement de « nervis », ces civils armés aux côtés des forces de l’ordre, lors des émeutes qui ont suivi la condamnation à deux ans de prison ferme du leader des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), début juin, pour « corruption de la jeunesse ». Des heurts qui ont fait au moins 16 morts selon les autorités, 23 selon l’ONG Amnesty International.

« Afin d’armer ces nervis, la présidence de la République, elle-même, directement, en tant qu’institution, a mis en place des commandes d’armes particulièrement massives dont nous avons retracé dans les moindres détails le cheminement », affirme l’avocat. Selon lui, elles ont été organisées par le courtier en équipement militaire Gabriel Peretz, présenté comme une « intime de Macky Sall », qui aurait fait livrer « 104 tonnes d’armes à la présidence de la République au deuxième semestre 2022 ». Ces réserves, en partie stockées à l’ancien aéroport Léopold-Sédar-Senghor et dans des « caches », seraient essentiellement constituées de munitions pour armes lourdes, ainsi que d’armes légères dont l’avocat dit redouter l’usage en cas de crise politique.

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Source : Le Monde – (Le 23 juin 2023)

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