Massacre de Shakahola : Paul Mackenzie, le chauffeur de taxi devenu gourou évangélique au Kenya

Il y a vingt ans, l’homme originaire de Mombasa s’est autoproclamé pasteur évangélique après avoir « entendu l’appel » de Dieu pour créer sa propre église.

Le Monde  – Au Kenya, Paul Mackenzie est devenu le nouvel ennemi public numéro un. Du président William Ruto qui l’a qualifié le 24 avril de « terroriste » à la foule en colère qui a ravagé son ancienne église de la ville de Malindi, dans la province de la Côte (sud-est), le 1er mai, le pays tout entier regarde ce pasteur autoproclamé comme l’un des pires assassins de l’histoire récente de la nation.

Ce chrétien évangélique est soupçonné d’avoir poussé les adeptes de sa communauté à mourir de faim. Depuis début avril, des cadavres ne cessent d’être exhumés de la forêt de Shakahola, où Mackenzie et ses fidèles s’étaient récemment installés. Au moins 120 personnes ont été retrouvées mortes.

Arrêté le 14 avril, le prédicateur est apparu étonnamment détendu quinze jours plus tard lorsqu’il a été présenté à une juge qui l’a inculpé pour « terrorisme », une décision exceptionnelle. Discret, « il a gardé son look de chauffeur de taxi », constate Eric, qui tient un café dans la station balnéaire de Malindi, et qui le côtoyait du temps où il conduisait son automobile jaune dans les rues touristiques de la ville, sa première vie. Devant la cour, l’homme de 51 ans apparaît mal rasé, en veste de sport rose et noire, un peu trop large pour lui. Il n’a apparemment rien en commun avec les nombreux télévangélistes du pays, qui n’hésitent pas à arborer un style clinquant, exhibant leurs richesses.

Pourtant, Paul Mackenzie est charismatique. Lors de son arrestation, il plaisantait avec les journalistes venus couvrir l’événement ; depuis le box des accusés, il sourit aux caméras et continue à clamer son innocence. Cinquième garçon d’une fratrie de onze enfants, le gourou vient d’une famille modeste de la banlieue de Mombasa, la grande ville côtière. Son brevet en poche, il vit de petits métiers. D’abord vendeur ambulant, il parvient à se hisser chauffeur de taxi grâce à sa sœur qui lui offre une voiture et de quoi passer sa licence.

 

« Rencontrer Jésus »

 

Jusqu’en 2003 où, dit-il, il a une vision. « Un jour, il nous a informés qu’il avait reçu l’appel [de Dieu] qu’il devait ouvrir sa propre église », raconte son frère cadet, Robert Mbatha. Paul Mackenzie fonde sa congrégation à Malindi, et rassemble rapidement plusieurs milliers de croyants. D’autres fidèles le suivent sur Times TV, la chaîne de télévision qu’il a créée.

En 2017, les autorités s’alarment des prêches de ce pasteur, qui semblent se démarquer de ceux prononcés dans les quelque 4 000 autres communautés évangéliques du pays. Rejet total de l’Etat, de l’éducation nationale, des hôpitaux publics et refus de posséder des documents d’identité : cette année-là, la teneur de ses sermons lui vaut sa première arrestation. « Paul paraît humble, mais entretient des idées très controversées », assure Titus Mweri, qui fut son assistant à l’église de Malindi.

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(Nairobi, correspondance)

 

 

 

 

Source : Le Monde 

 

 

 

 

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